Comptable du côté de Pau, peu avant ses 40 ans, Stéphanie Ré se voit offrir un stage à l'École Lesage, un établissement parisien très réputé pour la qualité de sa formation en broderie d'art. « Je n'arrive pas à me souvenir de pourquoi mes amis m'ont offert ce stage précisément... Mais j'ai toujours été attirée par la création, il y avait forcément une raison ! ». Là-bas, elle y découvre ainsi la broderie à l'aiguille, qu'elle aime, mais elle y découvre aussi la broderie au crochet de Lunéville, qu'elle adore. « On nous en parlait, en nous expliquant à quel point c'était minutieux. On nous disait que c'était cette technique qui était utilisée en haute couture par exemple. J'ai été très intriguée, j'ai voulu me renseigner ! », continue-t-elle.
Elle retourne donc plusieurs fois à l'École Lesage, pour rencontrer des professionnels déjà aguerris dans la maîtrise de cette technique. « C'était nécessaire, car c'est une technique très orale. Il n'y a pas d'ouvrage qui regroupe l'ensemble des techniques utilisées. Je suis allé à Lunéville, à Paris, j'ai rencontré pas mal de monde, tous pouvaient me montrer les techniques, mais aucun n'avait de la documentation théorique ». Elle passe ensuite un CAP Broderie, qu'elle obtient, et se lance donc, en 2017, dans ses premières créations. « Au départ, ce n'était que pour moi et mes amis ! ».
C'est en 2019, lorsqu'elle s'installe dans les Landes pour suivre son mari, qu'elle décide de quitter la comptabilité et de se lancer à 100 % dans la broderie. « Je faisais beaucoup de salons, de marchés, mais c'était difficile. J'ai eu beaucoup de travail de pédagogie à faire, pour expliquer la différence de prix entre mes productions et d'autres bijoux ou d'autres broderies que les gens pouvaient trouver. Puis en 2020 il y a eu la crise sanitaire, et l'année suivante n'était pas beaucoup plus facile ». Ainsi, l'année passée, Stéphanie Ré s'est concentrée sur des salons dédiés aux métiers d'art, et s'est également trouvé un emploi complémentaire pour arrondir ses revenus.
Car la broderie au crochet de Lunéville, bien qu'elle ait été pensée pour être rapide et efficace, n'en reste pas moins chronophage. « Il faut savoir que je pars de rien. J'ai un tissu, mon crochet, du fil, et je crée tout ! ». À titre d'exemple, une simple boucle d'oreille réalisée par Stéphanie Ré, c'est plusieurs heures de travail. Et bien évidemment, plus la pièce est importante, plus elle demande de temps. « C'est parce que c'est une technique très précise. Il faut que mon tissu soit parfaitement tendu, et que j'ai les deux mains de libres. Sur certaines matières, je travaille à l'envers, donc il faut réfléchir à l'envers. C'est très prenant ! ».
Mais à l'arrivée, le résultat est là. Un travail unique, puisque chaque pièce est réalisée à la main. « Même si je travaille en microsérie par moments, deux pièces ne peuvent être 100 % identiques. D'autant plus que souvent, je travaille à la commande, mes clients souhaitant changer une couleur par exemple ». Des produits que l'on peut ensuite retrouver sur son site internet, majoritairement, et bientôt dans des boutiques. « J'essaie de trouver de plus en plus de boutiques. J'aimerais m'orienter vers des établissements de luxe ou de mariage par exemple. Cela collerait bien avec l'esprit de mon métier ».
Au travers de Lunedolia, Stéphanie Ré espère également pouvoir travailler avec de plus en plus de créateurs locaux. « J'adorerai ! Mais c'est assez compliqué, car peu de gens connaissent le crochet de Lunéville et certains sont même un peu effrayés par mes explications ! », plaisante celle qui continue son travail pédagogique pour démocratiser cette technique très connue dans les ateliers des maisons parisiennes, mais peu dans les Landes. « Pour l'année prochaine, je devrais agrandir mon domicile pour y avoir un véritable atelier. J'en profiterai pour donner des cours, sensibiliser au crochet de Lunéville », conclut-elle. Un devoir de transmission dont se charge Stéphanie Ré, qui va ainsi faire perdurer une technique et un savoir-faire d’excellence, comme d'autres l'ont fait perdurer avant elle...
Timothé Linard
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