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    Je dis ça je dis rien...

    La Marseillaise, revue et corrigée
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    Toc, toc... Oui bonjour patron, c'est encore la Toy... J'ai un petit problème, doux euphémisme pour vous annoncer que j'en ai un gros, un big, si vous préférez. Je sais bien qu'il ne faut pas toucher à certains sujets, tout ça, qu'on ne peut pas tout dire, surtout si c'est - comme dans mon cas - pour en extraire du nectar de haute bêtise, mais là vraiment, ça me titille le neurone cette affaire.

    C'est à propos de la Marseillaise, notre hymne national…

    Ne montez pas de suite sur vos grands chevaux, patron, moi aussi j'ai la fibre patriotique. Mais ce n'est tout de même pas ma faute si je l'ai littéraire avant de l'avoir bleu blanc rouge, là est le problème. Parce que le Rouget de l'Isle, me dites pas, ou il avait abusé de substances illicites, ou il s'en tenait une bonne, ou... Et pas la peine d'aller chercher dans les vers obscurs et nombreux, s'en tenir aux premiers suffit à se faire une idée.

    Bon, primo, choisir "La Marseillaise" comme titre unificateur de la Nation, vous me permettrez de tiquer, patron. M'étonne que les Basques, les Bretons, les Corses et j'en oublie des meilleurs (pas taper) aient jamais braillé sur le sujet. Certes, c'est un détail, car le plus épique (et pique et colégram, bourré bourré rame tam-tam) reste à venir.

    Dès le départ, ça coince : "Allons enfants de la patrie, le jour de gloire est arrivé, contre nous de la tyrannie, l'étendard sanglant est levé..." Ouais ben pas la peine d'engueuler copieusement les gosses qui s'essaient au verlan. Car Rouget de l'Isle voulait bien entendu dire "L'étendard sanglant de la tyrannie est levé contre nous" (enfin j'espère, parce que sinon ça veut plus dire grand chose, déjà que...), et voilà t'y pas qu'il nous la joue "Maître Yoda" avant l'heure.

    Le Claude Joseph de son petit nom, il y va fort avec l'approximation grammaticale tout de même. Ah bon, ça ne vous choque pas ? Très bien, continuons alors, car dans la Marseillaise, d'autres anomalies il y a, ne pas en croire vos yeux, vous allez... Pas du charabia, patron, mais comme vous avez l'air d'aimer le gloubi-goulba grammatical, je m'y colle, voudrais pas louper une augmentation pour une histoire bête d'ordonnancement de phrase, pensez...

    Non, c'est ensuite que ça déco... enfin que ça part en vrille (hey, j'ai dit en vrille !). C'est d'ailleurs le moment où je me dis que Claude Joseph, il en tenait une sacrée. "Entendez-vous dans les campagnes, mugir ces féroces soldats..." Mugir ? Vraiment ? Je veux bien que le terroir et la campagne bucolique soient à la mode, mais bon sang, dans un chant patriotique, voire guerrier, les soldats ils doivent rugir comme des lions, pas mugir comme de grosses vaches. Non ? NON ?

    Bon, c'est après que ça se complique, à cause d'un tout petit mot de rien, mais qui provoque la polémique depuis un sacré bout de temps, qui a même droit à son paragraphe perso dans Wikimachin (la consécration, en somme !), et qui suscite des demandes de changement d'hymne national à tout va.

    Ce hilh de pute de "sang impur" qui "abreuve nos sillons". Oh mon Dieu, quel scandale ! Voilà-t-y pas que notre hymne national franchouillard serait donc raciste. La France, terre d'accueil historique, serait donc ainsi le vivier d'une xénophobie écoeurante ? Oh punaise, Moumoune, prépare la valise, on part s'installer en Belgique.

    Ce à quoi moumoune, répond : "pas si vite, mon coco, ça c'est l'analyse simpliste des bas de plafond de ton genre, car en fait Rouget de l'Isle parlait du sang des paysans, impur en comparaison de celui des nobles au sang bleu, réputé comme pur, LUI !" (c'qu'elle est forte c'tte Moumoune quand elle s'y met).

    Hormis que Moumoune, pour le coup, elle a tout faux, patron. Because la Marseillaise était à l'origine "Le chant de guerre pour l'armée du Rhin", et s'adressait à ceux qui partaient combattre l'Autriche, donc c'est bien du sang impur de l'étranger que causait notre brave Claude Joseph, et puis voilà... Mais pas la peine de bourrer la valise pour la Belgique de suite, car à l'époque le sens du mot "race" n'était pas vraiment le même qu'aujourd'hui. Laisse tomber l'apéro, Gégé (Depardieu).

    Sinon, patron, je peux aussi vous raconter une anecdote savoureuse sur le sujet qui plaidera forcément en faveur d'une conséquente augmentation au lieu d'un copieux engueulo, car lors de la révolution de 1848, le peuple n'ayant pas une grande instruction, et retenant les paroles plus phonétiquement que pour leur sens véritable, chantait : "Qu'un sang impur, la veuve des six lions..." Quand je vous dis qu'elle veut rien dire cette chanson... Tu me diras, si on compare avec les tubes de Justin Bieber, côté paroles, c'est pas plus mieux que c'est moins pire...

    Et la dernière anecdote sur le sujet vient de Guy Breton, le journaliste. Dans une salle de classe, l'institutrice demandait qu'on lui cite des noms d'illustres héros (ne pas faire la liaison, sinon ça devient des zéros, et c'est pas bien vu par la direction). Les réponses fusaient de toute part : Jules César, Hannibal (pas Lecter, l'autre !), Napoléon, Jeanne d'Arc.

    Et soudain, un élève timide lève le doigt et dit : "Le soldat Séféro, monsieur". L'instituteur, interloqué, qui ne connaît pas le soldat en question, demande développement à l'élève. Celui-ci explique alors : "Ben oui, dans la Marseillaise : "Entendez-vous, dans nos campagnes, mugir Séféro, ce soldat...""

    Ah, je savais que vous apprécieriez, patron... Tant qu'à y être, on va causer de mon quinzième mois et de mes stock-options, alors...

    Mais bon, moi je dis ça, je dis rien...ô z'enfants de la patrie-eeeeeeuh...

    Gracianne Hastoy

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