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À Dax, des « Apéros de la Mort » pour dédramatiser un sujet tabou...

Le 8 février dernier, Stéphanie Chauveau et Élisabeth Détourbe recevaient une quinzaine de personnes dans un café dacquois afin de parler de la mort. Un sujet lourd, abordé par des professionnelles, afin de sensibiliser et d'apaiser les participants...
Des femmes discutent lors d'une réunion Happy End.Photo : Happy End.
C'est au nom de l'association Happy End, fondée en 2018 par Sarah Dumont, que cette rencontre a eu lieu. En France, ces rendez-vous existent dans plus d'une trentaine de villes, et elles se développent même à l'étranger, jusqu'au Canada et en Guadeloupe...

C'est en décembre 2018 que Happy End est fondé, à Paris, par Sarah Dumont. Journaliste, elle décide de créer ce média associatif qui a alors pour fil rouge le sujet de la mort, afin de dédramatiser sur le sujet, et d'informer ses lecteurs. « Je souhaitais aborder le sujet de façon moins dramatique et indépendante, et apporter de l'information au grand public sur ces thématiques sensibles mais incontournables dans nos vies. Étant donné que mission était de rendre le sujet moins tabou, j'ai eu envie d'organiser des rencontres pour libérer la parole. J'ai découvert les Cafés Mortels initiés en Suisse, et m'en suis inspirée pour lancer les Apéros de la mort », explique-t-elle. Avec une autre femme, elles commencent ainsi à animer les premiers Apéros de la Mort en région parisienne, avant que la démarche ne séduise, prenne de l'ampleur, et se développe dans 30 villes en France, et même jusqu'au Canada, en Guadeloupe, et bientôt en Belgique.

« Chaque rencontre s'articule autour de deux ambassadeurs de l'association. L'idée est que dans le binôme, l'une des personnes soit formée au sujet de la mort pour offrir un cadre sécurisé et sécurisant aux participants. Il ne s'agit pas d'être maladroit, au contraire », reprend la fondatrice. C'est finalement un cadre pour assurer la bonne tenue des rencontres, ces dernières étant très différentes les unes des autres. « La parole est donnée aux participants, s'ils le souhaitent. Ensuite, l'idée c'est de leur permettre de parler, d'échanger. Certains vont se livrer sur des expériences passées, d'autres vont poser des questions, partager leurs croyances, etc. C'est très vaste. On n'est pas là pour apporter de l'information, même si ça peut arriver ponctuellement. Et on ne parle pas que du deuil, mais bien de la mort de façon générale ».

Des discussions limitées à une vingtaine de personnes au maximum, afin de garantir là aussi un temps de parole suffisant à chacun pendant les deux heures de conversations. « C'est destiné à tous les mortels ! Il y a des jeunes, des moins jeunes, des personnes endeuillées, d'autres non, etc. On se rend compte avec nos retours d'expérience, qu'il y a un véritable besoin de parler de ces sujets, car en France on y est assez mal éduqués. On ne sait pas forcément comment réagir face à une personne qui vient de perdre un proche. C'est trop souvent passé sous silence et bannis des conversations, même avec nos proches ».

Photo : Happy End.

Récemment, la démarche est arrivée dans les Landes, du côté de Dax. « Quand je me suis installée en tant que thanadoula (professionnel qui accompagne les personnes en fin de vie et leur famille vers la mort NDLR.) j'ai entendu parler de Happy End. En lien avec mes activités professionnelles, je voulais offrir l'occasion aux personnes qui souhaitaient parler de la mort de pouvoir le faire. Alors je me suis renseignée, nous avons échangés, et ça s'est goupillé ainsi », explique Stéphanie Chauveau organisatrice du premier Apéro de la Mort dans les Landes, le 8 février dernier, avec son binôme Élisabeth Détourbe.

« Nous avons fait carton plein ! », se réjouit-elle. « Nous voulions que les gens se sentent bien accueillis et surtout apaisés à l'issue de la rencontre. C'était le plus important pour nous ». Après de brèves présentations, les participants ont été invités à écrire, sur un post-it, un mot pour exprimer leur point de vue en amont de la discussion. « Dans le café où nous étions, il y avait un beau tableau qui représentait un chemin au cœur d'une forêt. Avec l'accord de la gérante, nous avons collé les post-it à gauche du chemin. Puis, à la fin des deux heures, nous avons proposé le même exercice, pour faire un comparatif. Ce qui nous a frappé, c'est le nombre de gens qui nous remerciaient et qui se sentaient apaisés ».

Une réussite qui mène le binôme landais à reproduire l'expérience, le 4 avril prochain, toujours à Dax. « Ce premier Apéro de la Mort était un bon moment, ça s'est très bien passé, et beaucoup de gens ont souhaité revenir », précise Stéphanie Chauveau qui imagine pouvoir développer ces rencontres notamment dans le Béarn ou au Pays basque. « C'est l'idée ! », reprend Sarah Dumont. « Nous souhaitons continuer à dispatcher les Apéros de la Mort en France et dans d'autres pays francophones. Mais le plus compliqué reste de trouver des gens informés et qualifiés pour parler de la mort », concède-t-elle.

En attendant Happy End propose également d'autres types de rendez-vous, plus spécialisés pour les veuves, orphelins, et personnes endeuillées, toujours avec des noms relativement gays et légers, afin de « rendre le sujet plus lumineux, et de faire vivre la vie dans la mort ».

Timothé Linard

Plus d'informations sur l'association Happy End

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