« J’ai toujours été passionné par les animaux, la nature et la mer. Déjà, dans les années 70, Haroun Tazieff et Cousteau alertaient l’opinion publique sur les problématiques planétaires. J’étais enfant, et ça m’a vraiment marqué » raconte Alain.
Devenu plongeur professionnel, c’est finalement à la Comex, pionnière mondiale du développement des industries sous-marines en milieux extrêmes qu’il exercera pendant dix ans, avant que la lassitude ne l’entraîne vers d’autres rivages. Le temps de créer une ferme agro-touristique en plein cœur des Baronnies pyrénéennes, le voilà reparti en Nouvelle-Calédonie pour y installer « avec presque rien » un club de plongée “ethno-touristique” dans la tribu d’Eni sur l’île Maré.
De retour en France, c’est à Cazaubon que l’intrépide scaphandrier se pose. Une expérience malheureuse au cœur des vignes l’incite à 48 ans à reprendre des études en agriculture biologique, conseils et développement. Mais à l’approche de la cinquantaine, et malgré son expérience, ses candidatures restent lettre morte.
J’ai créé en 2014 « La L’Uby des moutons.
« C’est en voyant un tracteur broyer les prairies en fleurs autour du lac de l’Uby, que j’ai compris que ce n’était plus possible. Je voulais faire de l’éco-pâturage, mais il faut beaucoup d’argent pour s’installer. J’ai alors fait la connaissance d’un berger itinérant et libre, qui m’a proposé 80 brebis landaises et des chèvres pyrénéennes, deux races rustiques qui ont bien failli disparaître. Je les ai trouvées intéressantes, espiègles et jolies. J’ai créé en 2014 “La L’Uby des moutons”. Aujourd’hui, je suis un berger sans terre avec 140 brebis, une centaine d’agneaux, 25 chèvres ».
Sans terre mais avec 90 hectares à entretenir, entre la centrale photovoltaïque de Cazaubon, des entreprises ou des particuliers qui ont parfaitement bien saisi l’intérêt de confier à ce troupeau atypique la mission de débarrasser leurs espaces verts de ronces et herbes folles dont raffolent ses protégées. Dernièrement, c’est le collège Saint-Exupéry de Condom qui a expérimenté ce système de tonte doux et écologique en accueillant une dizaine de brebis landaises, pour le plus grand bonheur des élèves.
« Mes animaux sont robustes, ils vivent dehors tout au long de l’année, en harmonie avec la nature. Les femelles peuvent mettre bas tranquillement, sans promiscuité. Lorsque le champ est nettoyé, je déplace le troupeau en empruntant la voie verte entre Cazaubon et Barbotan. Les gens viennent à notre rencontre, c’est toujours un réel plaisir ».
Une liberté à laquelle est très attaché Alain, farouchement opposé à une politique agricole et syndicale conventionnelle, « responsable de la disparition de milliers d’exploitations, au lieu de protéger le paysan qui fait travailler d’autres personnes, ne gagne pas plus de 700€ par mois et ne part pas en vacances pour nourrir la population française » fustige-t-il.
J’organise des transhumances initiatiques…
Le 11 mai dernier, la Fondation du patrimoine pour l’agro-biodiversité animale lui a attribué le 3e prix national pour ses nombreuses animations visant à valoriser ces races en voie de disparition. « J’organise des transhumances initiatiques, j’ai installé des panneaux pédagogiques, et j’invite les gens à venir passer une heure au milieu de troupeau pour des séances de médiation animale. Ils peuvent peindre, lire, méditer, ne rien faire, profiter du contact avec la nature et les animaux… ».
Bientôt, lorsqu’il aura terminé la rénovation, Alain ouvrira une boutique dans le vieux quartier de Cazaubon, pour y vendre de la laine cardée, des peaux, de la viande d’antenais ou de chevreau. Une viande que l’on peut déjà trouver à Intermarché, et qui a séduit Fabien Armengaud, chef cuisinier de la Falène Bleue à Lannepax. Une belle référence.
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