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Le transport solidaire prend un nouveau virage dans les Landes

Cinq associations viennent d’unir leurs forces au sein de l’UDAMS 40 pour structurer et développer la mobilité solidaire.
Reposant sur l’entraide et le bénévolat, ce service s’adresse à celles et ceux qui ne peuvent se déplacer seuls
S. Zambon Dept 40 DR
Une réponse humaine à l’isolement, dans un département où se déplacer peut rapidement devenir un parcours du combattant.
Cinq associations ont fondé l’Union départementale d’accompagnement à la mobilité solidaire des Landes
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Dans les campagnes landaises, les distances sont parfois courtes en kilomètres, mais longues en solitude. Il suffit de s’éloigner un peu des villes, de poser un pied dans un village sans commerce, sans médecin, sans gare, pour comprendre combien un simple trajet peut devenir une épreuve. Pour une personne âgée sans permis, pour un habitant isolé sans voiture, pour une famille en difficulté, aller chez le médecin ou faire ses courses peut rapidement relever du casse-tête. Les transports publics ? Parfois inexistants ou inadaptés. Le taxi ? Trop coûteux. Le covoiturage ? Pas toujours flexible. C’est dans ce quotidien discret mais bien réel que le transport solidaire prend tout son sens.

Reposant sur l’entraide et le bénévolat, ce service s’adresse à celles et ceux qui ne peuvent se déplacer seuls, souvent pour des raisons de santé, d’âge, ou de fragilité économique. Le dispositif est simple : un appel, un trajet planifié à l’avance, un conducteur bénévole qui donne de son temps… et parfois bien plus. Car dans ces voitures, entre deux tournants, se nouent des liens, se partagent des confidences, et se rompt une solitude qui pèse autant que l’absence de transport.

Face à cette réalité, et à la nécessité de mieux coordonner les efforts déjà existants, les Landes ont décidé de prendre un virage structurant. Le mardi 3 juin à Tartas, cinq associations ont officiellement lancé l’Union départementale d’accompagnement à la mobilité solidaire 40. Une nouvelle route collective pour la solidarité sur quatre roues.

L’UDAMS 40 met la solidarité en réseau

Elles s’appellent TSEAL, Roulons solidaire Chalosse Tursan, Amitiés d’automne, Mées Roulons solidaire ou encore Roulons solidaires Azur. À elles cinq, elles couvrent déjà 142 communes du département. Mais ce jour-là, à Tartas, ces associations locales ont décidé d’écrire une nouvelle page ensemble. Avec le soutien du SAPAL (Service d’animation, de prévention et d’accompagnement des Landes), elles ont fondé l’Union départementale d’accompagnement à la mobilité solidaire des Landes, l’UDAMS 40.

L'UDAMS 40 compte proposer des formations adaptées aux bénévoles
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Cette structure, la troisième de ce type en France après la Loire-Atlantique et la Vendée, ambitionne de fédérer les énergies, mutualiser les moyens, et parler d’une seule voix auprès des institutions. Pour son nouveau président, Pierre Olivier, également à la tête de l’association Amitiés d’automne, cette union officialise une coopération qui existait déjà de manière informelle depuis plusieurs années. Selon lui, il était temps de donner un nom, une existence reconnue à ce travail collectif qui, jusqu’ici, se tissait à coups de réunions, de coups de fil et de partage de bons procédés.

Mais l’UDAMS 40 ne se veut pas une entité centralisatrice : chaque association garde son autonomie. Il s’agit d’unir sans uniformiser, de structurer sans lisser les identités locales. L’objectif, a-t-il expliqué, est d’avancer sur ce qui rassemble, tout en répondant mieux aux attentes des collectivités et partenaires.

Un coup d’accélérateur pour la visibilité et la formation

Pour Jean-Pierre Millot, président de TSEAL, l’une des pionnières du transport solidaire dans les Landes, cette nouvelle étape est pleine de promesses. Il y voit un formidable levier pour améliorer la visibilité des services, faciliter la recherche de subventions et proposer des formations adaptées aux bénévoles. Car, comme il le rappelle avec un sourire, il reste encore du chemin à parcourir.

