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    CatalogneLe décryptage de PresseLib’

    Référendum tronqué. Et maintenant ?
    Le référendum en Catalogne a finalement eu lieu. Enfin, par référendum, il faut s’entendre. Plutôt une consultation sans valeur juridique des seuls partisans de l’indépendance, ses opposants se refusant à y participer, afin de ne pas lui accorder le moindre crédit et la moindre valeur.

    Au total, et selon la Generalitat, cela nous donne 2.020.144 oui contre 176.565 non (25.129 nuls, 45.566 blancs). Soit en pourcentage 90,09 % de oui, 7,87 % de non, 0,89 de nuls, 2,03 de blancs. Donc, si l’on sait compter, 100,88 %. Cela en dit long sur le sérieux de l’affaire.

    Les anomales sont multiples, confirmant les fraudes et le bourrage d’urnes, comme à Pavols de Revardit, 470 habitants, qui a enregistré… 1.002 votes, soit plus du double, dont 98 % de oui.

    Question 1 : Madrid aurait-elle dû autoriser le « référendum » ?

    Cela aurait coupé l’herbe sous les pieds des indépendantistes, car les partisans du « non », on le sait grâce aux élections précédentes, sont – de peu – majoritaires (scrutin de septembre 2015 : 47,74 % pour les indépendantistes, 50,62 pour les opposants). Elle aurait donc pu jouer sur du velours, quoique l’opération était risquée, ainsi que l’ont démontré les exemples québécois et écossais, et aurait pu créer un précédent.

    Un impératif a prévalu : l’unité de la nation. L’Espagne est une et indivisible, selon l’Histoire et la Constitution de 1978, la dépecer serait la ravaler à la hauteur d’une nation du Tiers-Monde, car d’autres régions (le Pays basque, la Galice, les Baléares) pourraient vouloir aussi se détacher d’elle.

    Pour l’Espagne, c’est une question de survie, autant que de principe. D’où l’interdiction.

    Question 2 : quel crédit apporter à la consultation de dimanche ?

    Légalement, aucun. Moralement, il en va autrement : existe, qu’on le veuille ou pas, dans une vaste couche de la population catalane, un très fort sentiment identitaire et rétif à ce qui n’est pas catalan, avec un rejet excessif de tout ce qui est espagnol, à commencer par la langue et l’éducation. C’est un fait incontournable.

    La consultation de dimanche est à prendre comme une provocation, en même temps qu’un défi. Puigdemont, le président de la Generalitat, va dorénavant affirmer que 9 Catalans sur 10 sont partisans de l’indépendance, ce qui est faux, mais qui va s’en souvenir dans quelques mois ?

    Question 3 : que faire ?

    Si l’on en croit ses déclarations d’intention, la Generalitat, qui s’estime légitimée à le faire, devrait sous peu déclarer l’indépendance de la Catalogne et l’instauration d’une République catalane. Et Madrid, dans la foulée, mettre en route l’article 155 de la Constitution, suspendant totalement ou partiellement l’autonomie de la région et frappant d’inhabilitation les élus sécessionnistes, qui risquent six ans de détention.

    Une répétition des événements de 1934, quand Lluis Companys avait - déjà – proclamé l’Etat catalan ainsi que sa République. Ce qui lui avait valu d’être condamné à trente ans de prison.

    Les temps qui viennent seront donc cruciaux pour le dénouement de l’affaire, chaque camp étant allé trop loin dans l’intolérance. Jusqu’à présent, la violence a été relativement contenue et aucun mort – donc de martyr - n’est à déplorer.

    Quoique la bataille des images a été remportée par les indépendantistes, avec une exploitation considérable de la moindre goutte de sang sur les réseaux sociaux. 465 personnes ont été blessées, dont 12 policiers et gardes civils. L’image d’un flic casqué bastonnant une petite vieille vaut mille discours.

    Madrid parle d’une farce, arc-boutée sur l’Etat de droit et la légalité et taxe les dirigeants catalans d’irresponsables. C’est pour elle, depuis la fin du franquisme, l’épreuve la plus dure qu’elle ait subie, bien plus dangereuse que le puputsch de Tejero en 1982, qui avait pris d’assaut le Parlement.

    Barcelone poursuit son rêve d’indépendance, qui pourrait s’achever en cauchemar, dans le sang, la haine et la mort. Encore que la haine soit déjà là. Bien sûr, Rajoy va jouer la montre, laissera pourrir la situation, puis viendra immanquablement le moment du dialogue, mais il n’est certainement pas pour demain.

    Entretemps, une guerre civile est-elle possible ? Sans doute pas, quoique face à un tel blocage et autant de déterminations bornées, tout soit possible.

    Jean Chalvidant

     

     

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