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Billet d'humeur

Money Drop, une étude de moeurs - ou pas !

Penchons-nous aujourd'hui sur un sujet d'importance, dont le sérieux ne vous échappera pas : ou de l'impact sociologique et psycho social de l'émission Money Drop sur nos comportements. Pour ceux qui censureraient (à raison) TF1, j'explique le principe du jeu : on vous remet, complaisamment, au départ de l'émission 250.000 euros, et le but du jeu, est de conserver le maximum de sousous jusqu'à la huitième et fatidique question.

Soyons honnêtes, personne n'arrive au bout avec le pécule intact. Et de fait, certaines questions sont assez difficiles, d'autant que le panel de quatre propositions (hormis en dernière question, où vous n'avez plus que deux choix possibles) ajoute parfois à la confusion. Mais dans l'ensemble, la ligne philosophique de la chaîne est relativement bien respectée, puisqu'il s'agit de questions débiles, nécessitant un niveau de connaissance fort limité.

On imagine sans mal que les sélections sont rigoureuses, à savoir que l'on choisit systématiquement des Français exubérants, incultes, et inconscients du gouffre de leur méconnaissance, avec en prime un petit ego surdimensionné qui fait le propre de la merveilleuse société actuelle dans laquelle nous pataugeons avec joie.

Laurence Boccolini…

Laurence Boccolini, que l'on découvre ici dans un rôle qui lui sied à merveille, oscille entre compassion, moquerie et parfois un brin d'étonnement devant les réponses hallucinantes des candidats. Certains sont de vrais cas d'étude. On se souviendra notamment de Charline et Marlène. Elles ont fait le buzz.

Par on ne sait quel miracle que la science répugne à expliquer, ces deux charmantes demoiselles étaient parvenues à la dernière question, où seuls deux choix étaient donc permis.

Elles devaient désigner l'auteur de cette affirmation : "Hors de Paris, il n'y a point de salut pour les honnêtes gens". Et avaient donc le choix entre Molière et Hemingway.

Visiblement, si le premier leur parle vaguement, le deuxième est un absolu inconnu.

- Hemi... quoi ?

- Non c'est Molière, parce que "ce" Hemingway alors, il serait écrivain ?

- Hemingway, je sais pas qui c'est...

- Si ça se trouve, c'est un mathématicien (éclat de rire), ouais c'est possible...

- Ça doit être un mathématicien, rien à voir avec Molière, ça c'est sûr !

Et le hasard pouvant parfois se révéler un merveilleux allié, les voilà qui récoltent 15.000 euros. Assurément de quoi s'acheter "Le vieil homme et la mer" et le bouquiner sur une plage paradisiaque. Non mais allo quoi, tu crois quand même pas qu'on va gâcher notre bronzage intégral avec ce bouquin ? Ça va nous faire de l'ombre. Et puis tu sais, le livre d'un mathématicien, très peu pour nous ! Oui, on sait...

Il y a aussi ces deux copines, dont nous tairons les prénoms pour leur conserver le peu de dignité qu'elles-mêmes n'hésitent pourtant pas à aller sacrifier sur l'autel de leur inculture dans une émission télé à grande heure d'écoute.

Si elles n'ont pas la moindre idée de la réponse, cela n'empêche pas leurs certitudes et surtout le fait qu'elles les imposent dans des réflexions à voix haute au public. Comment disait Audiard, déjà ? "Les cons, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît."

Question : "Traditionnellement, une jeune fille devient catherinette quand elle est encore célibataire à..."

Possibilités de réponse :

20 ans, 25 ans, 30 ans, 40 ans.

Et là, ce n'est pas une réflexion, c'est un festival. Si vous organisez un "dîner de cons", promis, on vous retrouve les nanas :

"Alors déjà, je connais parce que j'ai vu une émission spéciale de "Attention à la marche" sur les catherinettes, et c'étaient des femmes d'âge mur. Enfin pas des jeunes de 20 ou 25 ans quoi, voilà. Parce qu'on va pas te dire, à 20 ans, t'es une catherinette, parce que tu démarres dans la vie, c'est pas la loose si t'as pas encore de fiancé."

