Mais, la guerre entre élus béarnais et bigourdans avait fait exploser le projet en vol, au moment d’aboutir. Cette (trop) longue page clochemerlesque doit être tournée au plus vite. La balle est, avant tout, dans le camp des présidents des deux agglomérations.
François Bayrou et Gérard Trémège sont évidemment en première ligne pour sortir d’une impasse à haut risque. Les Régions et les Départements ont, bien entendu, leur mot à dire au sein des deux sociétés propriétaires des sites aéroportuaires. Mais, il est clair que la volonté (ou pas) des présidents des Communautés d’agglomération, de trouver la bonne solution, est déterminante. Les citoyens et les entrepreneurs du Béarn, de la Bigorre et même du Sud-Est des Landes s’impatientent.
Le moment est venu d’agir avant que la situation se dégrade de manière irréversible, à tous points de vue. Pour bien comprendre, quelques explications.
La fin de la domination paloise…
Ces dernières années, l’aéroport de Pau était en position de leader, solidement porté par les voyages d’affaires ; ces derniers étant très largement alimentés par quelques grands groupes comme Total, Safran, Euralis… Avec 8 vols aller-retour par jour avec Paris, tout semblait sourire pour la plateforme béarnaise.
Pendant ce temps, l’aéroport Tarbes-Lourdes-Pyrénées galérait pour assurer au moins une liaison quotidienne avec Orly. On était très loin du compte, avec une offre trop limitée pour attirer une clientèle suffisante et rentabiliser la ligne. Du coup, beaucoup de professionnels du 65 préféraient se rendre à Pau pour prendre un vol adapté à leurs besoins en termes d’horaires. Le site Bigourdan développait parallèlement une activité, charter et vols low-cost, liée majoritairement aux pèlerinages et au tourisme religieux.
L’arrêt de tout trafic aérien pendant la pandémie du covid a rebattu complètement les cartes. D’abord, les comportements ont évolué, avec notamment une chute sensible des voyages professionnels, rendus moins indispensables avec le développement à grande échelle des visio-conférences. Mais, ce n’est pas tout…
Des choix stratégiques divergents…
Les collectivités locales propriétaires des aéroports de Pau et de Tarbes ont fait des choix très différents qui ont changé la donne. Le Béarn, fragilisé par la baisse de sa clientèle d’affaires, est entré dans une spirale négative concernant sa liaison phare avec Orly. Air France s’est débarrassé de la patate chaude, en la confiant à sa filiale low-cost, Transavia. Cette dernière a rapidement et inéluctablement réduit son offre et sa qualité de service, sans pour autant proposer des tarifs suffisamment attractifs.
Les élus de l’agglomération béarnaise n’ont pas su négocier avec la compagnie aérienne française pour préserver leur activité structurante avec Orly : un échec lourd de conséquences.
Dans la même période, la plateforme bigourdane a réussi à capter Volotea pour relever le défi de la liaison Tarbes-Paris. La compagnie low-cost espagnole a tout de suite senti l’opportunité de développer des liaisons quotidiennes avec Orly en installant une de ses bases françaises dans les Hautes-Pyrénées.
Du coup, la situation s’est complètement inversée. Tarbes est en train de prendre le leadership sur cette liaison avec Orly, avec 2 vols quotidiens aller-retour, alors que Pau va tomber à une seule rotation par jour : retour au début des années 1960 !
Les chefs d’entreprises et les professionnels ne s’y trompent pas. Non seulement, les Bigourdans décollent depuis Tarbes-Lourdes. Mais en plus, des Béarnais commencent à prendre leurs habitudes dans le 65.
On a même vu François Bayrou aller à Paris depuis les Hautes-Pyrénées plutôt que depuis Pau. Les élus bigourdans se frottent les mains.
Le débat vigoureux, qui a été alimenté autour de la subvention consentie à l’aéroport de Tarbes-Lourdes, permet seulement de cacher une réalité évidente : les politiques bigourdans ont été plus efficaces que ceux du Béarn. A ces derniers d’obtenir également une aide pour éviter le crash…
Il faut aussi souligner (et c’est normal) que le Département des Pyrénées-Atlantiques ne peut pas se mobiliser uniquement pour le Béarn, devant apporter le même soutien à l’aéroport de Biarritz Pays Basque. Idem du côté de la Région Nouvelle-Aquitaine. Inversement, le Département des Hautes-Pyrénées est totalement derrière son aéroport, ainsi que la Région Occitanie.
Résultat, aujourd’hui, c’est Tarbes qui est en position de force avec une dynamique autour de la liaison avec Orly, tandis que Pau se retrouve en position de faiblesse avec une situation à risque si l’hémorragie n’est pas enrayée au plus vite.
Jusqu’à présent, les élus bigourdans se plaignaient ouvertement de l’arrogance de leurs homologues béarnais qui, disaient-il, les regardaient de haut. Aujourd’hui, ils tiennent leur revanche.
L’escalade des invectives entre politiques béarnais et bigourdans, de ces dernières semaines, doit cesser. Ce qui intéresse les habitants et les entrepreneurs des deux territoires, ce n’est certainement pas la guerre des ego, mais une plus grande fréquence de vols, des prix attractifs et une bonne qualité de services.
Alors, on espère de nos élus des actes forts et concrets.
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