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    Grains de Sable

    Silences

    Ma musique préférée est le silence tout comme mon instrument préféré est la voix pour chanter. C’est pratique, économique, et sur une île déserte ça simplifie les bagages à emporter !

    Il y a le silence du jardin un dimanche après-midi, faux silence s’il en fut. On y entend une tondeuse lointaine, les conversations assourdies des voisins dans le jardin d’à côté, quelques oiseaux et, plus loin, un chien, une voiture qui passe.

    C’est un silence tranquille et sécurisant, un silence assoupi de sieste paisible, un silence qui repose et reconstruit. Il y a le silence de la campagne, si bruyant celui-ci aussi. On est pourtant dans une maison isolée au bout de nulle part, mais je ne vous dis pas le boucan pour qui sait écouter.

    Les vaches de la ferme voisine ne peuvent s’empêcher de meugler et le chien des fermiers n’en fait qu’à sa tête tandis que poursuivi par des oiseaux piailleurs, le fermier conduit son tracteur. C’est un silence joyeux et affairé qui nous donnerait presque des scrupules de faire une sieste pourtant bien méritée !

    Il y a le silence étouffant d’avant l’orage, on est un peu tendu et comme les animaux qu’on n’entend plus, on écoute ce silence lourd. La terre va-t-elle trembler, l’orage va-t-il enfin éclater ? Il y a le silence de la nuit, à la campagne.

    Il est parfois total et pour les gens de la ville, il peut être oppressant parce que trop présent. Il raisonne en nous et on aimerait accrocher notre sommeil qui vient à un bruit, n’importe quel bruit, aussi ténu soit-il.

    Et puis il y a nos silences, le silence de celui qui écoute et contre lequel on blottit notre parole. C’est un silence précieux, amical et chaud. Il y a le silence de la chambre d’hôpital, on tient une main, on caresse un visage, on ne sait que dire mais on espère que ce silence est prière.

    Le silence entre ceux qui s’aiment, une bulle tendre et chaude, une couette légère et douce, un vrai dialogue parce qu’en silence on se comprend. Il y a le silence de l’indifférence, on n’a rien à se dire, mais quelle importance. C’est un silence inexistant.

    Il y a un silence gouffre, un silence fossé et si on le laisse s’installer, plus jamais on ne pourra le franchir. C’est celui de la rancœur, de la rancune, de l’absence de parole accumulée. Il s’est construit au fil du temps, il est comme un mur de béton et il faudrait une tronçonneuse pour en venir à bout.

    Si ma musique préférée est le silence, je sais aussi que sans la parole il est prison.

    Pasquine L’Islet

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