Dans les Landes, on ne se contente pas d’espérer un futur durable : on le branche sur le présent. Le 16 juin dernier, une convention de partenariat a été signée entre le Département des Landes et Enedis, gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité. Si ce genre d’accords est courant dans les hautes sphères, celui-ci est une première nationale à l’échelle départementale. Un document qui va bien au-delà des intentions, puisqu’il formalise une série d’actions déjà mises en œuvre, avec un objectif affirmé : faire du territoire un modèle d’autonomie énergétique d’ici 2033.
On connaît l’adage : pour mieux consommer, encore faut-il bien mesurer. Grâce à cette convention, les outils d’analyse fournis par Enedis permettent désormais un suivi extrêmement précis des consommations énergétiques dans les bâtiments publics. Le simulateur de raccordement intégré au cadastre solaire des Landes, par exemple, permet aux porteurs de projets photovoltaïques de tester en quelques clics la capacité du réseau à accueillir leur installation. Autre levier, l’accès à l’Espace Mesures et Services, qui dresse un portrait en temps réel de la consommation des collèges, notamment dans le cadre du plan sobriété énergétique.
Comme le souligne le Département des Landes : « Cela nous permet de suivre de façon très fine les efforts réalisés et ce qu’il reste à faire ». Les retours sont si convaincants que d'autres départements envisagent déjà de suivre la voie landaise.
Sortir de la précarité… énergétique
Au-delà des chiffres, c’est aussi l’humain qui est au cœur de cette stratégie. Car ces données ultra localisées peuvent être partagées avec les structures de rénovation de l’habitat pour mieux cibler les foyers en situation de précarité énergétique. Une approche préventive qui mettra la technologie au service du social, et fera des données un levier pour la justice énergétique.
Dans ce territoire gorgé de lumière, les panneaux ne se limitent pas à la signalisation. Fin 2024, près de 1 200 MW de puissance photovoltaïque étaient raccordés au réseau, un volume équivalent à celui d’un réacteur nucléaire. Ce cap place les Landes en tête des départements français en matière de solaire, et ce n’est qu’un début.
Les Landes, département généreusement ensoleillé est devenu ces dernières années un territoire « pilote » concernant la transition énergétique. Entre 2020 et 2024, le nombre d’installations photovoltaïques est passé de 10 000 à 23 000, un véritable boom solaire qui alimente déjà la moitié de la consommation électrique locale.
Une autoconsommation qui fait école
Pour absorber cette énergie grandissante, il faut des réseaux à la hauteur. C’est tout l’enjeu du projet Reflex, expérimenté dans les Landes depuis 2021. Ce dispositif permet d’optimiser l’équilibre entre production et consommation, en limitant temporairement certains flux excédentaires, tout en indemnisant les producteurs.
Cette innovation locale sera d’ailleurs généralisée à l’échelle nationale dès 2025, preuve que les Landes, loin d’être un simple terrain d’essai, sont devenues un véritable moteur de la transformation énergétique française.
Dans les Landes, les électrons font aussi de la gymnastique locale. Grâce à la boucle d’autoconsommation collective, l’énergie produite sur un bâtiment (comme une salle des fêtes) peut être redistribuée vers d’autres (mairie, école, gymnase…). Cette nouvelle forme de consommation mutualisée ouvre des perspectives enthousiasmantes pour les collectivités et les citoyens : mieux produire, mieux partager, mieux maîtriser.
Une dynamique contagieuse
Ce partenariat landais n’est pas seulement pionnier, il pourrait devenir viral. Car cette convention fait figure d’exemple dans les sphères publiques comme privées, et pourrait bien inspirer d’autres collectivités désireuses de s’attaquer concrètement aux enjeux climatiques. Pour Xavier Fortinon, « ces données sont essentielles » pour construire des politiques publiques adaptées, ciblées, et durables.
Pour garantir sa réussite, un comité de suivi sera mis en place. Sa mission ? Vérifier que les engagements se traduisent en actions concrètes, mais aussi imaginer de nouveaux objets de collaboration. Autrement dit, faire de cette convention un terrain fertile pour les innovations futures.
La transition énergétique est aussi une histoire de mains. Pour répondre à la demande croissante en techniciens qualifiés, des partenariats ont été noués avec les lycées de Tarnos et d’Aire-sur-l’Adour. Une façon de créer un cercle vertueux où la montée en compétences accompagne la montée en puissance.
À bien y regarder, ce qui se passe dans les Landes, c’est tout un territoire qui se réinvente, qui prend à bras-le-corps les défis du XXIe siècle en misant sur l’intelligence collective, l’innovation et la solidarité. En devenant la première terre d’expérimentation de nombreux dispositifs Enedis, les Landes prouvent qu’un département rural peut être en avance sur son temps. Ici, on ne se contente pas de produire de l’énergie propre. On fabrique aussi du sens.
Quand un territoire solaire s’allie à un opérateur électrique, cela donne une convention qui pourrait bien illuminer les chemins de la transition écologique française. S’il reste encore du chemin à parcourir pour atteindre l’autonomie énergétique d’ici 2033, les bases sont solides, les outils sont en place, et les ambitions sont hautement voltées.
Sébastien Soumagnas
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