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    Publié le Mis à jour le

    Je dis ça je dis rien...

    Cep'party !

    Alors que le virus Ebola décime l'Afrique de l'Ouest, c'est un autre mal, redoutable, qui affecte le Sud-Ouest de la France. Les arrêts maladie pleuvent dru sur la région.

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    Normal, c'est bientôt l'automne. Il faut différencier plusieurs épidémies, se succédant, parfois agissant dans une concomitance de temps suspecte.

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    Et...

    Pour certains, c'est la palombite aiguë, apparemment grave, qui affecterait en particulier la population masculine. Ils voient des oiseaux bleutés partout, se juchent dans des cabanes en bois en haut des arbres et se sustentent énormément, liquides et solides absorbés indifféremment, pour tromper l'attente.

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    Pour d'autres, c'est apparemment plus bénin, une châtaignite vulgum, qui se manifeste par des piqûres de bogues dans les mains. Mais ces maux viennent sur les restes d'une cruelle vendangite qui vient de les terrasser et pour laquelle, c'est effrayant, ils se sont traînés une gueule de bois atroce pendant des jours.

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    Mais tout cela n'est rien, en comparaison du mal le plus terrible du moment : la cépite boletus dulurusa (je cause bien le latin hein ?). Les symptômes sont reconnaissables entre mille. La victime se réveille aux aurores, agitée. Toute la nuit, elle a rêvé de champignons (d'où l'hallucination qui s'ensuit, peut-on penser) et se dirige en automate vers son armoire, d'où elle extrait un vilain pantalon, un pull et des chaussures, avant de s'enfoncer dans les bois du coin, prenant garde de ne pas être suivie.

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    Il faut savoir que la cépite fait vraiment très peur, et certains propriétaires terriens ou sylviculteurs, à apercevoir les victimes, n'hésitent pas à dégainer leur fusil. Les plus éminents spécialistes en ont conclu que c'est par crainte d'être contaminés à leur tour (quel autre motif ?).

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    Là ne s'arrête pas le mal. Notre victime, dès qu'elle entre en contact avec l'objet de son obsession, vulgairement appelé "cèpe", entre dans un état proche de la convulsion. Elle transpire abondamment, prend mille précautions pour le cueillir, et surtout tient immédiatement des propos confus et à tendance mythomane ou affabulatrice.

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    "Plaît-il monsieur ? Ah nooonnnnn, nonnnn pas du tout, je ne ramasse pas de cèpes, nonnnnnn pensez-vous, je me promène, c'est si beau la forêt à cette époque. Ah bonnn ? Des cèpes par ici ? Noooonnn, pensez, autrefois oui, du temps de la mémé de mon arrière-arrière grand-mère du côté de la soeur de mon arrière-tata, peut-être, mais maintenant, avec les pesticides, tout ça, y'en a plus des cèpes... Ou alors d'élevage seulement... Ça s'élève très bien le cèpe, vous ne saviez pas ?"

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    La crise est alors à son paroxysme. La victime fuit, hagarde, dissimulant tant bien que mal les champignons cachés dans une poche plastique, et fait mine de s'intéresser au gui et aux myosotis. Dès que l'intrus s'éloigne, elle retourne aussitôt à sa quête, en maugréant : "Ce hils de pute, là, tu vas voir qu'il m'en a piétiné deux, et que je vais plus en retrouver un seul, macareu."

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    Car le malade, aux prises de sa terrifiante maladie, tient des propos incohérents. Il est capable de jurer que le cèpe est un capricieux, que ce bolet serait capable de se montrer aux uns et pas aux autres, et même qu'il serait capable d'apparaître en quelques secondes, le temps que vous ayez détourné le regard. On le dit trop peu, mais le cèpe serait un perfide !

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    Paraîtrait qu'en guise de thérapie, faut combattre le mal par le mal. Une grosse omelette aux cèpes, par exemple. Oups, j'ai la tête qui tourne moi, et l'estomac qui gargouille. Je ne me sens pas très bien. Oh bou diou, viteeeeeeeeeeee, apportez-moi une omelette aux cèpes ou je me meurs...

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    Enfin bon, moi je dis ça, je dis rien...

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    Gracianne Hastoy

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