C’était en 1985. Depuis le producteur landais a pris quelques rides, mais la passion pour ce produit noble demeure intacte, et son savoir-faire, inégalé. « Juste avant de se lancer dans la production de framboises, mon père a rencontré des producteurs dans l’est de la France. Il a ensuite appris sur le terrain et m’a enseigné ce qu’il savait. Quand mon tour est arrivé, j’ai fait des tests, tenté des choses qui se sont avérées payantes ou non. Pour finir, les producteurs sont comme les cuisiniers et les pâtissiers : chacun a sa petite recette pour un produit de qualité », souligne Philippe Sébi, 57 ans.
Au cours des 37 dernières années, le producteur landais a développé la production. Aux huit hectares de vigne se sont ajoutés une centaine de plants d’agrumes de collection qui s’épanouissent sous une serre froide, mais hors gel (du yuzu notamment). « Nous avons toujours eu des plantations un peu extraordinaires, comme le cassis, la prune de Californie ou la fraise des bois [arrêtés depuis les années 1990]. Pour mes 50 ans, j’avais envie de connaître de nouvelles sensations. Je suis un planteur curieux de nature. Quand je n’ai pas le moral, je vais dans cette serre, je vois, je sens, je touche les fruits et ça me rend heureux. C’est magique ! », confie-t-il.
Le producteur de framboises a également installé ses framboisiers dans des serres non chauffées, en système hors-sol, afin d’éviter les maladies et les aléas climatiques. Afin de varier les plaisirs, la ferme Gnigue a planté en 2017 quelque 140 pieds de grenadiers de neuf variétés différentes. Un pari pour le moins osé !
Depuis l’an dernier, Philippe Sébi travaille avec son fils Valentin, 22 ans. La troisième génération perpétue ainsi l’exploitation familiale, tout en apportant sa pierre à l’édifice. « Nous avons planté 1.000 m2 de fraisiers. Ça complète très bien notre production de framboises et ne nous demande pas autant d’entretien que ces dernières. Sur un coup de tête, nous avons également réaménagé une ancienne étable laissée à l’abandon depuis 20 ans. Nous avons créé notre boutique gourmande, pour recevoir les consommateurs et nos collaborateurs et faire découvrir nos produits et ceux de producteurs du coin. »
L’ancienne Étable vend ainsi les glaces et sorbets des Givrés des prés, les bières Micromegas, les vins du Tursan, le Gin40, l'armagnac du domaine du Berdet, le miel Apis Mellona, ou encore le tonic Archibald.
Pour Philippe Sébi, cette année a été particulière : « 2022 n’est pas du tout une bonne année pour les framboises. À l’état naturel, le framboisier pousse dans la lisière des bosquets. Il a donc besoin d’ombre et d’un minimum d’humidité. À cause des sècheresses estivales, la plantation a souffert, framboises ont muri plus vite, et sont donc plus petites. Mais ce genre de situation forge le mental et nous permet d’apprendre ».
Un produit de qualité reconnu
Sur 35 hectares, Philippe Sébi s’occupe de ses framboises avec amour et technicité. La récolte de la framboise a lieu de mai à novembre et le reste du temps, il entretient les plants, une tâche qui demande autant de travail que la première, voire plus. Mais le père et le fils ne se donnent pas autant de mal pour rien, et le résultat est magnifique : des grosses framboises (entre 8 et 10 grammes tout de même) juteuses et très parfumées.
Les framboises du Tursan ont d’ailleurs tapé dans l’œil de grands chefs landais (entre autres), à l’instar du voisin Michel Guérard (Les Prés d’Eugénie, restaurant trois étoiles Michelin), Jean Coussau (Le Relais de la Poste à Magescq, deux étoiles Michelin), Christophe Dupouy (les Clés d’Argent à Mont-de-Marsan, une étoile Michelin) et Yannick Duc (Le Hittau à Saint-Vincent-de-Tyrosse une étoile Michelin).
Nous ne sommes pas des héros, seulement des producteurs...
D’autres part, Philippe Sébi fait partie du Collège culinaire de France depuis 2016. Il s’agit d’une association créée par quinze grands chefs restaurateurs tels qu’Alain Ducasse, Joël Robuchon, Thierry Marx, Yannick Alléno, Régis Marcon et Alain Dutournier. L’association rassemble ainsi des chefs et des producteurs qui souhaitent représenter, promouvoir et transmettre l’identité de la cuisine française. Les framboises du Tursan ont même été servies à la table du G7 à Biarritz au Palais d'Eugénie (en 2019).
« C’est une reconnaissance de mon travail, mais nous ne sommes pas des héros, seulement des producteurs. Enter dans ce club m’a beaucoup apporté humainement. J’ai pu rencontrer des personnes passionnées, comme moi, par leur métier et c’est très enrichissant. J’ai noué des liens profonds avec les membres fondateurs, qui vont au-delà des relations entre simples fournisseurs », assure modestement Philippe Sébi.
Ce passionné intarissable est toujours aussi amoureux de son produit, il aime les choses simples, comme déguster ses framboises juste après les avoir cueillies, ou les retrouver dans une tarte, une crème brulée ou un tiramisu. À partir de ses framboises, l’exploitation fait de la confiture, de la bière et de l’eau de vie à la framboise, des pickles, des framboises au vinaigre… Philippe Sébi et son fils ne manquent pas d’idées pour sublimer leur produit.
En plus d’être gourmande, la framboise est excellente pour la santé. Cette baie rouge-rosée est l’un des fruits qui possède la densité minérale la plus élevée (avec 1300 mg de minéraux pour 100g), mais aussi du magnésium, du calcium, du fer, des antioxydants, de la vitamine C. La Framboise possède, dit-on, des propriétés cardio protectrices, anti-cancer (de l'œsophage, du côlon ou encore de la prostate), anti-diabète et ralentirait le vieillissement cutané. Vous avez besoin d’autres arguments pour succomber à votre gourmandise ? Eh bien pas nous !
Noémie Besnard
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