En flânant dans les rues de Bilbao, un détail insolite attire désormais les regards : des pavés gravés de mentions telles qu’e-CO₂ ou G-CO₂. Derrière cette innovation discrète se cache une révolution urbaine. Ces pavés, loin d’être ordinaires, jouent un rôle inédit : ils capturent et transforment le dioxyde de carbone, principal responsable du réchauffement climatique.
Ces pavés utilisent le GeoSilex, un matériau breveté par une entreprise espagnole en collaboration avec l’Université de Grenade. Concrètement, il intègre de l’hydroxyde de calcium, capable de réagir avec le CO₂ présent dans l’air ambiant. Cette réaction chimique, appelée carbonatation, transforme le dioxyde de carbone en calcaire solide, qui s’intègre directement à la structure du pavé.
Un pas de géant pour Bilbao
Résultat ? Chaque mètre carré de ces pavés peut purifier jusqu’à 5 000 m³ d’air. Et en vieillissant, ils deviennent plus résistants grâce à l’accumulation de calcaire, tout en maintenant une durée de vie de 12 à 15 ans, comparable à celle des pavés traditionnels.
Leur installation est une première en Espagne. La municipalité de Bilbao a choisi des lieux emblématiques, comme la rue Lutxana et le pont de la mairie, pour tester cette technologie. Cette démarche s’inscrit dans un plan plus large visant à améliorer la qualité de l’air et à réduire l’empreinte écologique de la ville.
Miguel Bermejo, l’un des responsables du projet, souligne l’importance de cette innovation : « Nous cherchions une solution pour capter le CO₂ à coût environnemental nul. Le GeoSilex nous a permis d’allier durabilité et efficacité. »
Urbanisme et durabilité, un duo gagnant
Si l’initiative séduit par son aspect novateur, elle repose également sur des principes d’économie circulaire. Le GeoSilex est en effet fabriqué à partir de déchets industriels, réduisant ainsi les besoins en nouvelles ressources. Une fois les pavés saturés de calcaire, ils pourront être recyclés pour créer de nouveaux matériaux, bouclant ainsi la boucle.
De plus, ces pavés ne consomment pas d’énergie lors de leur fabrication, et leurs performances ne dépendent pas des conditions météorologiques. Ils s’intègrent donc parfaitement dans le quotidien urbain tout en offrant une solution simple et efficace pour lutter contre la pollution atmosphérique.
Cependant, cette technologie a un coût. Produire et installer ces pavés revient à environ 15 euros par mètre carré, contre 9 euros pour des pavés traditionnels. Pour la municipalité de Bilbao, il s’agit d’un investissement à long terme, justifié par les bénéfices environnementaux et la visibilité qu’offre une telle innovation.
L’évaluation de l’efficacité des pavés est en cours, mais les premiers retours sont prometteurs. Si les résultats confirment leur potentiel, d’autres villes pourraient rapidement emboîter le pas et adopter cette technologie.
Vers une nouvelle ère urbaine
Bilbao montre qu’un urbanisme responsable peut jouer un rôle crucial dans la lutte contre le changement climatique. En transformant ses trottoirs en purificateurs d’air, la ville réinvente l’espace public et inspire des initiatives similaires à travers le monde.
Au-delà de leur utilité, ces pavés invitent à repenser la manière dont nous concevons nos villes. Les technologies vertes ne se limitent plus aux bâtiments ou aux infrastructures spectaculaires : elles descendent dans la rue, littéralement, pour devenir partie intégrante de notre quotidien.
Ainsi, marcher dans Bilbao, c’est aussi faire un pas vers un avenir plus durable. Et si les pavés pouvaient vraiment changer le monde ?
Sébastien Soumagnas
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