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Publié le Mis à jour le

CÔTÉ FEMMESFatima Rhioui, une artiste libre

À 54 ans, cette peintre-mosaïste- tapissière-décoratrice de Billère s’inspire de la nature, des religions et de la société pour réaliser ses œuvres.
La peintre franco-marocaine Fatima Rhioui, entourée de ses tableaux dans son atelier de Billère.
Souriante, lumineuse et libre sont les adjectifs qui qualifient sans doute le mieux Fatima Rhioui. Représentant cette soif de liberté, l’hirondelle est devenue son animal totem. On la retrouve ainsi très souvent dans ses tableaux, aux côtés de colombes, mais aussi autour de son cou, en pendentif.

Originaire du Maroc, Fatima Rhioui arrive en France à huit ans avec sa famille. Ce n’est qu’à 27 ans qu’elle découvre la peinture, en s’amusant à reproduire des mangas à l’aide de feutres avec son ami. Entre 1996 et 2000 (alors employée de maison), la jeune passionnée prend des cours du soir à l’école paloise Henri IV avec Roger Faget, pour apprendre les bases du dessin et de la peinture. En 1998, par intérêt pour l’histoire de l’art, elle passe un Cap en tapissier-décorateur à Coarraze-Nay. Avec couleur et humour, Fatima Rhioui défend des causes qui lui sont chères.

Que représente la peinture pour vous ?

Fatima Rhioui (F.R) : J’ai découvert que j’avais des facilités à dessiner. J’ai commencé par peindre des portraits à l’huile, mais je n’arrivais pas à m’épanouir dans mon travail. J’ai mis du temps à m’en apercevoir. Vers 40 ans, j’ai réussi à faire passer mes envies artistiques avant celles des autres et j’ai changé de style.

Je travaille toujours sur des toiles noires, puis je comble tous les vides. Je lance mes idées et elles se couchent sur la toile. Le tableau devient lumineux par la suite. Quand je peins, je m’évade. Qu’on aille bien ou non, on le retranscrit dans une toile. C’est une sorte de thérapie pour moi, car ça me permet d’évacuer les mauvaises énergies. Je peins de façon très instinctive. C’est très paradoxal, mais je suis très attachée à mes tableaux, donc j’ai du mal à les vendre.

J’ai été élevée dans une famille très pudique au niveau des sentiments, mais aussi très ouverte d’esprit. Aujourd’hui, j’ai 54 ans et je me lâche, c’est maintenant ou jamais.

Dans vos tableaux, on retrouve beaucoup de références religieuses et de femmes. Ce sont vos principales inspirations ?

F.R : J’ai toujours été très curieuse de nature, j’ai une soif d’apprendre infinie. Je suis très sensible à la nature. Quand un sujet me touche, je prends un pinceau et mes mains font le reste. La peinture permet de s’exprimer différemment, cet art parle de lui-même et à tout le monde.

Ce qui se passe autour de moi m’inspire beaucoup : les gilets jaunes, la pandémie, les violences policières, les débats sociétaux autour du vivre ensemble. J’utilise la peinture pour donner mon point de vue et dénoncer. C’est le cas pour mon tableau Chaos arbitraire, qui raconte une arrestation qui avait viré à l’émeute dans le quartier, en 2010.

Les religions m’inspirent également beaucoup. Quand j’étais petite, mes parents nous amenaient tous les week-ends à Lourdes. Ils sont musulmans et je pense qu’ils ne connaissaient pas la signification chrétienne qu’il y avait dans cette ville. Nous nous baladions, allions à la grotte… L’image de la Vierge Marie m’a profondément marqué. Il y a toujours des symboles religieux dans mes tableaux.

La femme est aussi très présente dans ma peinture, car elle est pour moi la base de tout. J’admire la force des femmes, qui sont les piliers de la famille. Je trouve qu’elle n’est pas assez représentée dans la société, comme dans le monde de l’art. C’est ma manière de leur rendre hommage. Je me nourris aussi de mes deux cultures : Marocaine et Française, avec des clins d’œil à la pop culture, à la religion, à la politique ou aux trois en même temps. 

Vous vous investissez beaucoup dans le quartier de l’Ousse-des-Bois. Vous avez d’ailleurs un projet qui vous tient particulièrement à cœur…

F.R : J’ai vécu vingt ans dans ce quartier, je l’ai vu décliner. Les habitants se sentent isolés, laissés pour compte. De 2009 à 2020, j’animais des ateliers au centre social du Hameau puis au centre Jacques-Prévert. Il faut y avoir vécu pour voir l’évolution. J’ai vu la manière dont ce quartier a été délaissé et ça m’indigne. Les habitants de l’Ousse-des-Bois n’ont pas un accès suffisant à l’art et il y a de moins en moins d’activités culturelles ou de loisirs. J’ai créé l’association Paus’Activité avec cinq autres femmes pour faire entrer la culture dans le quartier en collaboration avec les habitants. Il nous manque un local, mais notre but est de le dynamiser grâce à de nombreux cours (danse, peinture, cuisine, peinture, mosaïques, jeux de plateaux…). Le tout en favorisant la convivialité, la mixité culturelle et la joie de vivre. C’est mon rêve depuis toujours.

Où peut-on vous retrouver à la rentrée ?

 F.R : J’aurai un stand lors du concours « Pau d’Peinture & Patrimoine », organisé le 25 septembre sur la place royale à Pau par l’association Pau d’Peinture & Cie. Je vais y exposer mes toiles et participer au vide-atelier des artistes.

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