Ingénieur biologiste originaire des Pyrénées-Atlantiques, Romain Casadebaig s’est lancé en 2011 dans un pari un peu fou avec Pierre Lebbe, un éleveur de chèvres autodidacte en méthanisation et de son père, Robert Casadebaig, un ancien chef d’entreprise en génie civil et travaux publics : développer des solutions énergétiques et écologiques performantes à partir de la méthanisation et des fermentations. A l’époque, le Bigourdan était un précurseur dans ce qu’on appelle aujourd’hui le biogaz.
En 2016, ils créent ensemble l’entreprise Gaz de Ferme pour innover de manière responsable et locale. « Notre atout principal est notre connaissance du terrain et des besoins des agriculteurs. Nous sommes des pionniers en la matière et travaillons depuis trois ans au développement d’un procédé spécifique, avec la mise en place d’une chaîne complète de conditionnement et de distribution du dioxyde de carbone », souligne Romain Casadebaig.
Une technologie innovante…
Pendant trois ans, les trois associés mettent au point une technologie qui leur permettrait de valoriser les déchets des agriculteurs et des éleveurs locaux, notamment le fumier ou le petit lait. « On propose une offre sur-mesure aux exploitants. On leur met à disposition notre machine et en devenant co-exploitant, on s’occupe de tout le procédé de méthanisation », explique Romain Casadebaig.
Durant cette période, l’équipe s’agrandit, avec l’arrivée de trois nouvelles recrues. Les expérimentations réalisées sur l’exploitation agricole de Pierre Lebbe ont permis de développer et breveter la machine révolutionnaire de Gaz de Ferme, permettant de séparer le méthane du CO2. « Nos tests sont concluants, nous allons donc organiser une levée de fond pour pouvoir commercialiser notre machine dans les Pyrénées-Atlantiques, les Hautes-Pyrénées, le Gers et les Landes », souligne l’ingénieur.
Un déchet, trois alternatives…
Le fumier dégage naturellement divers gaz à effet de serre ou polluants tels que le méthane, le gaz carbonique, l’oxydes d’azote... qui partent directement dans l’atmosphère et amplifient le réchauffement climatique. Gaz de Ferme propose de capter ces gaz et de les valoriser comme alternative aux hydrocarbures fossiles et à la chimie lourde : le digestat à la place des engrais de synthèse et le biométhane à la place des énergies fossiles et de valoriser aussi le gaz carbonique résiduel plutôt que de le renvoyer dans l’atmosphère. Les exploitants agricoles peuvent ainsi revaloriser leur déchets et s’auto-fournir des énergies propres.
Le procédé est simple : le déchet agricole est placé dans une fosse en béton hermétique, appelée un digesteur. Avec des conditions adaptées, ce déchet fermente et produit des gaz, qui est capté par la machine de Gaz de Ferme. Une fois cette étape exécutée, le digesteur est ouvert pour récupérer les résidus (digestat), qui serviront d’engrais.
Les gaz, principalement du méthane et du CO2, recueilli par la machine sont séparés. L’épurateur permet de purifier le méthane contenu dans le biogaz, qui peut s’utiliser ensuite comme alternative au carburant des véhicules ou pour l’électricité. « Nous privilégions en priorité le biogaz pour l’exploitation, puis on étend son cercle d’action au voisinage et ensuite à la revente du surplus », indique Romain Casadebaig.
Le dioxyde de carbone est quant à lui présent dans beaucoup d’objets du quotidien, comme les sodas, les extincteurs… « Il y a beaucoup d’applications diverses et méconnues : l’utilisation du CO2 à des fins agroalimentaires, dans le traitement de l’eau, pour la soudure ou encore les activités de loisirs comme le paintball ou la plongée ». La jeune société s’intéresse également aux brasseries, aux cidreries et à la transformation vinicole, qui dégagent et/ou utilisent également du dioxyde de carbone.
Un coup de pouce avec « Les Pyrénées, Territoire d’Innovations »…
« Les Pyrénées, Territoire d’Innovations » est un dispositif de 127 millions d’euros d’investissement sur 10 ans et financé à hauteur de 23,7 millions d’euros par l’Etat. Au total, 22 projets ont été sélectionnés par ce programme commun aux Pyrénées-Atlantiques et aux Hautes-Pyrénées. À travers cet ambitieux projet, l’objectif est de faire des Pyrénées un modèle de développement équilibré, entre les trois axes du programme : les énergies renouvelables, l’agriculture et les métiers d’avenirs en Béarn, Bigorre et Pays basque.
Gaz de Ferme avait déjà fini deux volets de financement, le premier en 2016 et le second début 2019. Romain Casadebaig a entendu parler de ce dispositif. « En tant que maire de Laruns, mon père a assisté à une réunion de présentation du dispositif et a parlé de notre projet aux responsables. Ce qui est intéressant, c’est qu’il n’y a pas que de petites entreprises, mais aussi de grosses sociétés », raconte-t-il. Grâce au TIGA Gaz de Ferme prépare une levée de fonds
« Le TIGA a été l'un des premiers partenaires à croire en notre projet, ce soutien a fait la différence et grandement facilité l’obtention de notre prêt bancaire. Il nous a permis de développer notre prototype, de recruter deux ingénieurs, de déposer un brevet et de travailler sur notre R&D, tout en mettant en place notre premier appareil. A terme, nous aimerions que la vente de gaz se fasse en circuit court. Les consommateurs iraient chercher leur bonbonne de gaz chez l’exploitant, comme ils vont dans les fermes pour acheter des fruits et légumes et volailles », espère Romain Casadebaig.
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Crédits photos : Equipe Gaz de Ferme (JL Bordenave de l'agence Valeurs du Sud)
Schéma méthanisation (Gaz De Ferme SAS)
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