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DÉCRYPTAGEPourquoi les Français pourraient se retrouver au bout du rouleau ?

Jusqu’où va se nicher la pénurie ? Voilà qu’est annoncée une éventuelle pénurie de… papier toilette. La faute à la guerre en Ukraine, qui a décidément bon dos, au manque de containers, de cargos, et surtout de pâte à papier.
Photo d'un rouleau de papier WC

Il est vrai que dans le cadre des punitions infligées à la Russie, interdiction a été décrétée d’importer du bouleau russe, l’arbre national chéri du pays. On affirme même qu’un Slave, lorsqu’il est d’humeur mélancolique, l’enlace et se met à pleurer… Que son tronc est associé au corps d’une jeune femme, que ses branches étalées rappellent ses tresses. C’est dire son importance ! Sur ces considérations poétiques, passons à ce qui nous passionne : l’état de notre stock de papier toilette.

Bien qu’on ne se soit jamais intéressé au phénomène, il n’est pas inutile de savoir que le papier WC est fabriqué à partir de la pâte à papier, donc de fibres de bois. Lequel connaît en ce moment une jolie hausse, due à une demande élevée et à une offre restreinte, because Russie–Ukraine. D’où une augmentation de ladite pâte de 50 % en seulement un an. Qu’une tonne de produits en papier nécessite 11,5 gigajoules d’énergie (de quoi faire 11 500 pots de café). Et que chaque Français en consomme environ 7 kilos par an, soit 450 000 tonnes à l’échelle nationale.

Pour ne rien arranger, le coût des transports, en particulier maritime, s’est lui aussi envolé. Idem pour le gaz, une énergie qui entre pour 30 % dans le prix du produit, qui devient de plus en plus précieux, à près de 120 euros par mégawat-heure. La conclusion est apportée par Paul-Antoine Lacour, le délégué général de l’Union française des industries des cartons, papiers et celluloses (Copacel) : « une pénurie de papier hygiénique, d’essuie-tout et de mouchoirs en papier n’est pas à exclure. » Ben, mon colon !

De fait, en cas de manque d’énergie, les usines n’auront d’autre solution que de réduire leur cadence, voire de mettre la clef sous la porte, provoquant d’un côté une pénurie de papier et de l’autre une augmentation de son prix. Ainsi en Italie, les entreprises papetières ont déjà stoppé leur production, avec un prix du gaz multiplié par dix depuis un an. On n’en est heureusement pas là en France, bien que Michel-Edouard Leclerc ait prévenu que « dans tous les rayons, ça va bouger entre 0,56 et 15 %. En moyenne, c‘est +3,5 % dans tous les magasins de France, sur les 2–3 mois qui viennent. » Voilà qui va encourager le consommateur à constituer des stocks, d’où des rayons vides et l’illusion d’une pénurie, qui n’existe pas, comme le précise Leclerc : « Je n’anticipe pas de pénurie importante, sauf si les consommateurs la déclenchent eux-mêmes en surstockant. » Une approche partagée par Lidl, qui recommande de limiter ses achats.

Néanmoins, anticipons : en cas de crise, des solutions alternatives existent, peu emballantes, comme l’usage de la douchette WC (de 11 à 80 euros, mais à hygiène douteuse). Ou celle du bidet (0,56 litre par minute, contre 287 litres pour produire un rouleau de papier toilette). Nos lecteurs les plus ingénieux, ou les plus écolos, pourront également fabriquer leur propre papier toilette en choisissant de réutiliser le papier, ou plutôt le tissu, en le lavant après utilisation.

Oui, on en est là à l’orée du XXI siècle !

Dominique Padovani

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