Tout commence dans un garage d’Urrugne, au Pays basque. Nelly Fontaine, designer textile aguerrie, regarde les montagnes de vêtements usés s’accumuler et se demande comment leur offrir une seconde vie. Lassée d’une industrie où la surproduction prime, elle imagine une solution simple et locale : transformer de vieux jeans en espadrilles.
L’idée germe en 2019 et se concrétise en 2020 avec la naissance d’Otxangoa, qui signifie « excursion » en basque. Fidèle à ses racines, la créatrice s’appuie sur un savoir-faire ancestral – celui de la fabrication d’espadrilles – tout en intégrant des pratiques écoresponsables. Le denim récupéré auprès d’associations locales est ainsi métamorphosé dans un atelier de Mauléon, bastion de l’espadrille artisanale.
Quand le jean trouve chaussure à son pied
En donnant une seconde vie aux tissus usés, Nelly Fontaine casse les codes d’une mode souvent jetable. Son objectif est clair : réduire l’impact environnemental en proposant une alternative durable et élégante.
Chaque paire d’espadrilles est fabriquée à la demande pour éviter les stocks inutiles. Les morceaux de jeans sont découpés avec précision, limitant les chutes et valorisant chaque fibre. Même les étiquettes, issues de chutes de cuir fournies par la marque de selles Voltaire Design, témoignent d’une volonté d’exploiter les ressources existantes.
Si les particuliers adoptent rapidement la marque, Nelly Fontaine voit plus loin. Elle propose aux entreprises de recycler leurs tenues de travail – souvent vouées à la décharge – en espadrilles personnalisées.
Cette initiative séduit particulièrement les sociétés du BTP, qui offrent ces chaussures écologiques à leurs employés. Au-delà d’un cadeau, c’est un symbole : celui d’une prise de conscience sur l’économie circulaire et la nécessité de repenser notre manière de consommer.
Une production locale et artisanale
Originaire de Lyon, Nelly Fontaine trouve dans le Pays basque un équilibre parfait entre nature et tradition artisanale. Installée dans la région depuis 2012, elle puise son inspiration dans les paysages maritimes et montagneux.
Le nom Otxangoa, clin d’œil aux excursions sur les sentiers côtiers, reflète cet ancrage territorial. L’entreprise s’inscrit dans un mode de vie basque où l’océan et la terre s’entrelacent, offrant un cadre idéal pour développer une marque de slow fashion.
Otxangoa fait le choix du circuit court. Les espadrilles sont fabriquées dans un atelier de Mauléon, perpétuant ainsi un savoir-faire régional. La confection se fait à la main, avec des matériaux robustes et durables.
Cette démarche artisanale permet de garantir la qualité des produits tout en soutenant l’économie locale. Pour Nelly Fontaine, il s’agit aussi de préserver une tradition menacée par la délocalisation.
Des collaborations haut de gamme
Loin de se limiter à la récupération textile, Otxangoa explore des collaborations artistiques et haut de gamme. Les modèles personnalisés réalisés avec Voltaire Design, Alaiart ou Modjo repoussent les frontières de l’espadrille classique. Ces créations uniques, parfois décorées à la main ou gravées au laser, s’adressent à une clientèle exigeante en quête d’authenticité et d’exclusivité. Une manière pour la marque de conjuguer artisanat et innovation.
En transformant des jeans usés en chaussures stylées, Otxangoa prouve que mode et écologie peuvent faire bon ménage. Chaque paire d’espadrilles raconte une histoire, celle d’un vêtement qui renaît sous une autre forme.
Pour Nelly Fontaine, cette démarche va bien au-delà de la mode. Il s’agit d’un engagement envers la planète et les générations futures. Grâce à Otxangoa, elle espère inspirer d’autres initiatives et encourager une consommation plus responsable.
En s’appuyant sur un savoir-faire local et un modèle circulaire, Otxangoa offre une alternative durable et esthétique dans un monde où la fast fashion règne encore. De la déchirure au chaussant, les espadrilles cousues dans l’atelier de Mauléon prouvent qu’un bon vieux jean peut encore faire du chemin. Avec cette marque, marcher devient un acte engagé, et chaque pas porte l’empreinte d’un avenir plus vert.
Sébastien Soumagnas
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