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RENCONTRE AVEC… Pierre Paparemborde, directeur marketing de l’Élan

De la culture rugby à celle du basket, de son expérience professionnelle aux quatre coins du monde à son retour en Béarn, il livre ses impressions sur ses premiers mois avec les Vert & Blanc
INQUIÉTANT – L’Élan (brisé) Béarnais sous la menace
Engagé en septembre dernier par Sport & Co, la régie publicitaire de l’Élan Béarnais, Pierre, fils de l’emblématique Robert Paparemborde, officie aujourd’hui à la tête de la structure commerciale et marketing de ce club mythique, revenu au sommet de l’élite du basket français.

Engagé en septembre dernier par Sport & Co, la régie publicitaire de l’Élan Béarnais, Pierre, fils de l’emblématique Robert Paparemborde, officie aujourd’hui à la tête de la structure commerciale et marketing de ce club mythique, revenu au sommet de l’élite du basket français.

Un retour au pays et dans le basket : inattendu ?

Pierre Paparemborde – Plutôt. Je comprends que les gens associent mon nom au rugby et à la Section, mais moi je suis avant tout un exécutif, un professionnel de l’administration. J’ai fait toute ma carrière au sein de grandes entreprises multinationales, et après 15 ans à l’étranger, nous avons décidé en famille de revenir au pays pour une petite pause. Une année sabbatique en quelque sorte. C’est tout à fait par hasard qu’on m’a proposé ce poste à l’Elan Béarnais et je n’ai pas hésité une seconde à mettre mon expérience au service d’un club qui a bercé toute mon enfance, au même titre que la Section Paloise.

L’Elan est aussi de retour… dans la cour des grands

P. P. – Oui c’est vrai… je dois leur porter un peu bonheur (rires). Sérieusement, c’est avant tout le résultat du travail des dirigeants et de l’entraîneur, Éric Bartéchéky. Quand tu es 2e ex-aequo, tu ne peux pas t’empêcher de penser que le club pourrait remporter, dès cette année, un 10e titre national, qui serait historique - seuls Limoges (11) et l’ASVEL (18) devancent les Béarnais au palmarès de la Pro A. C’est notre projet que nous avons baptisé La Décima ! L’étoile des 10 titres sur le maillot de l’Élan. La cour des grands.

Et le public suit…

P. P. – Trois matches d’affilée à guichets fermés, le Palais des Sports reprend (enfin) vie ! Moi qui n’avais connu que l’Élan de la Moutète, je comprends à quel point le public palois a pu vibrer dans les années 1990 et 2000. Quand tu vois 8.000 spectateurs en folie dans une salle comme celle-là, tu te dis que ça a dû faire trembler quelques gâchettes dans les moments décisifs. On ne le dit pas assez, mais l’Élan a la plus grosse affluence moyenne de Pro A. Et le public joue assurément un rôle dans le retour du club au premier rang.

Et puis l’Élan a trouvé sa pépite…

P. P. –DJ Cooper est la perle rare qu’espérait le club depuis longtemps. Sans faire injure aux autres joueurs, c’est le meilleur joueur qui soit passé à l’Élan ces 10 dernières années. C’est un show-man au talent exceptionnel, qui peut permettre au club d’aller très loin et surtout de reconstruire autour de lui une équipe qui gagnera des titres et replacera Pau sur la carte nationale et européenne.

Mais, il va falloir le garder…

P. P. – Oui, mais le club n’y arrivera pas tout seul. Il faudra la mobilisation de tous, notamment des partenaires et des entreprises pour le conserver et pour construire dans la durée. C’est là qu’on va voir s’il existe une réelle volonté de revoir l’Élan côtoyer les sommets. On sera très vite fixés. Nous avons 3 mois pour le garder.  Quand tu penses qu’avec le salaire d’un Conrad Smith (le joueur All Black de la Section), tu t’achètes 4 DJ Cooper, tu joues le titre chaque année et tu ramènes la Champions League au Palais des Sports… Ça devrait quand même interpeller certains.

En résumé, on peut dire que l’Élan est redevenu porteur ?

P. P. – Oui et Non.  Oui, pour les raisons que l’on vient d’invoquer, un club qui a un challenge avec ce 10ème titre à aller chercher, un public qui adhère en remplissant le Palais, un joueur exceptionnel autour duquel tu peux bâtir une équipe sur le long terme, des jeunes formés au club qui s’affirment de match en match... Non, parce que cela ne se traduit pas encore par un réel engouement financier pour supporter le projet du club. L’Élan a le plus gros public de France (donc la meilleure recette en billetterie) et le 7ème budget de Pro A… y’a quand même un problème. On pourra me dire que j’ai qu’à mieux faire mon boulot pour chercher des sponsors… (rires)… je ne suis pas né de la dernière pluie. J’ai 45 ans et 20 ans de multinationales derrière moi. Les budgets c’est comme les ascenseurs, faut que quelqu’un appuie sur le bouton pour que ça monte et ça descende. J’ai visité d’innombrables sociétés, rencontré de nombreux dirigeants depuis 5 mois et j’entends inlassablement le même discours…

Que manque-t-il ?

P. P. – Simplement que tout le monde s’approprie à nouveau ce club mythique. Les joueurs et les dirigeants ont fait ce qu’il fallait pour revenir au premier plan. Maintenant, le projet du club doit être porté par l’ensemble du territoire et les grandes entreprises implantées en Béarn, comme c’est le cas de la Section Paloise. Les médias ont également leur rôle à jouer. Il me paraît évident que c’est à eux, collectivement et individuellement, qu’appartient la responsabilité d’amplifier la dynamique actuelle et de permettre à l’Elan Béarnais de s’installer durablement au sommet du basket français et même européen.

