« J’ai fait mes études d’ingénieur à AgroParisTech, et je voulais ouvrir le champ des possibles en établissant un parallèle entre le vin et le thé. Tous deux ont un aspect social, populaire et noble » raconte le tout nouvel exploitant agricole, qui a grandi à Biarritz. « Je suis alors parti en Indonésie, au Laos et en Chine pour en apprendre plus sur le sujet. Je me suis dit qu’il serait intéressant de savoir si le thé pouvait pousser sous nos latitudes, tout en me demandant comment l’explorer en poursuivant mes études ».
La maison familiale rénovée à Argelès-Gazost lui tend les bras pour expérimenter tranquillement ses premiers plants en 2018, récupérés auprès d’un passionné qui tente lui-même l’expérience en Bretagne. Une fois ses études terminées, il se lance en 2020 dans la plantation de 3 000 théiers sur un demi-hectare.
« J’ai goûté ce printemps à mes premiers thés blancs qui sont très bons, et validés. Je me suis orienté vers une technique particulière qui consiste à laisser la feuille sécher à l’ombre et à basse température. Nous sommes ici à presque 600 mètres d’altitude, sous influence océanique, un bon climat pour faire pousser ces arbustes. Bien sûr, il y a eu une sélection naturelle qui s’est faite, ajoutée à des conditions météorologiques particulières – mes plants sont encore jeunes pour surmonter une deuxième canicule cette année – et des erreurs humaines liées à mon apprentissage. C’est un peu l’épreuve du feu… ».
Nous récoltons les bourgeons et les jeunes feuilles à la main, pour obtenir la meilleure qualité possible.
Si Lucas a choisi le thé blanc, c’est avant tout par goût personnel, bien qu’il ne s’interdise rien. Ses explorations pourront tout aussi bien l’entraîner vers du thé vert ou noir dans quelque temps. Car il faut savoir que ce n’est pas l’arbuste qui différencie les breuvages, mais la transformation de sa feuille. Celle du thé vert sera cuite, celle du thé noir écrasée et roulée pour forcer le processus naturel d’oxydation, tandis que celle du thé blanc sera simplement séchée selon différentes méthodes, pour obtenir une semi-oxydation.
« C’est un savoir-faire autour de la transformation, comme pour le vin. J’ai encore peu de feuilles, mais d’après mes premiers tests et observations, je ferai peut-être du thé blanc au printemps, et noir en été ? … Il faut compter cinq ans pour arriver à avoir un buisson à maturité, et comme je replanterai en 2024, je devrai attendre jusqu’en 2030. C’est surtout l’entretien qui demande du travail ; il faut désherber, pailler, arroser la première année… Ma mère participe aussi à mi-temps à la production autour de cette maison familiale. Nous récoltons les bourgeons et les jeunes feuilles à la main, pour obtenir la meilleure qualité possible. »
Pour l’instant en phase de recherche et développement, Lucas progresse continuellement et collectivement, en échangeant avec les autres producteurs, face à toutes les inconnues qui se présentent. Il espère obtenir 200 kilos de thé de son demi-hectare, avant de se projeter sur un hectare.
Mais une chose est déjà sûre : l’année prochaine, il proposera des visites et dégustations sur son exploitation. Ainsi, chacun pourra découvrir le goût singulier et insoupçonné du thé des Pyrénées. On a hâte !
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