Après le « Pipe, chien » de Francis Jammes l’an dernier, on vous parle cette année de Mouti, le chat imaginé dans les années 20 par Charles Derennes, qui avec Margueritte et Rosny jeune a contribué à faire connaître le séjour d’Hossegor.
Natif de Villeneuve-sur-Lot, Charles Derennes (1882-1930) a beaucoup écrit sur les Pays de l’Adour, qui servent de cadre à plusieurs de ses textes, tels « Cassinou va-t-en guerre », « Le Pèlerin de Gascogne », « Amours basques » ou encore « La Petite Faunesse ». Il a également une solide réputation de poète. On notera en particulier son recueil de poèmes en occitan, intitulé « Romivatge ».
Derennes était un écrivain particulièrement prolifique. On lui doit une quarantaine de romans, de récits et d’essais, ainsi qu’une dizaine de recueils de poèmes, le tout écrit en seulement 26 ans, de 1904 à sa mort. L’œuvre est certes inégale, mais assez typique et d’une légèreté souvent savoureuse.
L’auteur est surtout connu pour son « Bestiaire sentimental », trilogie singulière née des relations nouées par l’enfant Derennes avec les animaux de son quotidien. « Emile et les autres », troisième volet de cette série d’essais originale, a obtenu le Prix Femina en 1924, avec notamment un très beau portrait de la grenouille Zompette. En marge de cette trilogie, Charles Derennes a également publié dans le même esprit « L'Enfant dans l'herbe », un très touchant livre de souvenirs.
Le chat dans toute sa splendeur…
Mais pour changer un peu et sortir de la région, on vous dit plutôt quelques mots de « Mouti, chat de Paris » et de sa suite, « Mouti, fils de Mouti », deux petits romans parus en 1926 et 1927, respectivement chez Albin Michel et aux Éditions de La Nouvelle Revue critique. Mouti, c’est le chat vu par un Derennes gentiment sarcastique, c’est-à-dire un « bâtard d’angora » aussi fier qu’épris de liberté.
Au passage, ces romans se servent volontiers de l’animal pour se moquer des hommes ses maîtres. Ceux du premier Mouti sont une jeune fille et son père que dans son mépris tout aristocratique, le minou aime à qualifier intérieurement de « petite esclave » et de « vieil abruti ». Las, Mouti 1er fugue pour jouir de son indépendance, se trouve une minette et s’installe au Jardin des Plantes, où il fait la connaissance de ses cousins les fauves, qu’il s’amuse à narguer. Bien entendu, il lui faudra se livrer à quelque bagarre avec un congénère pour asseoir sa réputation, puis plumer les canards d’un bassin pour se sustenter. L’animal passe ainsi par toute une série d’amusantes péripéties.
Le second roman, dans la même veine, narre les aventures du rejeton de Mouti, quant à lui d’un caractère plus pacifique, assez en tout cas pour papoter avec une souris au lieu d’en faire aussitôt son quatre-heures. L’ensemble est léger, se lit tout seul et fait passer au lecteur un agréable moment. Nos deux Mouti feront donc des compagnons parfaits pour une lecture estivale sortant un peu de l’ordinaire.
Le seul problème, avec Charles Derennes, c’est que ses œuvres sont assez peu rééditées et que certaines, comme nos deux Mouti, sont assez difficiles à trouver en dehors des bibliothèques de la région, de sites web comme Gallica ou de marketplaces comme eBay ou Rakuten, à des prix plus ou moins excessifs. Plusieurs s’achètent au format numérique sur les plateformes de gros e-commerçants. On souhaite donc une bonne chasse aux grands lecteurs d’auteurs d’ici, en attendant qu’une maison d’édition du coin ait la bonne idée de se repencher sur l’œuvre de Derennes…
On se souvient que les Éditions Yago (de Capbreton) avaient republié « Le Pèlerin de Gascogne » en 2006. Tout récemment, les jeunes « Éditions du 26 octobre », établies à Billère, ont également fait paraître « Le Peuple du Pôle », un autre roman fort singulier de l’auteur, dans un genre mêlant le merveilleux et l’imagination scientifique.
On notera pour finir que Charles Derennes, écrivain animalier par excellence, fait l’objet d’un ouvrage de Jean-Louis Lambert publié en 2004 par l’association littéraire des Amis du lac d’Hossegor. L’occasion de mieux connaître un écrivain singulier qu’on aurait tort d’oublier…
Plus d’informations sur le site des Amis du lac d’Hossegor et sur le site des Editions du 26 octobre
Déjà paru cet été
- « Chez nous » avec Joseph de Pesquidoux – cliquez ici
- « Le Capitaine Fracasse » avec Théophile Gautier - cliquez ici
Pour relire les cahiers de vacances de l’été 2020
- Eugène Casalis et ses Souvenirs – cliquez ici
- Alexandre Dumas et Les trois mousquetaires – cliquez ici
- Gustave Flaubert, des Pyrénées à la Corse – cliquez ici
- Jean-Louis Curtis et Les Forêts de la nuit – cliquez ici
- Stendhal et son Voyage dans le Midi – cliquez ici
- Angelo de Sorr et Les Pinadas – cliquez ici
- Francis Jammes et Pipe, chien – cliquez ici
- Paul Margueritte, Sous les pins tranquilles – cliquez ici
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