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Bernard Magrez veut se mettre à la mousse. En Adour ?

L’homme d’affaires et milliardaire bordelais, un des champions français du vin, vient de révéler dans la presse locale qu’il nourrissait des ambitions dans le secteur des bières artisanales...
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Bernard Magrez chercherait à s’associer avec des brasseries artisanales de la région pour commercialiser sous son nom des bières locales de qualité, en grande distribution ou à l’export. Un moyen de surfer à son tour sur la vague d’un « craft brewing » en plein essor.

Né en 1936 à Bordeaux et lancé dès l’âge de 16 ans dans le grand bain du négoce et du vin, Bernard Magrez est souvent présenté comme un autodidacte. Après avoir travaillé pour la maison Cordier, il s’est lancé à 23 ans dans les spiritueux en créant sa propre entreprise (William Pitters) et en commençant à placer son whisky et son porto dans les premiers supermarchés de l’Hexagone, où ses marques s’imposeront petit à petit.

Il a posé la première pierre de son édifice vinicole à la fin des années 70, en faisant de son Malesan un vin leader en France (propriété du Groupe Castel depuis 2003). C’est en 1983 qu’il achète le premier de ses 4 grands crus classés, l’illustre Château Pape Clément (Pessac). Suivront les châteaux Fombrauge (Saint-Émilion) et La Tour Carnet (Haut-Médoc), puis le Clos Haut-Peyraguey, premier grand cru classé de Sauternes.

Fort de cette assise dans le secteur viticole, il étend depuis de nombreuses années ses gammes et domaines, non seulement dans la moitié sud de la France (où Bernard Magrez propose des vins d’une vingtaine de régions naturelles, dont les Côtes-de-Gascogne et le Madiran), mais aussi à l’étranger, où il avait commencé par tirer profit d’un vin algérien (Sidi Brahim, aussi passé chez Castel) et où il détiendrait aujourd’hui 43 propriétés dans 9 pays (Argentine, Brésil, Chili, États-Unis, Espagne, Japon, Maroc, Portugal, Uruguay), pour un total… de plus d’un millier d’hectares de vignoble.

Champion du vin cherche partenaires…

À la tête d’un petit empire de plus d’un milliard d’euros, Bernard Magrez n’a cependant pas franchement goûté la crise du covid. Dans les colonnes du Figaro, il évoquait dès mars dernier un climat « très tendu » dans le milieu, parmi les négociants. Mi-août, sa « Grande Maison », restaurant doublement étoilé où officiait Pierre Gagnaire, a été fermée pour une durée indéterminée. Bref, ces derniers temps, l’humeur semblait (de loin) un brin morose.

Dans l’esprit du décideur, il était peut-être temps de prendre en marche le train de la brasserie, un peu à l’image du « baron des vins » Pierre Castel et de son groupe, devenus les n°2 de la bière en Afrique. Mais la « stratégie Magrez » s’annonce tout de même différente : il va certainement s’agir de rester sur un positionnement haut de gamme, en se faisant le partenaire de brasseries artisanales locales choisies, dans le but d’amener des bières qualitatives et estampillées Magrez en supermarché ou à l’export. Car l’analyse du marché est vite faite : alors que la situation est ce qu’elle est dans le secteur du vin, la bière est de plus en plus plébiscitée par les consommateurs.

Mais le marché et les consommateurs de bière, eux aussi, ont beaucoup changé en peu de temps. Une petite révolution a cours dans le monde de la brasserie avec l’essor du « craft brewing », c’est-à-dire des microbrasseries artisanales, qui représenteraient désormais deux tiers des ventes en volume. En Europe, c’est en France qu’elles seraient les plus nombreuses : il y en aurait 2.000, pour un total de 10.000 références. Cette activité brassicole occuperait dans le pays plus de 7.500 personnes, pour plus de 4 milliards d’euros de recette. En résumé, le marché est attractif, mais on ne peut plus aussi facilement l’investir en sortant les gros sabots. Le consommateur veut de la qualité, et du local.

Ces associations à venir de Bernard Magrez avec des brasseurs locaux pourraient se traduire par des rachats ou des prises de participation, pouvait-on ainsi lire récemment dans Sud-Ouest. Seraient plus particulièrement ciblés des partenaires produisant des bières locales de qualité, capables d’innover et prêts à développer leur activité en France et à l’international. La Nouvelle Aquitaine, qui abriterait 240 brasseries indépendantes et se classerait au second rang des régions productrices de France, serait en particulier scrutée de près.

Vins du Sud… et bières d’ici ?

Outre la Gironde et ses nombreux « brewers », les pays de l’Adour fourmillent de marques et d’établissements. Dans les Landes, on vous parlait il y a quelques mois de la Sherlock élaborée à Lit-et-Mixe, mais on connaît aussi des bières et brasseries à Hossegor (Hapchot), Seignosse (Rosny Beer, La Séquère), Capbreton (Cath’), et puis aussi dans les terres, avec par exemple les brasseries de Lugazaut (Vielle-Soubiran) et de l’Armagnac (Villeneuve-de-Marsan).

On n’insiste pas non plus sur les nombreuses références basques (Arrobio, Eguzki, Belharra, Akerbeltz, Etxeko Bob's Beer, Hizketa, etc.). En Béarn, on peut citer la Brasserie béarnaise et sa Shuc, la bière Hylalegans (Biron), Naba (Oloron) ou encore Shakespeare (Navarrenx). Côté occitan, il y a également du monde dans le Gers (Moussequetaire à Montaut, Jean Brasse à Gimont, La Roque à Ordan-Larroque) et dans les Hautes-Pyrénées (Brasseurs de l’Adour à Bagnères, brasserie du Pays Toy à Sassis, Brasserie des Gaves et sa Bigourd’Ale à Esquièze-Sère). Et ce n’est qu’un petit tour d’horizon… On a fait ce qu’on a pu et on s’excuse par avance auprès de ceux qu’on oublie (signalez-vous !). Mais cela montrera au moins que le secteur de la brasserie est localement en pleine ébullition depuis quelques années…

Bref, il y aura pour Bernard Magrez de quoi méditer et déguster… Mais avec modération, donc, même si l’homme semble vouloir aller vite. En attendant, il paraît que la maison compte lancer prochainement un prosecco et rachète deux domaines en Sicile et en Toscane. On l’aura compris, chez Bernard Magrez, il y a comme un parfum de grandes manœuvres. Alors, à quand une petite Magrez de l’Adour ?

Plus d’informations sur bernard-magrez.com

Notre article sur la Sherlock, bière imaginée à Lit-et-Mixe dans les Landes – cliquez ici

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