Jeudi 4 septembre 2025, les drapeaux flottaient au vent sur le port de commerce de Bayonne. Sous un ciel encore estival, élus et responsables portuaires se sont retrouvés pour couper le ruban du nouveau quai Armand-Gommès, un ouvrage de 180 mètres qui redessine le paysage maritime de la zone de Blancpignon à Anglet.
La cérémonie a rassemblé Alain Rousset, président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, Mathieu Bergé, conseiller régional en charge des ports, mais aussi Georges Strullu et Pascal Marty, présidents du Conseil de Surveillance et du Directoire de la Société Portuaire Port de Bayonne. Autour d’eux, les représentants de l’État et des chambres de commerce ont tenu à saluer un projet qui incarne la volonté de la région : mettre le port de Bayonne sur la carte des grandes plateformes logistiques européennes.
Un quai qui change d’échelle
À première vue, le quai Armand-Gommès impressionne par ses chiffres. Ses 180 mètres viennent compléter le quai Castel, offrant désormais un front d’accostage continu de 560 mètres dont 360 sur terre-pleins. Derrière la structure de béton et d’acier, ce nouvel espace permet d’accueillir deux navires de grande taille simultanément et de fluidifier la gestion des flux.
L’investissement n’est pas anodin : 26 millions d’euros TTC engagés par la Région, dont 24 millions pour les travaux eux-mêmes et 1 million consacré aux mesures environnementales compensatoires. Pour renforcer l’intermodalité, 1 200 mètres de voies ferrées et 150 mètres d’aiguillages ont été installés, afin de favoriser le report modal et réduire la dépendance au tout-routier.
Entamée en mars 2023, la construction du quai a nécessité plus d’un an et demi de travaux, 99 pieux métalliques de 35 mètres de long, 59 000 m³ de dragages, 105 000 m³ de terrassements, 2 250 m³ de béton et pas moins de 4 250 tonnes d’acier.
Derrière ces volumes colossaux, l'objectif est de donner au port un outil durable, conçu pour résister aux assauts du temps et des marées. La durée de vie de l’ouvrage est estimée à un siècle. Une manière de garantir que le port de Bayonne reste un pilier de la logistique atlantique bien au-delà de la prochaine génération.
Le quai Armand-Gommès n’est pas une construction isolée. Il s’inscrit dans un projet plus vaste, à savoir la restructuration de toute la zone portuaire de Blancpignon. Après la rénovation des quais Castel en 2008 et 2014, ce troisième acte clôt un cycle de modernisation engagé depuis plus de quinze ans. Résultat... un terminal capable de répondre aux exigences contemporaines du commerce maritime, où sécurité, efficacité et respect de l’environnement naviguent désormais de conserve.
Des entreprises locales à la barre
Le chantier a mobilisé une flottille d’entreprises, locales comme nationales. De SOGEA Sud-Ouest (Vinci) à ETCHART Construction en passant par SOBAMAT ou encore Dubos TP, tous ont apporté leur savoir-faire en génie civil, terrassement ou superstructure. EGIS a assuré la maîtrise d’œuvre, tandis que des bureaux d’études comme CASAGEC ont veillé à la dimension environnementale.
Le nouveau quai n’est pas seulement plus grand, il est aussi plus vert. Conçu dans une logique de transition énergétique et écologique, il intègre des mesures compensatoires inédites. Ainsi, des nurseries artificielles ont été installées sur les structures pour favoriser la biodiversité aquatique, tandis que des travaux de renaturation sont en cours sur l’estran du Lazaret afin de recréer des habitats naturels.
De plus, le quai est pré-équipé pour l’électrification des navires à quai, une technologie clé pour réduire les émissions polluantes lors des escales.
Gouvernance et ambitions stratégiques
Depuis juillet 2024, le port de Bayonne est géré par une nouvelle entité : la Société Portuaire Port de Bayonne, une SAS à capitaux 100 % publics réunissant la Région Nouvelle-Aquitaine, la CCI Bayonne Pays basque et la CCI des Landes. Cette gouvernance marque un virage décisif, c'est à dire donner au port les moyens financiers et stratégiques d’un développement durable, tout en restant arrimé à l’intérêt public.
Avec un programme d’investissements de 200 millions d’euros sur 40 ans, la société affiche l'ambition claire de hisser Bayonne parmi les hubs logistiques les plus performants du littoral atlantique.
En 2024, le port de Bayonne a traité 2,11 millions de tonnes de marchandises, accueillant entre 500 et 1 000 navires par an. C’est le 11ᵉ port de France, générant 3 500 emplois directs et indirects et des retombées économiques estimées à 530 millions d’euros.
Avec le nouveau quai et les équipements récents (grues électriques, capacités de stockage accrues, extension des terre-pleins), le port vise à diversifier ses trafics et à renforcer son rôle de carrefour entre France, Espagne et au-delà.
Cap sur l’avenir transfrontalier
La modernisation du quai Gommès et les investissements parallèles s’inscrivent dans une stratégie plus large, à savoir faire du port de Bayonne un acteur majeur des flux transfrontaliers de l’Eurorégion Aquitaine-Euskadi. Sa situation géographique, à la croisée des autoroutes maritimes et terrestres, en fait un point d’ancrage idéal pour les trafics céréaliers, énergétiques ou industriels.
En doublant sa capacité d’accueil et en multipliant les options intermodales (rail, route, fleuve), le port se prépare à affronter la houle d’un commerce mondial en mutation, où la compétitivité dépend autant de la taille des quais que de la rapidité des correspondances.
Avec l’inauguration du quai Armand-Gommès, le port de Bayonne trace une route claire vers l’avenir, entre compétitivité économique et responsabilité environnementale. L’ouvrage est à la fois un outil de travail pour les entreprises locales, une porte ouverte vers de nouveaux trafics internationaux et un symbole d’un territoire qui refuse de rester à quai. Dans le sillage de cette inauguration, Bayonne entend bien naviguer à pleine vitesse sur les routes du commerce maritime.
Sébastien Soumagnas
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