Originaire de Peyrehorade, François Lafitte est le fondateur de la Scaap Kiwifruits de France, et de sa société de commercialisation Primland. Il assure aussi d’autres mandats, comme celui de président de la Chambre de commerce et d’industrie des Landes.
Dès 1979, François Lafitte a fait germer les premières graines d’une filière autour de ce fruit aux saveurs aussi fines que variées, et particulièrement riche en vitamines C. Étudiant à l’École supérieure d’agriculture de Purpan à Toulouse, il a été amené à travailler en Californie, puis en Nouvelle-Zélande. « C’est là que m’est venue l’idée de m’impliquer dans la création d’une filière kiwi » sourit-il.
Le jeune landais s’est lancé dans le grand bain en 1982, alors qu’il était toujours étudiant. Tout en préparant son diplôme d’ingénieur, il a entamé un « retour aux sources » dans sa commune natale pour y installer des vergers de kiwi. « Dès le départ, j’avais deux objectifs : assurer une production de qualité et se doter d’une bonne capacité de commercialisation ». C’est ainsi qu’est née il y a 41 ans, l’entité Scaap, une coopérative agricole regroupant une vingtaine de producteurs. Complétée ensuite par la société Primland qui commercialise toute la gamme, dont la célèbre marque Oscar.
Le groupe de Labatut a grandi rapidement, jusqu’à s’imposer comme le leader national de la production de kiwis en France. « Nous restons des producteurs, avant tout, qui avons investi dans le commerce par nécessité pour défendre nos produits et les valoriser. Les vergers ont été développés dans différentes régions françaises, même s’ils sont principalement situés sur le bassin de l’Adour, y compris en Bigorre et dans le Gers, du côté de Viella ou de Barcelonne-du-Gers… ». La coopérative s’est ensuite élargie vers le Grand Sud-Ouest : dans le Lot-et-Garonne, dans le Tarn-et-Garonne, en Dordogne, en Charente, en Gironde…
« Nous avons été très incisifs au niveau de la qualité. C’est nous qui avons porté le projet de création du Label Rouge Kiwi de l’Adour, dans les années 1990. Une étape essentielle pour amplifier la notoriété. Par la suite, nous avons obtenu une Indication géographique protégée (IGP), permettant de sécuriser notre appellation sur le plan européen. Ces démarches ont représenté un gros investissement pour nous » souligne François Lafitte.
Le kiwi boosté par les Dragons…
« Parallèlement à ce travail sur la notoriété, nous avons attaqué les marchés à l’international, au début des années 1990. Je me suis investi fortement dans cette ouverture. D’abord vers l’Asie, en étant les premiers européens sur ces marchés, en 1992-93. C’était risqué avec des produits périssables qui devait arriver jusqu’au client dans de bonnes conditions qualitatives. Mais, ça nous a bien réussi », se souvient le président de la Scaap.
« Ces marchés étaient très réceptifs, parce qu’à cette époque ils bénéficiaient d’une dynamique économique avec la diaspora chinoise qui avait fui le régime communiste. On les appelait les Dragons et ils étaient très ouverts à nos produits qu’ils connaissaient parfaitement, puisque le kiwi est originaire de Chine ».
Les seuls approvisionneurs du marché étaient les Américains, avec une petite production en Californie. « On est ainsi arrivé sur un marché neuf, en profitant de la qualité et de la grande fiabilité des relations avec ces commerçants. Ça nous a boosté énormément » se réjouit François Lafitte. « Un énorme coup de fouet qui a permis de tirer le marché vers le haut, de créer une dynamique de plantation, de proposer un bon prix sur les produits ». C’est ainsi que la saga landaise a pris position à Honk-Kong, Taïwan, Singapour, en Indonésie… puis, en Malaisie et en Thaïlande.
20.000 tonnes sur plusieurs continents…
Grâce notamment à cet appel d’air asiatique, la Scaap et Primland ont pu renforcer la notoriété de leurs produits et favoriser la création de nombreux vergers dans les années 2000. Le groupe a également investi fortement dans l’innovation avec de nouvelles variétés, à commencer par le kiwi jaune.
Parallèlement, la production a été étendue dans d’autres pays, comme l’Espagne, le Portugal, ou encore la Chili, en contre-saison. De quoi permettre au groupe de fonctionner toute l’année, mais aussi de mieux gérer les risques. « C’est un arbitrage fort du début des années 2010 qui a permis de consolider notre activité. Aujourd’hui, le groupe fait 46 millions d’euros de chiffre d’affaires pour environ 20.000 tonnes de production. Il assure la collecte, le stockage, le conditionnement et le transport. Au total, nous employons 240 personnes (équivalent temps plein), dont 50% en France » précise le président.
« Au fil des ans, avec ces implantations à l’étranger, nous avons à la fois mieux sécurisé l’approvisionnement et complété le calendrier de notre activité. Nous avons également une gamme élargie pour nos clients » ajoute Pantxika Etcheverry, qui a la responsabilité de l’ensemble du commerce.
