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1500 COUPS DE POUCEOlivier Donard à l’Académie des Sciences

Directeur de recherche émérite à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour et premier directeur de l’IPREM, il est une personnalité hors du commun.
Le chimiste Christian Amatore, membre de l'Académie des sciences et Olivier Donard, directeur de recherche CNRS émérite à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour et premier directeur de l’IPREM.
Olivier Donard est le troisième Béarnais à entrer dans cette prestigieuse assemblée, après Charles (1911) et Henri Moureu (1961). Il est le premier professeur de l’Université de Pau et des Pays de l’Adour à être ainsi honoré.

Un citoyen du monde, un passionné pionnier à l’enthousiasme communicatif, un Ovni parmi les académiciens… De nombreux qualificatifs peuvent illustrer le talent de celui qui est installé en Béarn depuis plus de 20 ans.

Avec son parcours atypique, il se différencie de ses nouveaux confrères, en majorité des polytechniciens originaires de Paris. Né en 1954, il a passé son enfance en Afrique (son père était militaire) et ne s’intéresse pas beaucoup aux études. « J’étais un flemmard, je préférais passer mon temps à regarder les animaux, installé dans les baobabs et ma mère me courait après pour que je fasse mes devoirs », raconte-t-il.

Le chimiste a également longtemps hésité à se diriger vers un métier manuel. De retour en France, il a travaillé plusieurs étés dans des parcs à huîtres sur le bassin d’Arcachon, pour se payer une moto. Il est aussi un grand amoureux de la photographie et du cyclisme.

Olivier Donard poursuit finalement des études dans le domaine de chimie analytique et environnementale à l’Université de Bordeaux-I. Il occupe son premier poste de maître de conférences à l’Université de Genève, puis effectue un post-doctorat de près de trois ans aux États-Unis sur contrat de l’Agence de protection environnementale américaine et de la National Science Foundation. Dans le même temps, il donne sa première conférence au MIT.

« On pourrait comparer Olivier Donard à D’Artagnan, leader naturel, par le faire et non le dire, leader par l’énergie, l'enthousiasme, la vitalité, la loyauté, mais aussi par le franc-parler et le courage », assure Bernard Uthurry, maire d’Oloron et premier vice-président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.

Olivier Donard a été l’un des pionniers dans l’étude de la forme chimique des métaux dans l’écosystème marin et continental. Il s’est ainsi intéressé à l’interaction de ces éléments avec la matière organique et les micro-organismes présents dans l’eau.

La science utile à la société

Ses travaux portent sur les signatures isotopiques et la forme chimique des matériaux. Ils ont permis de réaliser des avancées scientifiques dans ce domaine (étain ou mercure), dans l’environnement et les sciences de la vie, avec, à la clé, des applications novatrices dans le domaine industriel.

« Ce qui m’intéresse le plus, c’est d’être le premier à observer de nouveaux phénomènes et de les analyser. Il faut pour cela innover sans cesse sur les outils et avoir une bonne culture scientifique. Pour moi, la science doit descendre de son piédestal et être utile à la société », martèle Olivier Donard.

Il devient ensuite chargé de recherche CNRS à l’Université de Bordeaux-I en 1985, où il enseigne également pendant 12 ans. Il y étudie l'efflorescence des matières organiques. « J’ai eu la chance de travailler avec des personnes brillantes. Nous formions une équipe formidable et je ne serais pas là où j’en suis sans eux. J’ai aussi une pensée particulière pour Jacques Joussot-Dubien, qui m’a poussé à intégrer le CNRS et à revenir en France. Sans lui, je serais très certainement Américain aujourd'hui », assure le nouvel académicien, fondateurs de deux entreprises : Ultra Traces Analyse Aquitaine (UT2A) en 1999 et Advanced Isotopic Analysis (AIA) en 2017.

Il est arrivé à Pau en 1995, afin de créer le Laboratoire de Chimie bio-inorganique et Environnement (EP 132) qui deviendra, en 2014, l’Institut des sciences analytiques et de physico-chimie pour l’environnement et les matériaux (IPREM), qu’il dirige jusqu’en 2017. Ce centre est considéré comme l’une des références mondiales dans son domaine.

De 2012 à 2020, il est également le directeur du centre de Spectrométrie de masse pour les sciences de la réactivité et de spéciation (MARSS), qui obtient en 2017 le label “Équipement d’excellence” financé par le Programme d’Investissements d’Avenir de l’État et mis en œuvre par l’Agence Nationale de la Recherche. Ce centre est considéré comme le plus grand pôle de spectrométrie de masse (spéciation et isotopie) d’Europe.

