Ecrivain, poète, chroniqueur, pamphlétaire… c’est ainsi que tu es souvent présenté. Qui es-tu aujourd'hui ? Encore l'auteur de "L'Os de Dionysos", l'ami éternel de Claude Nougaro et celui qui perpétue son oeuvre, l'engagé, le politiquement incorrect, le blasé-fatigué, l’éternel amoureux du Tour, un peu de tout ça à la fois ? Ou es-tu du genre à tourner définitivement des pages, et à te laisser porter par la passion du moment ? Sans mémoire et sans regrets ou pas ?
Christian Laborde - Je ne suis ni blasé, ni fatigué, et les seules pages que je tourne sont celles des livres que je lis… Je suis toujours l’auteur de L’Os de Dionysos, toujours l’ami de Nougaro, toujours l’amoureux du Tour… Je suis l’enfant des passions qui m’habitent... Je ne suis pas engagé, je suis enragé… Je ne suis pas un révolutionnaire, je suis un rebelle. Rebelle au monde qui nous entoure, cette social-épilepsie qui nous somme d’accélérer en permanence et de passer à côté de notre fête intime… Je ne suis pas fatigué car je ne m’échine pas à faire carrière : j’écris des livres, et c’est une aventure, de la joie !
J'ai l'impression de te "connaître" publiquement et de te méconnaître intimement... C'est une volonté ou une incompréhension ? Qu'est-ce que je devrais savoir de toi, qui est primordial pour mieux t'appréhender ?
C. L. - Tout ce que je suis est dans L’Os de Dionysos : le Sud, le swing, la Femme, la neige, le lyrisme, le rire. Je dis bien le rire, c’est-à-dire l’explosion, l’enfance… Rien à voir avec la dérision et sa petite dictature sèche…
De l’Idiot international à RTL, la presse est toujours présente dans ton parcours. Comment vois-tu son avenir avec la montée en puissance d’Internet et des réseaux sociaux ? Comment souhaiterais-tu qu’elle évolue ?
C. L. - J’ai toujours été un lecteur de journaux. Et j’ai sans doute la nostalgie d’un temps où les écrivains intervenaient régulièrement dans la presse, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui où l’on préfère donner la parole à des experts, des sociologues, des psychologues, tout un tas de mecs et meufs en –ogue. Résultat : y a plus de style dans les journaux. Les journaux sont de plus en plus mal écrits. Donc la presse est sans doute autant menacée par son manque de relief, de style, d’humeur, de couleur que par Internet, me semble-t-il. La presse par son manque d’audace, de tempo ressemble à une époque qui a tourné le dos au lyrisme, et à l’imagination.
Et l'initiative PresseLib', qu'est-ce que ça t'évoque ? Une presse qui va droit dans le mur ou qui peut, au contraire, faire bouger les lignes et éveiller les consciences ?
C. L. - C’est une aventure ! Allons droit dans le mur, et que l’on se souvienne de nous !
Selon toi, l'écriture journalistique a-t-elle encore un impact ou est-elle devancée par la poésie, la chanson ou d'autres formes d'écriture ?
C. L. - Trop de journalistes, aujourd’hui, écrivent comme certains romanciers français d’aujourd’hui : très mal. Ils empilent les mots morts, n’ont pas de swing, ce terme qui renvoie à la fois à la musique et la boxe. C’est pour cette raison que la presse a moins d’impact, me semble-t-il... Quant aux poètes, personne ne les lit ? Question : quel journal confierait, un matin, un édito à un poète ?
Quelles sont les valeurs, les envies les idées, que tu as envie de mettre en avant aujourd'hui ?
C. L. - Citons Louis Scutenaire : « Prolétaires de tous les pays, je n’ai rien à vous proposer ! »
Celui qui écrit doit-il disparaître derrière les idées ou au contraire, les porter ?
C. L. - Celui qui écrit n’est au service de rien ni personne. Il ne gouverne pas les mots, il est gouverné par eux. « Après toi, mon beau langage », disait André Breton.
Tu va signer une nouvelle rubrique dans PresseLib’, « Les dits du vendredi ». Peux-tu nous en dire un peu plus ?
C. L. - Et dis donc, tu dis quoi ? Je dis les dits du vendredi ! Les dits du vendredi, c’est du son, un écho. Donc, le vendredi, les lecteurs ont rendez-vous avec des mots qui sonnent, des mots légers comme un écho, des mots vagabonds, des mots qui font des bonds, des vrais mots… Des mots d’écrivain. Qu’est-ce qu’un écrivain ? Un voyou qui aime les voyelles.
Pour en savoir plus sur Christian Laborde, rendez-vous sur son site Internet
Photos : Fernand Fourcade
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