Au mois d’avril, Airbus n’a pu livrer que 14 avions, alors qu’il était sur un rythme de plus de 70 appareils avant la crise sanitaire. Le premier constructeur mondial a ainsi subi de plein fouet l’arrêt quasi-total du trafic aérien et le retour à la normale pourrait prendre beaucoup de temps.
L’association internationale du transport aérien (IATA), qui fédère 290 compagnies assurant plus de 80% du trafic mondial, a estimé que ces dernières perdront 314 milliards de dollars de chiffre d’affaires cette année. Les États ont été appelés à la rescousse, pour éviter la faillite d’un grand nombre d’acteurs. L’enjeu est de taille puisque les compagnies aériennes emploient 2,7 millions de personnes dans le monde, et 25 millions d’emplois en dépendent indirectement, en particulier dans la filière aéronautique.
Du coup, le réseau de sous-traitants de l’aéronautique se retrouve dans une situation très difficile avec de lourds problèmes de trésorerie et une absence totale de visibilité. Il faut savoir que 80% des entreprises, réunies au sein du Pôle de compétitivité Aerospace Valley, comptent moins de 50 salariés.
Patrick Désiré, DG d’Aerospace Valley, a récemment affirmé que les adhérents engagés dans la conception de pièces souffriraient moins que les fabricants sur plans. Ce qui tendrait à montrer que les efforts entrepris ces dernières années par nombre de sous-traitants pour étendre le champ de leurs prestations à la conception leur permet de mieux résister aujourd’hui. Le Pôle de compétitivité encourage les entreprises à identifier de nouvelles opportunités de diversification, y compris en dehors de la filière aéronautique, afin de réduire leur dépendance à celui-ci. Nombre d’entre elles disposent de savoir-faire largement exploitables dans de nouveaux champs d’activité.
Aerospace Valley a déjà relayé un appel à manifestation d’intérêt du cluster d’innovation défense « CI-AILE », qui touche à une douzaine de « besoins exprimés par des unités du Ministère des Armées dans le domaine de l’aéromobilité ».
Dans la filière aéronautique, on savait déjà que le futur passerait par des avions plus propres. Les grands donneurs d’ordres et équipementiers du secteur sont ainsi engagés depuis de nombreuses années dans l’important programme européen Clean Sky. Le pôle Aerospace Valley accompagne d’ailleurs les entreprises désireuses d’y participer.
Pour la période 2014-2020, 4 milliards ont été investis dans la recherche de solutions plus écologiques, pour moitié par la Commission européenne. On peut également citer le récent exemple du lancement d’un projet de filière biocarburants régionale, à l’initiative de Safran Helicopter Engines, d’Euralis, d’Aerospace Valley et d’autres. Lire notre article – cliquez ici
Mais bien sûr, il faudra sans doute aller plus loin, et laisser du temps au temps pour que les grands projets se concrétisent, vraisemblablement à partir de 2030.
Une série de mesures très attendues…
L’enjeu du plan que doit annoncer le président de la République est à la fois d’apporter des mesures d’urgence pour éviter un désastre dans la filière, et de préparer l’avenir pour préserver la position de leader de l’aéronautique française.
Ainsi, le chômage partiel pourrait être prolongé pour permettre aux entreprises de tenir le coup jusqu’à la relance du trafic aérien et la reprise des livraisons d’avions par Airbus. Ce qui pourrait prendre un à deux ans. Cette mesure devrait être accompagnée d’un vaste programme de formation pour permettre de renforcer les compétences des salariés, mais aussi d’aides importantes concernant les formations en alternance.
Autre volet de ce plan, la création d’Aerofund IV, un fonds d’environ un milliard d’euros pour secourir les PME (petites et moyennes entreprises) en danger, mais aussi des ETI (entreprises de taille intermédiaire). Il serait abondé par l’Etat, par BPI France et par les grands donneurs d’ordres (Airbus, Safran, Dassault, Thalès…). Ce fonds s’accompagnerait d’incitations à effectuer des rapprochements entre sous-traitants.
Parallèlement, le gouvernement devrait mettre sur la table des moyens pour accélérer le développement des avions « verts », en dopant notamment la recherche concernant les carburants alternatifs, et les motorisations hybride, électrique ou à hydrogène.
Enfin, des achats d’avions militaires pourraient être anticipés par le ministère des Armées. Ce qui apporterait un ballon d’oxygène à Dassault ainsi qu’à Airbus (ravitailleurs et A400 M).
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