« Dans une période où la pression anthropique [NDLR : facteur de stress d'origine humaine provoquant des perturbations, des dommages ou la perte d'un ou plusieurs composants d'un écosystème de manière temporaire ou permanente.] nous inquiète de plus en plus, ses travaux qu’il a mené tout au long de sa carrière prennent tout leur sens. L’Iprem est aujourd’hui l’un des joyaux de la chimie au niveau national et Olivier Donard participe à l’excellence de notre université. C'est un exemple à suivre pour nos jeunes étudiants en science e un honneur pour notre établissement de le compter parmi nous », souligne Laurent Bordes, le président de l’Université de Pau et des Pays de l’Adour.

Un Béarnais parmi les « Immortels »

Nommé en décembre dernier et intronisé en juin 2023, Olivier Donard se dit surpris par cette distinction, mais également très reconnaissant. Si une cérémonie officielle a bien eu lieu sous la coupole de l’Institut des sciences, à Paris, le chimiste a insisté pour organiser la cérémonie de présentation du costume et de l’épée d’Académicien à l’Université de Pau et des Pays de l'Adour, le 6 octobre dernier.

Créée par Colbert en 1666, l’Académie des Sciences réunit des scientifiques (biologistes, mathématiciens, astronomes, chimistes, zoologistes, physiciens…) pour conduire des réflexions relatives aux enjeux politiques, éthiques et sociétaux que posent les grandes questions scientifiques, actuelles et futures. Les membres de cette assemblée doivent leur surnom à leur devise : « À l'immortalité ».

« L’idéologie est en train de tuer la société. Au sein de cette académie comme en science, il n’y a pas de place pour l’idéologie. Pasteur disait : '' Ne me dites pas ce qu’un scientifique a à gagner en rentrant à l’Académie, dites-moi plutôt ce que l’Académie a à gagner à le nommer ''. Olivier Donard est capable de travailler sur l’environnement, mais avec des données. En analysant les milieux, il peut apporter des solutions concrètes » explique, le chimiste Christian Amatore, membre de l'Académie des sciences.

Aujourd’hui à la retraite, Olivier Donard va devoir repousser son projet de voyage itinérant à vélo, pour devenir un des « Immortels ». « C’est un écosystème incroyable, avec des lauréats de la médaille Fields et des Prix Nobel. Cette collaboration interdisciplinaire efface les frontières entre les différentes sciences et promeut un travail collectif. Tout au long de mon parcours, mon équipe et moi-même avons pas mal ramé, mais il faut rêver grand », confie-t-il.

Noémie Besnard

COUP DE POUCE

Olivier Donard doit réunir des fonds pour créer son costume et son épée d’Académicien. Pour les confectionner, il s’est rapproché de Stéphanie Porsain et Florent Trémolosa, de la bijouterie Origine Ateliers, à Biarritz. Nous aurons l'occasion d'en reparler prochainement.

« Quand on rentre dans l’Académie des sciences, on sent le poids de l’histoire et de l’importance des sciences dans la construction de la société. Pour aller au bout de ce projet, il y a la création du costume et de l’épée, tous deux représentant le parcours de l’Académicien », présente Olivier Donard.

Le chimiste a choisi de tout faire réaliser en Aquitaine. Sur la doublure de son veston se trouve une ribambelle d’animaux, en lien avec ses travaux en chimie marine et sur l’environnement.

Quant à l’épée, elle regorge de symboles : autour de la science analytique, des atomes, des molécules en lien avec ses travaux sur les parcs ostréicoles... Une capsule de bouchon de champagne (en référence à ses cinq ans de travaux sur l’identification des contrefaçons des vins de Champagne) marquée du logo de la région Nouvelle-Aquitaine, des éléments isotopiques que l’on pourra déchiffrer grâce à une loupe intégrée dans le pommeau, des vaches Béarnaises gravées et enfin, les couleurs du CNRS (bleu) et de l’UPPA (vert) dans la flamme de plasma au centre du manche.

Quant à son amour pour l’Espagne et sa collaboration avec des chercheurs espagnols, ils seront représentés par le fourreau en cuir.

Vous souhaitez soutenir la confection du costume d’Académicien et de l’épée d’Olivier Donard ? Alors n’hésitez pas à le contacter par mail.

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