Mère de 3 enfants, la créatrice poursuit une belle lignée familiale. Chloé est la petite-fille de Raoul Desmazières, fondateur de la célèbre marque « Petit Boy », destinée aux enfants de zéro à 10 ans. Originaire du Nord, il a démarré cette remarquable aventure en 1945 à Nay, brillamment prolongée par son fils Raoul « Boy » Desmazières avec son épouse, Patricia, à la création également de « Contre vents et marées »
Rencontre passion…
Virus attrapé très tôt ?
Chloé de Bailliencourt. – Depuis toujours, même sans le savoir. Je suis née dedans. La mode m'a toujours hyper intéressée. Au départ, plutôt comme un hobby, comme une joie, comme un plaisir pour le beau, comme l’envie de suivre et de comprendre les tendances… sans imaginer que j'allais faire ce métier plus tard.
Transmission maternelle ?
Ch. de B. – Ma mère m’a clairement transmis le gout de la créativité. Elle s’occupait des collections « Petit Boy » et a été à l’origine du lancement d’une nouvelle marque, « Contre vents et marées », en 1994, qui ciblait à la fois les femmes et les enfants. Mais, c’est mon père qui m’a fait basculer quand j’envisageais d’autres horizons après le Bac : « Il faut que tu fasses de la mode, tu es vraiment faite pour ça ».
Obéissante ?
Ch. de B. – Pas spécialement. Je n’ai pas eu besoin de me faire prier. En suivant les cours de l’École Duperré à Paris et en décrochant le diplôme de la Saint Martin School of London, je me suis rendu compte à quel point j'aimais profondément la mode. Que j'adorais créer, que j'aimais les couleurs et les matières, que j'aimais concevoir des collections.
Et retour à Nay…
Ch. de B. – Assez vite après mes études, j'ai bossé avec les parents et plus spécifiquement pour la marque « Contre vents et marées ». Ma mère dirigeait la création pour les deux pôles. Plus ça allait, plus elle était à l'aise avec cette nouvelle marque qui, par sa taille, lui donnait beaucoup de liberté. « Petit Boy » était une grosse machine, plus structurée. Quand mon père a décidé de vendre, je ne suis restée que peu de temps avec les repreneurs.
Nouvelle vie, alors
Ch. de B. – Qu'est-ce que j’allais faire ? J'habitais déjà sur la côte basque, mais je ne me voyais pas proposer mes services à une entreprise du secteur de la glisse. Je n'étais pas du tout surf. Alors, en 2005, j’ai lancé une petite marque pour enfants. C'était de là où je venais, et ça me semblait très simple. J'ai commencé seule, en faisant tout.
« Arsène et les pipelettes », drôle de nom…
Ch. de B. – Arsène, parce que je voulais un côté old school, un peu vintage, le charme à la française. Et comme j’aime la paillette, la légèreté, la spontanéité… j’ai convoqué les pipelettes. Aujourd'hui, 20 ans après, je ne l'aurais peut-être pas appelé pareil : pas dans l’air du temps ? Personnellement, j’y vois encore quelque chose de frais.
La gamme évolue en permanence
Ch. de B. – Au début on ne faisait que l'enfant, puis on a ajouté le bébé. Depuis 3 ans, on développe une ligne femme : « a.p », les initiales d'Arsène et les pipelettes. Elle marche très bien et nous permet d’être présent dans quelque 400 boutiques multimarques à travers le monde. Au total, nous avons 300 références. Les produits évoluent. Ainsi, les t-shirts et sweat ont largement pris le relais des pulls. Tout bouge, j’aime ça.
Le plus éco-responsable possible ?
Ch. de B. – Très clairement. On a une vraie conscience à ce niveau, même si ce n’est pas toujours dans la mode. Nous essayons au maximum de fabriquer au Portugal, avec des partenaires exigeants, en nous inscrivant dans la durée et en utilisant beaucoup de coton bio. Une grande partie de nos pièces sont certifiées GOTS (Global Organic Textile Standard), garantissant que, du champ de coton au produit fini, le processus de production est vertueux écologiquement, et que les acteurs de la chaîne sont bien traités.
Par conviction ?
Ch. de B. – Complètement. Nous sommes vraiment vigilants à ce niveau. De plus, nous allons devenir une entreprise à mission, pour inscrire dans nos statuts des objectifs forts et une volonté de RSE. Pas question de ne réfléchir que pour nous. Nous voulons réfléchir pour la planète, pour les enfants… tout en développant un business qui fonctionne afin de pouvoir continuer à se développer dans cet esprit. L’enjeu est de trouver un équilibre vertueux.
Comment survivre dans ce secteur ?
Ch. de B. – L’agilité, la souplesse et l’enthousiasme. La période du covid a été extrêmement compliquée. On venait de recevoir toute notre marchandise, qu'on avait payée, et qui se retrouvait bloquée dans les boutiques, sans pouvoir être vendue. Sans la moindre vision. C’était tellement déstabilisant et angoissant. On s'en est sorti. Du coup, je suis très vigilante sur les stocks avec le souci d'acheter moins, mais mieux. Nous essayons de vendre au prix juste et d’avoir les bonnes quantités pour rester sur un circuit normal. Nous ne voulons pas pousser à la consommation, pour privilégier la qualité, la beauté, les belles matières. J’ai aussi fermé des boutiques, pour simplifier l’organisation. Tout cela rejoint le souci d’être vertueux.