L'autre : "oui mais, moi j'ai dix-neuf ans, mais admettons que j'aie 20 ans, que j'aie pas de copain, chui catherinette ou pas ?"

Prem's : "ben non, t'es normale"...

Mais la palme absolue revient aux deux frangines, Leila et Samia (là, tant pis on balance, faut pas pousser), vraies soeurs et fausses brunes !

Dès le départ, ça part mal.

Question : "Selon la tradition, quel fruit est commun à Guillaume Tell et à Isaac Newton ?"

Réponses possibles :

- la pomme,

- la banane,

- la poire,

- l'orange

Nos deux fausses brunes et vraies idiotes :

- C'est qui Isaac Newton ?

- Guillaume Tell, c'est quelqu'un de notre époque... (Ndlr : tu confonds avec Guillaume Canet, chérie)

- Y a quelque chose, je sais pas quoi, dans mon subconscient, qui me dit que Guillaume Tell, c'est la pomme... Le truc, c'est que je vois une pomme verte en plus...

- Ça me parle pas, la pomme, la poire, faudra me raconter l'historique après, parce que ça me parle pas du tout... (Ndlr : et les scoubidous, ça te parle, les scoubidous ?)

- Isaac Newton, y avait pas quelque chose avec la lumière ? (Ndlr : en parlant de lumière... Je suis pas sûre que tu l'aies à tous les étages, ma cocotte !)

Bon mais comme la pomme verte est apparue à l'une des deux grâce à l'opération du SSE - Subconscient Saint-Esprit -, hop elles gagnent. Et se retrouvent à la question suivante. Choix cornélien (c'est qui, Cornélien ?), elles doivent élire un thème entre deux. Plutôt sculpture ou mauvais genre ?

La réponse ne surprendra personne. "Oh ben sculpture, on n'y connaît rien de rien. On va prendre plutôt mauvais genre, avec un peu de chance..." (Ndlr : pourquoi, mais pourquoi n'est-on pas surpris ?)

Seulement voilà, le mauvais genre n'est pas toujours là où on le croit. La question s'affiche, fatidique :

"Lequel de ces mots est de genre féminin ?" :

- tentacule,

- échappatoire,

- abysse,

- éloge

Leila entre en action : "Je sais, je sais, on dit "un" échappatoire parce que dans les séries américaines, ils le disent beaucoup... Jack Bauer il le dit tout le temps".

Stoooopppp...

Dis-donc, "Attention à la marche", "séries américaines", "Jack Bauer", jusqu'où va se nicher la culture ? Hein, hein... Hormis que là... Leila et Samia, heureuses du soutien inespéré apporté par ce sacré Jack nous misent 135.000 euros sur tentacule. Ben ouais, logique : mauvais genre, tentacule qui est un peu connoté vulgaire pour peu qu'un lapsus - encore un truc équivoque - vienne se glisser (sic) là-dedans (re sic), ça colle ! Et vlan, c'était "une" échappatoire !

Perduuuuuuuuu, méchant Jack Bauer !

Et d'une façon tout à fait suspecte, perverse et assumée, dans ces moments-là, je souffle de soulagement. Non la crétinerie n'est pas toujours récompensée. Quoique. Tous les soirs à 19 heures. Y a quand même beaucoup trop d'argent distribué à des couillons de la lune. Et beaucoup trop d'imbéciles de mon genre qui regardent ces bêtises...

PS : vous êtes prié(e)s d'avoir une pensée de soutien pour votre serviteur, serviteuse, servitrice, servitateuse, enfin vous voyez quoi, qui s'est cognée toutes les vidéos sur Youtube pour vous dégoter le meilleur du pire de l'émission. Merci.

Gracianne Hastoy

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