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    Barcelone mise sur un urbanisme vert

    La cité catalane évolue pour faire face aux grands enjeux de la pollution et de la qualité de vie. 2020 et le confinement du printemps semblent avoir accéléré cette transformation…
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    Pointée du doigt par Bruxelles pour la mauvaise qualité de son air, Barcelone essaie de se réinventer depuis plusieurs années, entre création d’îlots urbains préservés, grands travaux et « urbanisme tactique ».

    Il y a le covid, mais pas que. D’après un rapport de la municipalité barcelonaise, la pollution a provoqué sur place plus de 400 morts prématurées par an entre 2010 et 2017. Depuis près de 20 ans, les émissions de CO2 et de particules fines y sont supérieures aux seuils respectivement définis par l’OMS et par Bruxelles.

    En 2017, la mairie s’est engagée dans un projet de refonte de ses espaces urbains, notamment via la création de « superilles » (ou super-îlots) se caractérisant par des rues semi-piétonnes, des trottoirs élargis, des carrefours transformés en espaces de vie et en jardins publics, et bien sûr par une circulation automobile réduite à sa plus simple expression, avec une vitesse limitée à 10 km/h. Avec un premier exemple dans le secteur… de l’Eixample, où le petit quartier de Sant Antoni a ainsi été remodelé, arboré et nanti d’espaces de jeux pour enfants. Tout paraît fait pour qu’habitants et piétons se réapproprient l’espace urbain.

    L’Eixample fait sa mue…

    Ceux-ci sont d’ailleurs encouragés à agir par eux-mêmes, en vertu des principes de l’urbanisme dit « tactique » (c’est-à-dire citoyen, participatif et provisoire, utile pour « tester » de nouvelles habitudes de vie à l’échelle de rues et de quartiers). Le phénomène aurait pris à Barcelone une ampleur inédite pendant le confinement du printemps 2020, avec un certain nombre de petits aménagements temporaires qui ont grignoté l’espace dévolu aux voitures.

    Ce qui a été expérimenté à Sant Antoni devrait se généraliser dans tout l'Eixample. Au total, la zone devrait à terme compter 6,6 hectares de verdure et 33,4 d'espaces piétons, avec 21 nouvelles places et 21 nouveaux espaces verts. Une rue sur 3 devrait se muer en « axe vert ». « L'objectif est que les citoyens de l'Eixample disposent d'un espace ou d'un axe vert à 200 mètres de chez eux au maximum », explique la mairie, qui a récemment lancé deux concours publics « pour sélectionner les équipes d'architectes et d'ingénieurs qui contribueront à définir le modèle d'une rue pacifiée du XXIe siècle et les places qui seront créées à la croisée des rues ». Le réaménagement de 4 axes et de 4 places est prévu d’ici 4 ans.

    À Barcelone, une zone de faible émission de CO2 a aussi été lancée il y a tout juste un an, interdite aux véhicules légers les plus polluants pendant les jours ouvrés (entre 7h et 20h). Ces restrictions s’appliquent désormais aussi aux véhicules utilitaires, camions et bus sans badge environnemental. « Le nouveau plan de mobilité urbaine 2024 accorde une priorité maximale à la conception de politiques pour aider à construire une ville plus sûre, plus intelligente, plus saine, plus équitable et durable. L'objectif principal est que 81,52% des déplacements soient effectués à pied, en transports en commun ou à vélo d'ici 2024 », indiquait la municipalité en janvier 2020. Ce grand plan se décline en pas moins de 60 domaines d'action et 340 mesures.

    2020 : un tournant pour Barcelone ?

    En fin d’année dernière, d’autres annonces ont montré que la municipalité comptait accélérer encore sur le sujet. En novembre, une soixantaine d’experts ont d’abord rendu un rapport présentant 15 mesures en faveur d’une « mobilité du futur » à Barcelone. Parmi celles-ci, la création d’un péage urbain avait déjà la faveur de la maire Ada Colau, élue en 2015 et souvent comparée à Anne Hidalgo. Ce péage, s’il est mis en place, pourrait rapporter 8 milliards d’euros et faciliter le financement des transports publics. Et il pourrait surtout entraîner une baisse de 27% du trafic automobile. Au-delà, le rapport plaide pour la création de parkings-relais autour de la ville et à proximité de ses gares, ou encore pour des initiatives de covoiturage.

    Plus récemment, en décembre, la commission d’urbanisme locale a approuvé le projet de travaux sur la fameuse Avenue Diagonale qui traverse la ville, avec au menu piste cyclable, tramway sur un couloir central, larges trottoirs et espaces verts. Le chantier doit commencer à l’automne et coûtera 34 millions d’euros. Comme pour ce genre de projet à Paris, ces travaux suscitent les critiques de l’opposition.

    On rappelle que la ville catalane doit sa physionomie générale actuelle à Ildefons Cerdà, dont le projet de réforme, d'aménagement et d'extension urbaine remonte aux années 1860, soit une dizaine d’années après le début des travaux parisiens du baron Haussmann. Un peu dans le même esprit, ce projet barcelonais se fondait sur de larges avenues, de hauts bâtiments et un plan général en damier. C’est l’ingénieur et urbaniste espagnol qui est d’ailleurs à l’origine du quartier de l’Eixample (c’est-à-dire de « l’extension »), que longe au nord la susdite Avinguda Diagonal.

    Plus d’un siècle et demi après ce plan Cerdà, c’est finalement une nouvelle révolution urbanistique qui semble finalement en cours à Barcelone.

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