Un premier concurrent français pour la SNCF sur la LGV Sud Europe Atlantique ? On aurait presque du mal à y croire, mais le scénario semble bel et bien en train de se dessiner. Certes, on savait déjà que des compagnies étrangères s’étaient positionnées sur d’autres axes français : l’opérateur espagnol Renfe espère par exemple faire rouler des TGV entre Lyon et Marseille dès la fin de l’année, tandis que la société italienne Thello (groupe Trenitalia) est intéressée par l’axe Paris-Lyon, dans l’idée de rejoindre Milan. Ces projets ont été freinés par la crise sanitaire mais restent d’actualité.
Cette fois, c’est une compagnie française qui se manifeste pour profiter de la récente ouverture à la concurrence des lignes à grande vitesse. Et plus étonnant, c’est une jeune compagnie, puisque Le Train (c’est son nom) n’a été créée qu’en 2020.
Desserte plus fine…
Derrière ce projet pourtant longuement mûri, il y a d’abord l’entrepreneur charentais Tony Bonifaci, DG de la SNGC, entreprise de travaux publics et de génie civil basée à L'Isle-d'Espagnac, à côté d’Angoulême (où sera aussi logée la nouvelle compagnie). Le dirigeant, dit-on, était agacé de voir la LGV Sud Europe Atlantique sous-exploitée par la SNCF en termes de desserte. La ligne, ouverte on le rappelle en 2017, est en effet surtout exploitée sur des trajets directs Paris-Bordeaux, avec peu d’arrêts à Angoulême. D’autre part, 80 trains circuleraient quotidiennement sur la ligne, pour une capacité de 132.
Ensuite, cette compagnie Le Train sera pilotée par Alain Getraud, par ailleurs DG délégué d’Aptitude Experts, société d’ingénierie de projets dans le domaine des mobilités et du ferroviaire. Avant cela, le dirigeant avait œuvré plus de 15 ans chez SNCF Réseau, entité dont il a été le directeur des grands projets, participant notamment à la mise en service de la susdite LGV SEA.
Après 18 mois d’études préalables et d’estimations, les deux professionnels se montrent confiants : les attentes seraient localement fortes autour de leur projet. Et l’entente serait plutôt bonne avec la SNCF, tant avec la branche Réseau (logiquement encline à ce que la ligne soit davantage exploitée) qu’avec la branche Voyages (les discussions seraient cordiales autour de futures correspondances).
L’objectif des deux hommes est de proposer 14 nouvelles liaisons entre villes aux voyageurs à partir du 11 décembre 2022. Une ligne principale permettra d’abord de relier La Rochelle et Arcachon via Niort, Poitiers, Angoulême, Bordeaux et Pessac (avec 3 trajets quotidiens dans chaque sens en semaine, et 5 le week-end). Le week-end, une autre ligne fonctionnera entre Nantes et Arcachon via Angers, Saint-Pierre-des-Corps, Bordeaux et Pessac, ce qui mettra Nantes à moins de 3 heures de Bordeaux, contre au moins une de plus actuellement. Enfin, le lundi et le vendredi sont respectivement prévus un Rennes-Bordeaux et un Bordeaux-Rennes, avec là encore près d’une heure gagnée au minimum par rapport aux solutions actuelles. L’idée générale est en résumé de proposer une desserte plus fine que la SNCF le long de la LGV SEA.
Un projet bien avancé…
Le projet a déjà été soumis à l’ART (autorité de régulation des transports). Le Train veut commencer par exploiter une dizaine de rames de 350 places. La compagnie se lancera vraisemblablement avec des trains d’occasion remis à neuf : elle réfléchit encore aux deux options de l’achat et de la location.
L’ambition est ensuite de faire voyager 3 millions de personnes par an et de surfer sur un mode de transport réputé plus écologique. Le projet semble bien avancé, puisque Le Train serait en train d’obtenir son certificat de sécurité. Ses dirigeants espèrent enchaîner avec une licence du ministère des transports d’ici la fin de l’année. Ils comptent lever autour de 100 millions d’euros auprès de différents partenaires, banques, fonds d’investissement, entrepreneurs et acteurs institutionnels.
Si ce projet se concrétisait, ce serait un joli tour de force pour un acteur tout juste né. On rappelle que ce projet vient s’ajouter à celui de la SCIC Railcoop, qui prévoit de refaire rouler des trains sur la ligne Bordeaux-Lyon dès juin 2022.
Bref, on dirait bien que c’est parti pour bouger sur les rails français…
Pour lire notre article sur Railcoop et Bordeaux-Lyon, c’est ici
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