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L'INFO INCONTOURNABLEObservations et réflexions sur l’état des vignes à la cave de Crouseilles

Marie-Laure Plumejeaud, technicienne viticole, dresse pour PresseLib’ un premier constat sur une période particulièrement éprouvante, entre gel, grêle, et sècheresse. Avec quelques pistes pour améliorer à l’avenir le bien-être de la vigne.
Photo de Marie-Laure Plumejeaud dans les vignes

L’année 2022 restera marquée par des conditions météorologiques qui ont sérieusement mis à mal les cultures, confrontées à un stress hydrique qui n’en finit pas de durer. Comment la vigne a-t-elle résisté dans la région ? Comment sera le vin issu de vendanges précoces étant donné la situation ? Comment envisager l’avenir avec des prévisions qui misent sur des étés de plus en plus secs ?...

« Nous avons eu effectivement beaucoup d’intempéries, entre le gel de printemps et la grêle du 19 juin qui a touché 350 hectares sur les 900 que nous vinifions à la cave de Crouseilles. Certaines parcelles ont été touchées, entre 10 et 100%, et une centaine d’hectares ne seront pas du tout récoltés cette année » explique Marie-Laure Plumejeaud.

« Le phénomène de sècheresse a surtout impacté les jeunes parcelles, dont les racines peu implantées ne peuvent pas aller chercher l’eau en profondeur. Sur les 30 à 50 hectares concernés, il y a eu souffrance, avec des feuilles qui sont tombées et n’ont plus nourri le raisin. Dans ces conditions, les grains commencent à sécher, et le processus de maturation se bloque. On risque d’avoir encore des surprises l’an prochain avec la mise en réserve - la capacité de la vigne à redonner tout son sucre -, mais sans compromettre pour autant la plantation des parcelles ».

La technicienne viticole rassure toutefois en constatant que, globalement, le reste du vignoble a bien résisté. Finalement, les raisins sont plutôt concentrés et sains, car, en l’absence de pluie et d’humidité, le développement de champignons obligeant parfois à rentrer le raisin avant la date de maturité optimale a été évité. Cette année, cette pleine maturité laisse présager de belles extractions de tanins, et des degrés pas trop élevés malgré l’ensoleillement particulièrement intense.

Avec quinze jours à trois semaines d’avance, les vendanges battent leur plein, y compris pour les Madiran. Mais le rendement s’annonce d’environ 30% inférieur à la normale, entre gel, grêle et sècheresse. 

L’idée est donc de partir sur des méthodes culturales qui vont permettre de conserver l’humidité et l’eau dans le sol 

Comment envisager aujourd’hui le futur, alors que les prévisions à venir ne sont en rien rassurantes concernant la pénurie d’eau ?

« En fait, la vigne n’a pas de gros besoins, il lui faut plutôt des apports réguliers. L’idée est donc de partir sur des méthodes culturales qui vont permettre de conserver l’humidité et l’eau dans le sol, comme l’implantation de couverts végétaux, par exemple, c'est-à-dire un mélange de moutarde, trèfle, vesce et féverole entre les rangs, que l’on viendrait simplement broyer. Alors que jusqu’ici, on avait plutôt tendance à les arracher, pensant qu’ils faisaient concurrence à la vigne en pompant l’eau à sa place. Or, on s’est rendu compte que le fait de protéger le sol avec un végétal permet au contraire de conserver l’humidité et l’eau, et surtout d’abaisser sa température » explique la spécialiste.

La résistance des vignobles du Sud-Ouest comme Madiran, Pacherenc, Jurançon, Irouléguy ou Tursan, vient aussi du fait qu’ils restent plus arrosés que leurs voisins du Sud-Est ou du Bordelais, avec 800 à 1 500 millimètres de précipitations. Aux conditions océaniques, s’ajoutent des sols argilo-limoneux protégés par la chaîne des Pyrénées. « La particularité de l’argile est de retenir l’eau et de la restituer progressivement tout au long du cycle. Ce qui est quand même particulièrement intéressant par rapport à un sol sableux par exemple ».

Il ne reste plus qu’à patienter encore quelque temps, pour découvrir enfin la robe, le nez et la bouche de ces vins de caractère choyés, entre mer et montagne, par des vignerons passionnés.

Marielle Fourcade

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