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    Je dis çà, je dis rien

    Faut-il quitter Facebook massivement ?
    laya-enervee
    Bientôt, l'acte de rébellion par excellence, l'aveu d'insoumission et de révolte contre une société pervertie se situera dans cet acte symbolique : se désinscrire de Facebook.

    Alors qu'ils sont chaque jour des milliers à venir se référencer sur le réseau social le plus fameux du monde, une poignée d'irréductibles rebelles vont à contresens, et quittent "the place to be", vers un anonymat solitaire où le selfie n'existe pas, où il n'y a plus de jeux addictifs, où l'on ne poste plus ses états d'âme sur un mur virtuel.

    Mais que perdent-ils exactement ? Quel serait le changement majeur qui interviendrait dans nos vies, en osant l'impensable, en quittant Facebook ? J'ai tenté l'expérience, jamais à court d'une audace pour vous informer. Et voilà le bilan de mon ascétisme facebookien...

    PL APPLISJ'ai perdu - notoriété extrême oblige, hum ! - 1.800 amis, dont je ne connaissais pas la moitié du quart. Parmi eux, au moins 1.500 absents qui ne se manifestent jamais, comprendre de "purs voyeurs" qui passent leur temps à aller "mater" le profil de leurs amis, et qui, s'ils étaient potentiellement psychopathes, pourraient recueillir une sacrée masse d'informations.

    Car le "faceboukeur" est un imbécile patenté qui, plus il est jeune, plus il est inconscient du pouvoir de ce réseau social sur nos vies. L'excellente émission de M6, "Scènes de ménage" avait, dans une de ses séquences, bien résumé les travers possibles de la "résosociomanie" : Marion et Cédric rentrent de vacances, trouvent leur appartement en vrac, cambriolé, et Cédric, mécontent, reproche à Marion : "Je t'avais bien dit de pas dire sur Facebook qu'on partait en vacances !"... Et Marion, délicieuse idiote, de répondre : "Eh oh, ça va, j'ai pas dit où on allait hein !"

    Je me prive également des posts enthousiastes d'une centaine de météorologues refoulés : "chouette, c'est le printemps" (ah bon ? J'avais pas remarqué, dis donc !), "il fait trop froiddddddddd, gla gla gla" (pov chou), "ras le bol de la pluie, vdm" (Vdm, acronyme trèsssss utilisé sur Facebook, signifie "Vie de Merde", sic, faut vraiment tout vous expliquer !). Hey les mecs, savez quoi ? J'ai la télé, Internet, la radio, les journaux, et des dizaines de bulletins météo me sont offerts chaque jour, sans que j'aie besoin de vous lire pour savoir le temps qu'il fait. Et en plus, merci, j'ai remarqué toute seule comme une grande qu'il pleuvait !

    Après les météorologues patentés, je me prive aussi - et j'ai du mal à m'en remettre, je vous assure - des posts délirants d'une centaine de géolocalisés : attention, le géolocalisé va souvent de pair avec l'adepte du "selfie", qui se prend en photo cent fois par jour, et poste le résultat sur son mur ou le vôtre (impoli, va). "Suis à l'aéroport" (localisation : Biarritz). Ouais, m'en fous, autre chose. "ras le bol de la SNCF, train de 15h12 en retard à Montparnasse" (localisation : Paris). M'en fous toujours. Pire, le géolocalisé exotique qui vous nargue, selfie à l'appui : "Vacances à Saint-Barth, je m'éclate". Avec photo, bronzage narquois et boisson alcoolisée à la main avec la petite ombrelle plantée dans le morceau d'ananas, sur le bord du verre. Shit.

    Pire encore sont les "pouet-pouet" qui vous inondent de posts dégoulinants : citations poétiques, citations zen, réflexions philosophiques de bas étage, ce sont souvent les mêmes qui vous souhaitent : une bonne journée, une bonne semaine, un joyeux anniversaire avec un dessin et des fleurs, beaucoup de fleurs, le tout sur fond pastel et couleur dragée, pouahhhh.

    Comment, mais comment vais-je survivre sans les crétins ? Vous annoncez que vous venez de perdre a) votre chien, b) votre belle-mère, c) votre tortue adorée, et ces couillons cliquent "j'aime". Oh, vous trouvez pas ça un tantinet illogique, les mecs ? On sait qu'Internet fusille les neurones, mais tout de même...

    Ceux que personne ne regrettera, paix à leur âme, ce sont les joueurs patentés : mille fois par jour, ils réclament une vie supplémentaire pour CandyCrushSaga, une pelle pour biner le jardin de Ferm'machin'Saga, des lance-rockets pour BubblemachinSaga, de les aider à débloquer le niveau suivant de TrucBiduleSaga - sans quoi ils devront payer 0,89 euros ! -, et comme vous n'avez pas pensé à désactiver l'option sur Facebook, vous assistez désemparé à la pollution de votre mur par ces Ƃ©Ū{{#|{[|{#|^@@\\[[#{[ de joueurs (Ndlr : par égard pour notre jeune public innocent, avons préféré ici flouter les propos désordonnés de l'auteur, merci de votre compréhension).

    Je n'aurai plus aucun moyen, non plus, de parfaire ma culture musicale (variante : littéraire, poétique - voir rubrique "pouet pouet", cinématographique... l'inculture me guette, au secourssssss !) car, si je n'aimais pas Bob Dylan, par exemple, c'était dommage. Parce que mon ami (mouais) RockandClock, lui, adorait, et me balançait à longueur de journée des vidéos de son idole. Timeeeeee areeeee changinggggggggggggggggggggggggggg....

    Et j'envisage de bigrement m'ennuyer sans les "accros du statut" : dans la même demi-heure, vous assistez au changement de statut de votre pote Marcel : "20h15, statut : en couple", "20h30, "t'es chiante, Marina" (avec lien sur la page de Marina, au cas où on ne l'aurait pas parfaitement identifiée), "20h35, statut : célibataire", "20h40, Marina, on fait la paix ? Je t'm", "20h45, statut : c'est compliqué", "20h50 : en couple avec Sophie" (avec lien sur la page de ladite Sophie, c'est qui celle-là ?).

    Il paraît qu'en quittant Facebook, je récupère en moyenne 20 minutes de mon temps quotidien. À tous ceux qui me disent fréquemment que : "Eh oh, je n'ai pas le temps de lire, moi !", je demanderais s'ils ont un profil Facebook et de rapidos télécharger l'application (http://time.com/6107/how-much-time-have-you-wasted-on-facebook/) qui permet de calculer le temps passé sur le réseau social le plus vain du monde...

    Il se pourrait qu'ils aient des surprises et soient contraints de revoir leurs priorités journalières. Enfin, moi je dis ça, je dis rien...

    Gracianne Hastoy

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