On a l’impression d’assister à une opposition avec la Section tout de même…

P. P. – Pas du tout ! Moi j’adore la Section et je souhaite qu’elle poursuive son retour au premier plan et son ascension vers la consécration suprême. Même si je pense que cela sera plus difficile de ramener le Brennus sur la place Royale que d’être champion de France de Pro A. Les dirigeants de l’Élan supportent la Section et je suis sûr que c’est réciproque. Ça, ce sont des commentaires de médias. Quand on est béarnais, on ne supporte pas la Section ou l’Élan, on supporte les deux, au même titre. Les deux clubs font partie du patrimoine sportif de la région. On peut préférer une discipline sportive à une autre, ça je le conçois aisément puisque c’est mon cas, mais on ne peut pas souhaiter le déclin d’un des deux clubs emblématiques de la région. La ville en serait orpheline. Il existe un public pour le rugby et un pour le basket à Pau (les dernières affluences le prouvent), il faut respecter ce constat.

Les semaines qui viennent vont être décisives…

P. P. – Absolument. Et tout va se jouer sur l’engagement d’un nouveau partenaire majeur. C’est difficile d’accepter que l’Elan, 2e du championnat de France, qualifié pour la Leaders Cup, recherche toujours un deuxième sponsor maillot : c’est un investissement de 50.000 euros pour la demi-saison et les play-offs. Ça devrait pouvoir se trouver si on avait le soutien de tous les acteurs de la région.

Vous allez devoir organiser un Cooperthon ?

P. P. – Rires… Pourquoi pas… Faut penser à tout pour garder le meilleur joueur de Pro A à Pau, mais aussi les jeunes formés au club, comme Elie Okobo qui explose cette saison. Encore une fois, tout passe d’abord par une volonté des « grands décideurs» du Béarn pour déclencher la mobilisation de partenaires majeurs. Que ce soit au niveau de la nouvelle agglomération paloise, mais aussi de toutes les communautés de communes du « Pays de Béarn ». Leur soutien est également nécessaire pour faire en sorte que le Conseil régional apporte la même contribution à l’Elan qu’à Limoges. Aujourd’hui, nous bénéficions d’un soutien financier 3 fois inférieur.

L’avenir pour le Club et pour le Palais des Sports ?

P.P. – Moi je ne suis pas devin et il ne m’appartient pas de prendre les décisions. Tout ce que je sais, c’est que l’Elan Béarnais ne doit pas laisser passer l’opportunité de se réinstaller durablement au sommet du basket français. A mon avis, les choses vont bouger dans les prochaines années. On va voir revenir les stars françaises de la NBA qui vont investir dans les clubs, comme l’a déjà fait Tony Parker à l’ASVEL. Le fossé va se creuser inexorablement avec les clubs subventionnés et l’Élan n’aura plus sa place dans l’élite s’il ne parvient pas à faire évoluer son modèle économique. Quel Elan veut-on à l’horizon 2020/2025 ? Plus que jamais, la question se pose de savoir si l’Elan doit rester sous statut de société d’économie mixte public-privé, ou si elle doit devenir une entreprise sportive privée comme la Section. Je ne connais pas et ne me mêle pas des projets des actionnaires du club, mais il est évident que les lignes devront bouger très vite à ce niveau, sinon l’Élan perdra pied sportivement. Même chose pour le Palais des Sports, faut-il le privatiser comme l’indique la tendance actuelle du naming des grandes Arenas ? Je connais très bien le projet de l’U Arena de Jacky Lorenzetti. Si on veut maintenir le Palais des Sports comme la 3ème salle de France et retrouver des évènements majeurs, comme la Coupe Davis, il faudra investir pour le remettre à niveau en terme de lumières, de son et d’installations réceptives pour le public. Pau a les outils, un club résidant et un public. Il appartient maintenant aux acteurs de mener une réelle réflexion sur le sujet.

Revenons aux partenariats. Quels sont les atouts de l’Elan ?

P.P. – Il faut 35 millions pour être champion de France de rugby. Avec 7 millions (5 fois moins), dans le basket, tu joues le titre et la Champions League. C’est un constat qui devrait attirer les entreprises. Le basket à Pau attire un public plus large et plus féminin que dans d’autres sports. Nous avons réalisé une grande enquête qui nous a permis de constater que l’Élan est le club du grand Bassin de l’Adour et pas seulement de la ville de Pau. Un tiers de notre public ne réside pas dans le Béarn, mais dans les territoires limitrophes. Nous avons également 39% de femmes qui viennent au Palais, contre 34% dans les autres salles de France. Il faut travailler là-dessus. C’est un sport de salle, où il fait bon toute l’année, et un sport qui se prête au spectacle, comme on le voit en NBA. L’Élan a un besoin impératif de renouveler son public et d’attirer plus de jeunes. Nous y réfléchissons. Il faut également innover dans les prestations offertes aux entreprises. C’est le cas avec la loge « Elan Inside », qui a été créée cette année et qui a reçu le prix de l’innovation au dernier séminaire de la LNB.

Le mot de la fin ?

P.P. – L’Elan Béarnais a retrouvé une équipe capable de gagner des titres, tient une pépite qui veut rester à Pau, un public hors-norme. J’espère que les décideurs  et les entreprises le comprendront, car il y a une réelle attente des milliers de fans qui viennent au Palais des Sports. J’espère surtout qu’à terme, on ne sacrifiera pas sur l’autel des préférences personnelles, tout le travail des dirigeants et des élus qui ont fait de l’Élan, un monument du patrimoine sportif béarnais depuis 1908.

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