Abonnez-vous
    Publié le Mis à jour le

    J'dis ça j'dis rien

    Politique : quand y en a plus, y en a encore...

    Vous l'ignorez, mais chez PresseLib', le bureau du "J'dis ça, j'dis rien" occupe une soixantaine de journalistes à temps complet, H24, sans heures sup's payées, sans congés, sans avantages (ni en nature, ni en quoi que ce soit d'autre). On a la vocation ou on ne l'a pas. Le simple bonheur de travailler pour une grande et noble cause, MOI donc, doit suffire à leur épanouissement personnel.

    Ils viennent précautionneusement chaque matin me livrer mon café et mes croissants, parfois un pain aux raisins quand c'est fête, humbles et serviles, tout en faisant la revue de presse. Ça donne généralement ce type d'entrée en matière : "Chef, chef (Nda : oui, j'ai su rester simple), on a encore reçu une palanquée de bourdes, lapsus et blagues potaches des politiques, on fait quoi, on stocke, ou vous passez à l'attaque ?" Variante d'intitulé selon le degré de fayotage des sbires : "ô chef vénérée", "ô lumière de nos jours", "ô grande prêtresse du j'dis ça, j'dis rien", etc, etc, je ne voudrais pas que vous pensiez que j'ai pris la grosse tête, surtout. Ni que j'affabule allègrement, pas le genre de la maison.

    Et…

    Donc, lassée par 36 matins d'insistance de "mes" équipes nombreuses et hautement motivées, sacrifiées à l'ampleur de leur mission, j'ai capitulé et décidé, pour la énième fois, de vous refourguer un peu de ce stock très encombrant de bêtises politiques. Normalement, on a de quoi tenir jusqu'en 2856 à peu près, donc autant ne pas se laisser dépasser...

    Et si ça vous fait grincer des dents, je n'hésiterai pas à accuser ouvertement le "petit personnel, qui n'est plus ce qu'il était, et qui m'a fourgué des carabistouilles pareilles", sachez-le, et évitez donc de gaspiller votre clavier à me laisser des commentaires incendiaires, qui, de toute façon, seront censurés, et TOC !

    Et puis, là, en l'occurrence, celui qu'il faut enguirlander si on va trop loin, c'est Pierre Douglas himself, qui sort sa compilation des meilleures petites phrases prononcées par les politiques depuis 2012, aux Editions L'Archipel, dans son livre intitulé "Ils ont osé" (9.95 euros, ce serait dommage de se priver d'une tranche de rire). Oui, z'avez raison, sont vraiment payés à rien foutre mes 60 journaleux documentalistes, le seul qui ait bossé ici c'est Pierrot ! Et moi, statut de chef oblige...

    Arnaud Montebourg, dont on ne cesse de regretter le silence (parfois), avait choqué en lançant, à propos d'un éventuel retour de Nicolas Sarkozy après la défaite aux Présidentielles de 2012 : "Je crois au retour de Sarkozy, mais menotté." C'est méchant, court, efficace, d'emblée la barre est placée très haut.

    Note qu'en 2014, on se demande si on n'a pas préféré la déclaration du député PS, Olivier Faure, qui, toujours évoquant le retour de Sarko (décidément, ça les a bien occupés, ça !), affirmait sur iTélé : "En général, quand un ministre ou un député est mis en examen, il démissionne. Avec Sarkozy, c'est l'inverse, il revient." Hihihihihi, c'est minable mais ça nous fait rire ("nous" évoque ici les soixante journalistes et ma pomme, c'est d'évidence, suivez un peu).

    Sarkozy, puisqu'on en parle, justement. Ah ! Que l'on regrette le Nicolas version 2011 qui affirmait : "Je suis heureux d'avoir tenu une promesse que je n'ai pas faite." Elle entre d'emblée dans notre palmarès des chouchoutes celle-là ! Evidemment, il serait facile de rétorquer que, de notre maigre expérience, il nous semble éventuellement, peut-être, maybe, quizás, quizás, quizás, que les seules promesses que tiennent généralement les politiques sont justement celles qu'ils ne font pas. Et toute l'équipe des 60 journalistes de brandir le cri de guerre maison : "Enfin bon, nous on dit ça, on dit rien !" LA FERME !

    Tandis qu'on avait un peu tendance à oublier que François Fillon, en 2007, était vachement plus rigolo que maintenant et qu'il usait de métaphores parfois... euh... surprenantes : "Le problème de Nicolas, c'est qu'il veut baiser tout le monde. Il n'y a pas de préliminaires." Rhooo, comment t'y vas, Fafa... !

