Il y a les soignants, en première ligne, confrontés à l’imprévisibilité d’un virus méconnu, ajoutée à l’épuisement de deux mois de lutte intense. Un quotidien sous adrénaline, dont l’effet stimulant des premiers temps s’est transformé peu à peu en hyperactivité émotionnelle, et en menace d’un burn-out par manque de repos salvateur.
Il y a tous les confinés, qui n’arrivent plus à garder la tête hors de l’eau face au flot continu d’informations anxiogènes - souvent contradictoires ou désordonnées - sur la pandémie omniprésente. Une vie privée de libertés essentielles, à ruminer derrière les fenêtres.
Le ressenti de chacun face à cette situation inédite peut considérablement varier. Il est pourtant essentiel de maintenir un bon équilibre psychique, dans le but de préserver notre immunité et d’éviter des conséquences post-traumatiques.
Des plateformes téléphoniques ont donc été ouvertes depuis le début du confinement. Au bout du fil, des bénévoles armés de mots, disponibles sept jours sur sept pour répondre aux appels anonymes et confidentiels.
Gratuites, elles s’adressent à tous ces professionnels qui affrontent au quotidien l’épidémie létale de Covid-19, mais aussi à ceux qui ne supportent plus la solitude ; ou bien au contraire la promiscuité avec leur conjoint, leurs enfants. Dans des espaces parfois minuscules, difficile de cohabiter sereinement lorsque l’insécurité, l’anxiété ou l’irritabilité gagnent…
De son côté, le Syndicat National des Psychologues rappelle dans un communiqué : « Nous nous devons de rester disponibles dans la mesure de nos moyens, pour être les garants et porteurs des prises en charge psychologiques, afin de décharger, à notre niveau, le travail des urgences (…) Ces interventions auprès des personnes atteintes par le Covid 19, de leurs proches, des soignants, des personnes et du grand public peuvent avoir plusieurs modalités : ligne téléphonique dédiée, entretiens en visioconférences ou en face-à-face avec les précautions nécessaires, groupes de parole de type débriefing ou autres modalités de soutien psychologique. »
À Auch, le Docteur Le Quang, psychiatre, a réagi très vite à l’annonce de cet état décrété de confinement précipité. Car pour certains de ses patients, l’interruption brutale du suivi aurait pu avoir des conséquences désastreuses.
« J’ai décidé d’assurer la continuité des soins et appelé tous mes patients, dont les rendez-vous étaient prévus, pour les en informer. Je me suis organisé afin qu’il n’y ait qu’une seule personne en salle d’attente, et qu’elle ne se croise pas avec celle qui sort de consultation. Je respecte la distance de sécurité préconisée lors de l’entretien, j’ai du gel hydro-alcoolique pour la désinfection des mains de tous… La plus vive inquiétude pour nous, professionnels de santé mais non prioritaires, est apparue avec la pénurie de masques, et le refus des autorités à nous en procurer. »
Le confinement a-t-il profondément impacté le moral de sa patientèle ? « Aussi surprenant que cela puisse paraître, il a été perçu comme une sorte de bénédiction, extrêmement protectrice, pour ceux qui souffrent de troubles et de harcèlement au travail, notamment. Cette obligation à rester chez eux pour se protéger -imposée et cautionnée par l’état qui plus est-, a provoqué un immense soulagement par une mise à l’écart du danger. Cette situation totalement inattendue a pu les inciter à réfléchir, et à faire un travail sur eux. »
Pour d’autres, au contraire, c’est plutôt l’angoisse de sortir du confinement qui se manifeste. Après la sidération est apparue la sécurisation, évitant tout risque sanitaire de contamination, qui va désormais disparaître avec la reprise annoncée.
« Tant que l’on n’aura pas trouvé un médicament ou un vaccin efficace, il va bien falloir admettre qu’il sera absolument nécessaire de maintenir les gestes barrières, et d’adopter des comportements qui ne seront plus les mêmes qu’auparavant. Comme pour une maladie chronique dont on souffre, avec tous les aménagements que l’on peut mettre en place pour ne pas la réactiver, il faudra apprendre à vivre avec… ».
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