La fast fashion déferle…
Ch. de B. – Même l'ultra-fast fashion. Ça va très vite. On ne peut pas concurrencer ces opérateurs. Donc, nous nous différencions par la création, par l'humanité qui est dégagée de nos collections, par le lien affectif que nous entretenons avec nos clients, par ce que nous transmettons, et en étant au plus juste. Notre force vient aussi de notre petite taille qui permet l’agilité.
Vous êtes entrée dans la seconde main
Ch. de B. – En fait, ça rassure les clients, en plus de leur offrir d’autres opportunités. En leur permettant de ramener les vêtements, on illustre très concrètement leur bonne qualité. Cette économie circulaire facilite le renouvellement pour les enfants qui grandissent très vite. Ils ramènent, on reprend et on revend. Cela incite également à passer à la nouvelle collection.
Combien êtes-vous ?
Ch. de B. – Une trentaine. 15 ici, à Saint-Jean-de-Luz et autant dans les boutiques. J’ai la chance d’avoir une très belle équipe, compétente et qui prend plaisir à partager cette aventure. En faisant moins mais mieux, ça fonctionne et ça a du sens pour nos clients, pour nous, pour nos fournisseurs. Je me sens assez juste avec cette idée-là. C'est important d'être juste, pas seulement en tant que chef d'entreprise.
C’est à dire ?
Ch. de B. – Juste aussi pour avoir une vie équilibrée où tout le monde est content de venir, de se retrouver, de partager des choses en dehors du bureau, d'avoir de vraies vies, d'avoir du temps... Et quand on est au bureau, on ne fait pas semblant. On essaie d'être juste dans tout. Le plaisir de travailler ensemble, l’envie de bien faire, d’évoluer et d'être responsable est une vraie force. Nous venons de fêter nos 20 ans avec une émotion partagée par les plus anciens comme par les plus jeunes.
Quelle cheffe d’entreprise ?
Ch. de B. – Piloter la boîte, c'est passionnant humainement et tellement varié. C'est plein de challenges, j’adore. Ça a aussi du sens pour moi, parce que, derrière, il y a la collection. Réfléchir à une harmonie, à des matières, des couleurs… je suis dans mon élément.
Vos inspirations ?
Ch. de B. – J’assure la direction artistique, avec une belle équipe : deux stylistes, des graphistes en externe, une modéliste et une personne en charge du suivi de production. On s'inspire de la vie, de la rue, des réseaux sociaux, des salons pros… une observation permanente et, ensuite, un feeling. Quand on est « créa », tout du quotidien nous inspire, tout nous intéresse, tout nous nourrit. À plusieurs, on fait ping-pong, avec une émulation positive pour aller vers une collection qui humanise et qui aime vraiment. Notre agilité est une vraie force.
Tout va bien, alors…
Ch. de B. – Oui plutôt, parce que c’est une entreprise positive et qui grandit bien. Cette année, nous avons progressé de 30%, portés notamment par les collections femme. Ceci dit, on reste hyper vigilants. Nous concilions prudence et dynamisme. Aujourd’hui, il y a tellement de vêtements qu'il nous faut créer de la rareté, développer une marque qui se distingue ainsi.
Être installée au Pays basque, un atout ?
Ch. de B. – Nous avons un côté très bord de mer, nous véhiculons un esprit frais, léger, spontané, avec des couleurs gaies… un rayon de soleil, une qualité de vie. Si nous étions à Paris, notre collection serait différente. À l’étranger, nous sommes d’abord repérés comme une marque française, ce qui reste très puissant, en plus de notre propre identité. Le dynamisme et la beauté du Pays basque, l’incroyable brassage de gens l’été et toute l’année, la proximité de Saint-Sébastien avec les Espagnols qui habillent beaucoup leurs enfants, pour qu’ils soient chics et beaux… font partie des nombreux atouts.
Pas le temps de vous ennuyer…
Ch. de B. – En effet. D’autant plus que nous vivons au rythme des deux collections annuelles. En janvier, nous allons présenter celle de l'hiver 2026. Ce sont des périodes plutôt chaudes, avec les présentations dans les salons professionnels et à nos agents commerciaux. Puis 6 mois après, au public, pour garder un lien avec nos clientes afin de rester proches de ce qu'elles aiment, de ce qu'elles veulent en ajoutant notre patte, notre personnalité.
Optimiste ?
Ch. de B. – Vraiment. Je suis convaincue du potentiel de notre marque que nous pouvons faire connaître bien plus largement. La collection femme complète parfaitement celles pour les enfants et les bébés. À nous de rester hyper créatifs, agiles, passionnés et de prendre beaucoup de plaisir.
Plus d’informations sur le site internet d’Arsène et les pipelettes
Photos : Jennifer Sath
10 boutiques et des ventes en ligne
Pour découvrir physiquement les collections, rendez-vous dans les boutiques d’Arsène et les pipelettes. Après avoir ouvert ses premiers magasins à Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, Chloé a installé son enseigne à Biarritz, Hossegor, Bordeaux, Toulouse, Saint-Sébastien, Paris et Bruxelles.
Vous pouvez aussi commander vos articles préférés en ligne. La boutique de Noël est ouverte avec plein d’idées de cadeaux.






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