    Surprise de comique qu'on n'attendait pas, on peut aussi citer Valérie Pécresse, pourtant pas reconnue comme pitre ès grosses blagues, qui avait surpris son "Monde" (le journal) en déclarant en 2012, grande année d'inspiration littéraro-comico-politique : "La déclaration d'amour de Hollande pour les Français, c'est une déclaration d'impôts." Depuis, on a beau traquer, on ne retrouve pas trace d'une telle fulgurance d'esprit dans ses propos, dommage ! Et il faut remonter à 2008 pour ce magnifique tacle de Chantal Brunel (mais si, ancienne porte-parole de l'UMP) à Ségolène Royal : "La seule chose qu'on ne peut pas voler chez Ségolène Royal, c'est son programme, elle n'en a pas." Ça vient certainement de quelqu'un qui peut se targuer d'en avoir un, de programme... Non ? Toujours pas ? Ok, au suivant alors.

    À tout seigneur, tout honneur, notre président François Hollande a fait fort cette année, en déclarant le 14 Juillet : "Il n'y a rien de plus terrible pour un soldat déjà anonyme que de mourir inconnu." Mais souvent, avouons-le, nos politiques sont avant tout de grands philosophes aux éminentes questions existentielles.

    Le spécialiste du genre étant, vous l'aurez reconnu aussitôt, Jipé. Ou plus exactement, Jean-Pierre Raffarin. Qui avait fait très fort, on s'en souvient (ou pas), en déclarant : "Il est curieux de constater en France que les veuves vivent plus longtemps que leurs conjoints." Ben quoi, c'est pas vrai peut-être ? Alléluia, nous sommes sauvés, des penseurs pareils à la tête du pays, pas de quoi s'inquiéter sur l'avenir, OUF. Le truc qui peut poser question, c'est pourquoi précise-t-il en France ? C'est pas valable ailleurs ? Boh, on n'a pas fini de gamberger, tiens... Mais en philo, au bac, y a toujours plusieurs sujets au choix.

    Donc si vous séchez sur la raffarinade du jour, on peut aussi vous proposer du NKM dans le texte. Nathalie Kosciusko-Morizet nous oblige ainsi à méditer sérieusement sur le temps. Ah ! Le temps, vaste sujet. "À force d'être dans le présent, on risque un jour d'être dans le passé." Oui, c'est du lourd, pas sûr qu'on s'en sorte mieux qu'avec Raffarin, j'hésite. C'est pas gagné la mention, sur ce coup-là.

    Cependant, nous ne pouvons aborder les grands philosophes sans citer la plus grande parmi elles, celle dont l'éminente sagesse n'est plus à démontrer, nous parlons évidemment de Roselyne Bachelot qui ose, sur Canal+, un savant : "Slip ou caleçon pour les hommes ? Au moment où ils l'enlèvent, ça n'a plus d'importance."

    Ce à quoi Michel Sapin, dont on ignore de quoi il voulait vraiment parler, répondit un jour : "C'est quand c'est dur que c'est bon". Quoique en matière d'amour, tout soit dans la nuance. Une précision utile pour Claude Bartolone, spécialiste du genre : "Je n'ai pas embauché ma femme, j'ai épousé ma collaboratrice". Ah de suite, c'est plus clair et moins tordu, en effet !

    Quittons ce sujet dangereux pour revenir, et sans transition aucune, au sujet favori de Jean-Luc Mélenchon : les ignobles journalistes. Avec lui, en général, pas besoin de décrypter, le message est direct, pas subliminal du tout, pas raffiné non plus. Efficace donc. "Chaque créature vivante a ses inconvénients. Pour les vaches : les mouches. Et nous, les médias."

    Ah on voit qu'il ne connaît pas (encore) PresseLib', on va se hâter de le faire changer d'avis (ou toujours pas). Connaissez-vous Dominique Paillé du parti "Les Républicains" ? Pas encore ? Eh bien, vous retiendrez plus facilement son nom si vous l'associez à cette répartie ô combien cinglante, attention, tremblez : "Il y a trop de centristes au centre". Fiouuuuuuu... Gratinée celle-là !

    Mais si jamais, un jour, Alain Juppé devient président et qu'il m'appelle pour faire partie de ses ministres, je vous l'annonce, je refuserai tout net. Siiii, car je ne pourrai oublier sa phrase : "Le président doit laisser les autres se griller, c'est fait pour ça les ministres."

    Comment ça, aucun risque qu'il m'appelle ? Ah, tout bien réfléchi, vous avez peut-être raison... Me faire penser à lui filer mon 06... Allez, en attendant, mes 60 collaborateurs (ça la pète, ça) et moi-même nous autorisons un repos syndical bien mérité : ils préparent mon café et je file le boire.

    Mais bon, moi, j'dis ça, je dis rien...

    Gracianne Hastoy

    Commentaires


    Réagissez à cet article

    Vous devez être connecté(e) pour poster un commentaire