Ces résultats confirment l’engouement des collectionneurs pour la peinture régionale et en particulier landaise, évidemment marquée par l’empreinte de Lizal. La « Plage de Capbreton » (ci-dessus) s’est notamment vendue au double de son estimation.
Une belle vente annuelle à Bordeaux, une charmante scène balnéaire, une estimation haute un peu basse et une pleine page dans « La Gazette Drouot » : toutes les conditions étaient réunies pour que la « Plage de Capbreton » du peintre Alex Lizal fasse un beau score sous le marteau du commissaire-priseur Antoine Briscadieu.
Estimée entre 2.500 et 3.000 € en amont de la vente de peintures bordelaises du 19 octobre dernier, elle aura finalement été acquise pour 7.749 € frais compris, c’est-à-dire pour plus du double. Ce n’est finalement que justice et l’on ne peut pas dire que l’acheteur ait fait une mauvaise affaire…
Fils de Roch « Lisal » et de Marthe Dupouy, respectivement journalier et « femme aubergiste », Alexis Lizal est né à Dax le 23 janvier 1878. Pionnier du paysage landais et peintre des grandes scènes de la vie locale, il a su s’exprimer d’une façon très personnelle dans de nombreux registres et laisse une œuvre variée, entre naturalisme et expressionnisme, avec des tentatives aux confins du symbolisme ou du japonisme.
On le connaît ainsi aussi bien pour son mystérieux « Étang blanc » ou son étrange « Portrait d’Amélie » que pour sa fameuse Assemblade, sa Mayade et ses scènes de course landaise. C’est à cette dernière catégorie des scènes typiquement locales qu’appartient la « Plage de Capbreton » qui vient de se vendre, tout à fait caractéristique du style du landais.
De la plage de Capbreton à Notre-Dame de Paris…
Paru en 2015, un ouvrage de Jean-Roger Soubiran avait proposé un point bienvenu sur l’œuvre de ce « peintre singulier du Pays landais » à la « vie en sursis, dévastée par la misère et l’alcool, ravagée par la tuberculose », une existence d’artiste maudit traité en marginal qui a finalement « fait de son œuvre un phénomène unique ». Le musée de Borda, à Dax, dispose dans ses collections d’un bon éventail d’œuvres de Lizal, qui ont été présentées avec d’autres en 2015 dans le cadre d’une exposition temporaire.
Tout n’avait pourtant pas si mal commencé pour le peintre, puisqu’au tournant du XXe siècle, le jeune Alexis travaillait encore dans l’atelier parisien du maître Jean-Léon Gérôme. Il demeurait alors dans le 6ème arrondissement de la Capitale, laquelle a inspiré les deux autres œuvres qui étaient mises aux enchères ce 19 octobre, à savoir un « Soir de fête » aux environs de Paris (1905) et une « Notre-Dame de Paris », huile sur panneau de plus modestes dimensions (16x24 cm, contre 27x41 pour les deux toiles).
La première s’est vendue 6.150 € et la seconde 2.952 € (frais compris), alors que toutes deux étaient estimées entre 1.500 et 2.000 €. Même quand il ne peint pas les Landes, Lizal fait donc recette. Mais s’il fut un temps parisien, c’est bien dans sa ville natale que s’éteignit l’artiste le 30 août 1915, deux années seulement après son père.
Bien entendu, les montants atteints par les 3 œuvres sont assez éloignés des « best sellers » des précédentes ventes annuelles de Briscadieu. On se souvient par exemple d’un « Veneur se remettant en selle » du peintre de la chasse René Princeteau, d’une « Seine vue de la Frette » d’Albert Marquet et surtout d’une « Arrivée du comte d'Estaing » de Pierre Lacour, toutes adjugées plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Mais on sent un réel frémissement autour d’Alexis Lizal, grand inspirateur d’un Sourgen qui était aussi représenté lors de cette vente chez Briscadieu, avec une douzaine de bols en faïence de la Manufacture Henriot de Quimper. Le peintre d’Hossegor avait en effet collaboré avec cette maison, pour laquelle il imagina les modèles basque et landais d’une collection « Provinces de France ». Ce rare service complet s’est vendu à 1.845 €, dans la fourchette de l’estimation.
Pour résumer, les Landes sont très belles en vrai, mais on peut décidément aussi les encadrer et les voir en peinture…
Ouvrage de Jean-Roger Soubiran sur Alex Lizal – c’est ici
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