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    Les dits du vendredi

    Irouette et Roger Walkowiak… Les mots de Christian Laborde
    Flocons de poésie à Saint-Lary-Soulan avec Christian Laborde
    Pour Walkowiak…

    Le nom d’abord : Walkowiak. Il claque comme un coup de fouet. Et le diminutif  – Walko – a  lui aussi de la gueule. Ce nom qui fait la joie de la bouche est celui d’un grand champion repéré par André Leducq lequel, remember, a remporté le Tour de France à deux reprises, en 1930 et 1932.

    Walkoviak, lui, remporte le Tour en 1956. Un Tour auquel ne participent ni Bobet, ni Coppi, ni Koblet. Et c’est pour cette raison sans doute que la presse, dans les heures qui suivent la victoire de Walko,  parle de  « Tour à la Walkowiak ». L’expression  servirait donc à désigner un Tour sans couleur, sans éclat, un Tour remporté par un coureur de second plan, bénéficiant des circonstances de course, du hasard, de la malchance des uns, de la méforme des autres. Cette expression collera à la peau de Walko jusqu’à sa mort, survenue le 6 février 2017.

    Cette expression, lacérons-la, déchirons-la, piétinons-la !   Walkowiak a remporté le Tour 56 grâce à son intelligence et sa classe. Son intelligence d’abord ! S’étant glissé dans une échappée victorieuse, Walko prend le maillot jaune à Angers. Sur les conseils de son directeur sportif, Sauveur Ducazeaux, il décide de se débarrasser d’un maillot que les coureurs de son équipe – la modeste formation régionale Nord-Est-Centre – s’épuiseraient en vain à défendre. Et ce maillot jaune, dont il se hâte de se débarrasser, il prévoit de le reconquérir, les Pyrénées franchies, dans la terrible étape des Alpes, Turin-Grenoble. Le col du Mont-Cenis (2.008 m), de la Croix-de-Fer (2.087 m) et du Luitel (1.235 m) sont au menu.

    Un menu pour Federico Bahamontes et pour Charly Gaul, les deux plus grands grimpeurs de l’histoire du Tour. Dans la Croix-de-Fer, le démarrage que place Walkowiak est d’une violence inouïe. Quelle classe ! Seul Gaul  est en mesure de répondre. Gaul, et Stan Ockers, champion du monde. Bahamontes, lui, renonce. Et c’est le trio Gaul-Ockers-Walko qui, la Croix-de-Fer franchie, puis la descente effectuée plein pétrole, se lance à l’assaut du Luitel. C’est au tour de Gaul d’attaquer. Walkowiak s’accroche, craque, se refait la cerise, repart. La classe, c’est d’attaquer. La classe, c’est aussi de repartir quand le corps crie : stop !  A Grenoble où Gaul s’impose, Walkowiak reprend, comme il  avait prévu de le faire, le maillot jaune. Et ce maillot jaune, il le garde jusqu’à Paris.

    Roger Walkowiak est, avec  Jean Robic, le seul coureur issu d’une formation régionale à remporter le Tour en dictant sa loi aux équipes nationales. Un crime de lèse-majesté…

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    Vic-en-Bigorre

    J’ai été à la rencontre des élèves de Lycée agricole et forestier de Vic-en-Bigorre. Je leur ai parlé des vaches qui souffrent dans les fermes-usines, puis de celles  de mon enfance, libres dans les prés et les rues d’Aureilhan, d’Yvette Horner écrasant leurs bouses avec les roues de sa Cadillac. Ils m’ont posé des questions :

    - Qu’est-ce qu’un écrivain ?

    - Un voyou qui aime les voyelles !

    Je leur ai parlé de mes journées : la table, l’écran, le clavier, les mots, le thé, le coup d’œil jeté à la presse puis, de nouveau, les mots lus à voix haute afin de vérifier que le son est là, qu’il est bon, qu’il est rond. Le sens n’est rien s’il n’est le son. Je leur parle de la joie, du bonheur d’écrire. Le vertige de la page blanche, la souffrance, l’écrivain qui pause, qui pense : tout ça, c’est pas moi. Moi, c’est la joie, la phrase de Breton : « Après toi, mon beau langage ! »

    Puis, ils m’ont invité à visiter  l’exploitation où ils apprennent le métier de paysan. Ils m’ont présenté la vache Irouette. Irouette : moitié alouette, moitié Irouléguy.  La vache, la vie, le vin, les oiseaux : résistance.

    *

    Mode

    Je ne suis pas les modes, j’impose la mienne.

    *

    Vocabulaire

    Tous ces mots moyens et mous que l’on entend à longueur de journée : « festif », « compliqué », « citoyen », « accompagner », « au fond », « voilà ». Le verbe tintinnabuler, lui par contre, on ne l’entend jamais.

    Un monde dans lequel le verbe tintinnabuler n’est jamais prononcé n’est pas le mien.

    Christian Laborde

    www.christianlaborde.com

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