« La commercialisation du kiwi a ses spécificités, notamment avec la grande distribution qui est incontournable dans le domaine des fruits et légumes. La priorité est, bien entendu, le référencement pour être fournisseur des principales enseignes françaises. Puis, les acheteurs nous demandent des offres, avec des prix qui sont fixés à la semaine. C’est une grosse pression ».
Primland a aussi un fort positionnement sur l’export maritime, en direction de deux continents : l’Asie et l’Amérique (Nord et Sud). « On ne propose pas toujours les mêmes produits, les marchés ne sont pas homogènes. Certains préfèrent des fruits plus gros, d’autres sollicitent des plus petits. Certains veulent le kiwi jaune, d’autres privilégient le vert. Les goûts sont évidemment différents d’un pays à l’autre » insiste Pantxika Etcheverry.
Il faut savoir que le kiwi nécessite un apprentissage pour le consommateur qui doit savoir comment le choisir et comment le conserver pour le déguster au mieux. C’est un produit qui mérite un accompagnement, y compris au niveau des chefs de rayons qui doivent connaître l’évolution du fruit.
« Nous avons un pôle marketing très efficace, que ce soit pour réaliser des promotions lors des lancements, pour soutenir nos produits, pour informer les acheteurs sur la bonne pratique du kiwi, ou encore pour conseiller les consommateurs ». Le groupe landais propose aussi des recettes de cuisine via les réseaux sociaux et participe à des émissions TV comme Les Petits plats en équilibre. Des dégustations sont également organisées régulièrement.
Le jaune prend son envol, le rouge et le Nergi sont prometteurs…
Dans les années 2010, la Scaap a accéléré la production de kiwi jaune. « Aujourd’hui, on a une forte demande dans différents pays, notamment en Amérique latine. Le groupe a pris en compte les attentes des consommateurs et a investi fortement pour trouver les bons produits, à partir de la sélection de différentes variétés. Il doit être bien jaune et doux » précise Pantxika Etcheverry.
Le kiwi jaune a passé la barre des 500 tonnes et monte clairement en puissance. Il est produit en Espagne, au Portugal, en France et en Afrique du Sud pour l’hémisphère sud
Quant au petit dernier, le kiwi rouge, il fait des débuts intéressants avec une production limitée pour le moment à 10 tonnes. « On est dans l’innovation, la surprise. Il a un goût très différent, de grenadine, de fruit rouge. Sa commercialisation est d’abord locale, via des enseignes ciblées. Les prix sont élevés, car sa production nécessite une grande technicité sous des serres photovoltaïques » souligne Pantxika Etcheverry.
« Il s’agit d’un projet pilote partagé avec Euralis. C’est une chance de travailler ce concept avec eux : ils sont en pointe sur le solaire, le photovoltaïque, et nous avons des compétences sur de nouvelles variétés comme le kiwi rouge » se félicite François Lafitte. « Ensemble, nous avons trouvé une combinaison intéressante, en faisant évoluer les systèmes photovoltaïques. Le résultat est là. C’est un bon produit ».
Il faut savoir que ces innovations prennent beaucoup de temps : 10 ans pour sélectionner une variété, 10 ans pour mettre en place la méthode de culture et 5 ans pour produire. La longueur de ce cycle est particulièrement frustrante.
De son côté, le mini-kiwi Nergi trace sa route pour le moment en Allemagne et sur le Nord de l’Europe. « C’est un kiwi d’été, petit comme une tomate-cerise. Il se mange comme une baie, entre août et octobre. Il est produit localement, mais aussi beaucoup au Portugal. Nous sommes leader européen, même mondial, avec plus de 7 millions de barquettes cette année, avec nos partenaires italiens. Mais, c’est stressant parce que le produit est fragile, il nécessite de la technicité tout au long de la chaîne » commente Pantxika Etcheverry.
Pourquoi ne le trouve-t-on pas en France ? « C’est très simple. Nous avons réalisé, il y a 15 ans, une évaluation des marchés avec des études auprès des consommateurs, en France, en Allemagne et en Angleterre. Les meilleurs résultats ont été obtenus avec les Allemands qui ont réagi positivement à 80% contre seulement 30% pour les Français. C’est la raison de cet arbitrage. On a investi 2 millions d’euros en communication pour ce premier lancement, ce qui est déjà énorme pour un groupe de notre taille. Après les pays scandinaves, nous prévoyons un lancement en France à partir de l’année prochaine. Les résultats en Allemagne sont excellents, c’est un produit unique au monde promis à un bel avenir » s’enthousiasme François Lafitte. « C’est génial, on arrive à faire des choses extraordinaires. C’est la réussite de toute une équipe ».
Derrière, dans l’ombre, la Scaap Kiwifruits de France et Primland ont développé de solides compétences sur ce qui constitue un métier majeur pour le groupe et qui nécessitent de gros investissements : la logistique. « Nous avons des entrepôts, des machines pour le conditionnement, et nous commandons des camions pour le transport. Nous devons être dans l’optimisation quotidienne, parce que l’impact sur la chaîne des coûts peut être très lourd. Encore plus dans cette période d’inflation » conclut François Lafitte.
Informations sur la Scaap Kiwifruits de France, rendez-vous sur le site internet
Pour la marque Oscar, c’est ici
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