Former les conducteurs sur la sécurité, sur les attitudes bienveillantes, sur la gestion du relationnel ou encore sur des gestes simples à adopter face à des personnes fragiles, fait partie des besoins cruciaux. Ces formations, parfois lourdes à organiser à l’échelle d’une seule association, deviendront plus accessibles et mieux coordonnées grâce à l’union.

Les conducteurs bénévoles sont 309, eux-mêmes âgés en moyenne de 67 ans
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L’UDAMS 40 souhaite aussi devenir un interlocuteur pour les collectivités souhaitant lancer leur propre service solidaire. Mutualiser les outils, harmoniser certaines pratiques, proposer des modules de formation : autant de chantiers pour les mois à venir.

Des partenaires embarqués dans l’aventure

Le jour de la création officielle à Tartas, les partenaires ont répondu présents en nombre pour accompagner l’UDAMS 40 dans cette nouvelle étape. L’Automobile Club des Landes, la Ligue de l’enseignement, Landes Insertion Mobilité ou encore le SAPAL se tiennent aux côtés de l’union pour proposer des formations, renforcer la visibilité du transport solidaire dans le territoire, compléter les dispositifs existants et soutenir les dynamiques locales avec engagement et bienveillance. Tous partagent le même constat : le transport solidaire ne remplace pas, il complète. Il ne concurrence pas, il soutient. Et il n’est pas là pour faire du chiffre, mais pour faire du lien.


Derrière les belles intentions, il y a des chiffres qui parlent. En 2024, les huit associations actives dans les Landes ont réalisé près de 10 000 transports. La moitié concernait des rendez-vous médicaux, 38 % des courses, pour un total de 226 000 kilomètres parcourus. Cela représente plus de 18 800 heures de bénévolat, soit l’équivalent de 12 temps pleins. Depuis 2016, ce sont plus de 873 000 kilomètres avalés, et près de 62 000 heures offertes au service des autres.

Les bénéficiaires sont au nombre de 1 172, avec une moyenne d’âge de 74 ans. Les conducteurs bénévoles sont 309, eux-mêmes âgés en moyenne de 67 ans. Un tissu de solidarité intergénérationnelle, souvent tissé sur fond de discrétion et d’humilité, mais qui tient chaud aux épaules de ceux qu’il accompagne.

Une feuille de route pleine d’élan

Dès à présent, l’UDAMS 40 se fixe quatre grandes priorités. D’abord, se faire connaître, à l’échelle départementale, pour exister pleinement dans le champ social de la mobilité. Ensuite, soutenir les collectivités qui souhaiteraient créer un service de transport solidaire sur leur territoire. La troisième priorité concerne la mutualisation des outils, pour gagner en efficacité. Enfin, la formation des bénévoles est vue comme la pierre angulaire du dispositif.

Mais au-delà de ces objectifs, l’UDAMS 40 veut aussi incarner une autre idée du lien social, un autre rythme, une autre manière d’habiter un territoire. En s’inscrivant dans la politique de lutte contre l’isolement social du Conseil départemental, elle entend bien devenir un maillon essentiel du maintien à domicile et de l’autonomie des personnes.

Comme l’indique le Département des Landes, « la mobilité solidaire n’a pas vocation à remplacer les transports traditionnels ni les solidarités familiales. Elle complète, elle accompagne, elle soutient. Elle repose sur des valeurs simples : solidarité, bénévolat, entraide. Et surtout, elle remet de l’humain là où les solutions techniques ne suffisent plus. »

Dans une époque qui file à toute vitesse, où chacun semble pressé, le transport solidaire prend le temps d’un détour, d’un arrêt, d’une conversation. Il remet de la chaleur dans les virages, de la présence sur les lignes secondaires. Avec l’UDAMS 40, les Landes s’offrent une structure pour aller plus loin, ensemble. Un peu comme si la solidarité avait trouvé son moteur, et que les kilomètres à venir se mesuraient autant en essence qu’en bienveillance.


Sébastien Soumagnas

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