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Réhabilitons Rameau, le Landais

Rameau ? Mais qui c’est celui-là ? Dominique Padovani, en bon prof, va vous faire sourire et rire. Mais il s’est surtout engagé à, comme haute-mission personnelle, vous le faire connaître…

Tiens, me dit ma rédac’chef façon paquet-cadeau, « toi qui aimes les personnages hors du commun, pour vendredi, j’aimerais que tu fasses ton billet sur Rameau ! » Voilà une idée qu’elle m’enchante : Rameau, le musicien, l’auteur de l’opéra Les Indes galantes, dont j’ai tous les vinyles, coincés entre ceux de l’Orchestre symphonique de Castelnavet (32081) et Marie-Paule Belle. Illico, commence alors le boulot de rédaction et très vite, ça ratatouille dans le moteur : Jean-Baptiste Rameau, il est né à Dijon, est mort à Paris et de ce que narre la chronique, il n’a jamais mis ses chausses dans le Sud-Ouest, pas plus que son neveu, simple créature de Diderot. Donc, quel est le rapport avec la garbure, M’dame ?

La réponse arrive, sèche comme un coup de knout : « Pas jean-Baptiste, inculte, mais Jean, le Landais, le romancier, le poète. Tu es vraiment le seul à ne pas le connaître ! » Toute honte bue, je m’en ouvre à mes compagnons de débauche, avec qui tous les mardis, en compagnie de deux – enfin, trois ou quatre - Picon-bière je tape le carton au Balto. Entre deux valets d’atout et dix de der’, j’introduis l’air de pas y toucher le nom de Rameau, qui ne provoque pas de réaction, hormis celle de Jacky, rigolo en chef et chantre de l’à peu près : « Rameau 1 ou Rameau 2 ? » Bon, définitivement, il ne faudra pas compter sur eux, donc au taf ! Direction Wikimachin, tout d’abord, où j’apprends que le bonhomme existe, enfin a existé, qu’il est né à Gaâs dans les Landes en 1858 et mort à Cauneille, dans les Landes itou, 84 ans plus tard, en 1942, bravo vous suivez. Et que Rameau était un pseudo, puisque son véritable nom est Laurent Labaigt, qui sent bon le terroir et la ruralité puisque le mot signifie « qui vient de la vallée ». Voilà pour le factuel, qui risque de n’intéresser que Paul El Kharrat, le champion Asperger des 12 coups de midi (152 victoires) et des Grosses têtes, qui balance l’identité de personnalités oubliées à partir de leur simple date de naissance.

Rameau est l’auteur de plus de 60 romans et 5.000 contes

Revenons à notre Rameau, qui ne figure pas comme une parenthèse dans notre littérature, puisqu’il est l’auteur de plus de 60 romans et de 5 000 contes, le plus souvent inspirés de sa Chalosse qui, en leur temps, obtinrent leur petit succès. Sauf que, pour les trouver aujourd’hui, c’est le parcours du combattant. Me voilà donc embarqué dans un dythirambe d’un gugusse dont je n’ai rien lu, ce qui s’appelle se foutre du monde. Autant trouver un angle différent. Et là, en parcourant le site du Centre culturel du pays d’Orthe, euréka, j’ai trouvé et mon acharnement me vaudra à coup sûr une augmentation, ou plus probablement un roudoudou. En effet, en plus de sa remarquable activité d’écrivain et de poète, Rameau est un bâtisseur : ayant acheté la ferme du Pourtaou à Cauneille, il va la transformer progressivement en un véritable musée, composé de mobilier, d’œuvres d’art, de photographies, de 10 000 livres, ainsi que de peintures et de sculptures réalisées de ses mains. À l’extérieur, il crée un kiosque, une pergola, une roseraie et la Gloriette, destinée à devenir son mausolée, une tour circulaire de trois étages, avec chapiteaux, colonnes et sculptures de quatorze têtes de tigres formant gargouilles, sculptés par le maître en personne. Polyfacétique, le Jeannot. L’œuvre, classée et inscrite au Patrimoine depuis 1999, a subi du temps d’irréparables outrages, et fait plutôt peine aujourd’hui. Stéphane Bern, si tu nous lis…

Au fait, m’dame la rédac’chef, toi qui as rédigé lundi dernier un brillant (« qu’est-ce que vous nagez bien, chef ! ») billet sur les phobies, tu en as oublié une : l’hydropathie, autrement dit la peur de l’eau, ressentie douloureusement par Rameau. Aussi le retrouve-t-on membre des Hydropathes, un club littéraire des années 1880, où est célébrée au cabaret Le Chat noir la littérature et professé le rejet de l’eau comme boisson, au bénéfice du vin. Anecdotique ? Pas vraiment quand on lit la liste des membres : Alphonse Allais, Léon Bloy, Paul Bourget, Charles Cros, Jules Laforgue, pour les plus connus. En plus d’un grand artiste, il devait être un joyeux drille, le Jeannot ! Aussi un tel homme, un tel artiste se devait absolument d’être réhabilité. Merci lui, merci moi, merci PresseLib’.

Un joli site consacré à l’auteur : Roseraie du Pourtaou – Maison de Jean Rameau

Dominique Padovani

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