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Le groupe Safran fait face aux vents contraires

Le second équipementier aéronautique mondial a essuyé une forte baisse de chiffre d’affaires en avril et en mai. Malgré les mesures de l’État, l’avenir demeure incertain…
AERONAUTIQUE SAFRAN
Plus près de nous, c’est évidemment l’activité de Safran Helicopter Engines, à Bordes et Tarnos, ainsi que celle de Safran Landing Systems à Bidos qui sont scrutées de près.

Employeur-clé du bassin de l’Adour, le motoriste a salué les mesures du plan de soutien à la filière aéronautique. Il profitera notamment des commandes anticipées du ministère des Armées.

Philippe Petitcolin, directeur général de Safran, l’a confirmé à plusieurs reprises depuis le 9 juin dernier : le groupe a perdu 50% de son chiffre d’affaires en avril et en mai. Dans le même temps, il a réduit ses achats et ses investissements en R&D, respectivement de 50 et 30%. Il se serait déjà séparé de 10.000 salariés dans le monde.

On rappelle que Safran, second équipementier mondial de l’aéronautique, travaille d’un côté pour les avionneurs, Airbus et Boeing en tête, et de l’autre en direct avec des compagnies aériennes à l’arrêt. Et derrière les gros équipementiers comme lui, c’est toute une filière qui tourne au ralenti à cause du coup de frein sur les commandes dans l’aéronautique civile.

En France, pas de licenciement en vue chez Safran, a toutefois martelé Philippe Petitcolin ces derniers jours : les discussions se poursuivent avec les syndicats autour de mesures d’activité partielle de façon à garder tout le monde à bord sur le long terme.

Actuellement, 40% des 45.000 salariés de Safran dans l’Hexagone seraient toujours au chômage partiel. Le dispositif a clairement permis d’éviter la casse sociale, mais toute la difficulté va être de résister dans la durée, puisque le DG concède lui-même que l’activité ne retrouvera sans doute pas avant 2023 son niveau d’avant-crise. Il espère des mesures gouvernementales au niveau social pour le reste de l’année et pour 2021. On notera que 50% des effectifs de Safran sont toujours localisés en France, alors que le groupe génère 80% de son chiffre d’affaires à l’international.

Un plan de soutien bienvenu…

De même, Philippe Petitcolin a indiqué qu’il attendait qu’après l’État français, l’Europe prenne le relais et mette en place des mesures à l’échelle du continent, pour une lutte à armes égales avec des concurrents américains bénéficiant quant à eux d’aides massives.

Pour le reste, le directeur général s’est montré relativement rassurant malgré l’absence de visibilité. Il a ainsi précisé que Safran continuerait de recruter de jeunes diplômés, même si les embauches seront certainement freinées dans les temps à venir. Il a proposé l’annulation du versement du dividende 2019, mesure validée par le conseil d’administration du groupe et qui représenterait une économie d’un milliard d’euros.

Tous les sites du groupe en France continuent de tourner et d’être approvisionnés. On sait que Safran emploie 8.500 personnes dans le Grand Sud-Ouest. Sur le bassin de l’Adour, outre le site de la division Landing Systems (à Bidos), les sites Safran Helicopter Engines de Bordes et de Tarnos emploient à eux deux 4.000 salariés. Le siège de Bordes, avec ses 2.500 collaborateurs, est un employeur majeur en Béarn.

Safran Helicopter Engines, dans la lignée du groupe, a enregistré une forte baisse de l’activité, avec déjà 10% d’annulations de commandes sur 2020. Le 11 juin, dans la foulée de l’annonce du plan de soutien de l’État, la ministre des Armées Florence Parly s’est de nouveau rendue à Bordes, en particulier pour évoquer les 800 millions d’euros de commandes anticipées d’hélicoptères par l’État (600 millions de commandes militaires et 200 pour la gendarmerie et la sécurité civile).

Ces nouvelles commandes portent sur 20 hélicoptères intégrant des moteurs Safran, dont 8 Caracal pour l’Armée de l’air (moteur Makila), deux H145 pour la Sécurité civile (moteur Ariel) et 10 H160 pour la Gendarmerie (moteur Arrano). Safran Helicopter Engines produira donc un total de 40 moteurs dans les années à venir. Les livraisons commenceront en 2023, et c’est donc un millier d’emplois qui devrait être préservé d’ici là. Une « vraie bonne nouvelle », pour reprendre les termes du président Franck Saudo, et autant d’ailleurs pour le motoriste que pour ses fournisseurs.

Maintenir une dynamique de développement…

Outre ces commandes, la direction de Safran a aussi salué les mesures de soutien à la R&D à travers le Conseil pour la Recherche Aéronautique Civile (Corac). Au lieu des 600 millions d’investissements prévus cette année dans ce domaine, le groupe n’en dépensera que 400. L’aide de l’État sera donc plus que bienvenue pour continuer à évoluer vers les premiers appareils « zéro carbone » tant attendus.

Le gouvernement souhaite que des avions « décarbonés » voient le jour à l’horizon 2035, objectif qui ne pourra sans doute être atteint qu’au prix d’efforts financiers supplémentaires. Le groupe Safran est cependant déjà engagé dans une transition énergétique plus progressive. Il prépare des moteurs 20% moins gourmands. Du côté de Bordes, on a aussi lancé, juste avant le confinement, une démarche régionale autour des biocarburants.

On notera qu’avant la crise, Safran était aussi dans une forte dynamique d’investissement et de modernisation. Le campus industriel d’Helicopter Engines à Tarnos (50 millions d’euros d’investissement) a été présenté en février dernier.

L’année prochaine, un autre campus dédié à la fabrication additive sera livré au groupe du côté du Haillan (Gironde). D’ici 2023, il emploiera 75 personnes pour la recherche et 90 pour la production. Un projet qui aura coûté… 70 millions d’euros.

Pour l’instant, l’entreprise a évité le pire. On croise les doigts pour que ça dure et que cette belle dynamique se mue en atout dans les prochains mois.

  • Informations sur le site internet du Groupe Safran, cliquez ici
  • Informations sur le site de Safran Helicopter Engines, cliquez ici
  • Notre article sur le plan de sauvetage de l’État – cliquez ici
  • Notre article sur le projet régional de filière biocarburants – cliquez ici
  • Notre article sur le campus industriel de Tarnos – cliquez ici

 

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