Abonnez-vous
    Publié le

    RENCONTRELa fabuleuse et méconnue histoire du Bataillon de Joinville à Pau

    L'Assonnais de 74 ans, Jean-Claude Raufaste, a décidé de rendre un vibrant hommage à la légendaire et magistrale école, installée à Pau de 1941 à 1966.
    Jean-Claude Raufaste et son livre Joinville à Pau le Hameau, 1941-1966.
    La renommée sportive de Pau est bien établie. Terre de rugby, de football, de canoë-kayak, d'escrime, de handball, de vélo… elle a plus d’une corde à son arc. Mais, une part de cette histoire sportive reste encore peu connue : celle du Bataillon de Joinville.

    Jean-Claude Raufaste est tombé amoureux de la course à pied très jeune. Seul ou avec des amis, il enfilait très régulièrement son short et ses baskets pour courrir à une époque où ce sport n’était pas aussi populaire que maintenant.

    « Mes parents ne voulaient pas que je pratique un sport, afin de privilégier mes études. Je suis né et j’ai grandi en pleine campagne ». Dès cinq ans, il parcourait chaque matin deux kilomètres pour se rendre à l’école. Ça lui a appris le goût de l’effort. « Quand j’étais petit, mon père avait acheté une radio. C’est ainsi que j’ai entendu parler du marathon. C’est devenu un besoin, un style de vie et un rêve », raconte-t-il.

    Après un premier livre sur son sport favori (La passion du cross-country de 1837 à 2018), l’ancien sportif de haut niveau a décidé de rendre un vibrant hommage à la légendaire et magistrale École de Joinville, qui enseigna auprès de ses soldats ses concepts de renommée mondiale durant 25 ans, de 1941 à 1966.

    Après de nombreuses années de recherche, l’ancien responsable comptable et financier dans la grande distribution a finalement publié « Joinville à Pau le Hameau 1941-1966 » en septembre 2023, racontant une histoire aussi fabuleuse que méconnue.

    « L’Ecole de Joinville avait pour mission de former tous les militaires de son époque, à travers la pratique de l’escrime et des sports de combat, en lien avec l’armée. Ils ont formé des cadres militaires, mais aussi des civils, tels que des instituteurs. Le bataillon de Joinville est une unité militaire de l’armée française accueillant des appelés sportifs », présente l’auteur.

    Le sport a toujours été une de vos passions, mais d’où vous vient cette envie d’écrire sur ce sujet ? 

    Jean-Claude Raufaste- J’ai toujours aimé lire et j’avais beaucoup de facilités en littérature pendant mes études. J’avais cependant un peu perdu de vue l’écriture, jusqu’au jour où un ami m’a demandé d’écrire ma première préface pour son livre sur le Tour pédestre du Béarn. Il a fallu que j’étudie la construction d’un livre, les intentions de l’auteur, son cheminement, sa façon d’écrire… ça a été difficile pour moi au début, j’ai dû jeter une trentaine de versions et je butais souvent sur l’orthographe des mots. Petit à petit, j’ai retrouvé mes marques. Pour écrire, il faut que l’histoire me passionne, il me faut un moteur. Ma grande satisfaction, c’est de trouver le mot juste pour exprimer mon idée. 

    Comment avez-vous été amené à écrire un livre sur le bataillon de Joinville ?

    J-C.R - Fin 2018, je venais d’écrire un livre intitulé La Passion du Cross-country, de 1837 à 2018, qui avait fait l’objet d’un article dans la presse locale. Ce dernier a attiré l’attention d’un ancien ami d’enfance qui faisait partie du comité d’Aquitaine des Joinvillais. Il m’a contacté pour savoir si j’étais intéressé par le projet de raconter l’histoire du Bataillon de Joinville à Pau. En mars 2019, j’ai participé au dépôt de gerbe au pied du Monument situé à une entrée du Stade du Hameau à Pau lors de la commémoration « Joinville à Pau », j’avais pu lire le nom du colonel de Fornel ainsi que celui de l’École de Joinville. D’un naturel curieux, j’ai voulu tout de suite en apprendre davantage. 

    Au travers des archives et des témoignages que j’ai pu avoir, j’ai découvert une histoire extraordinaire et incroyablement peu connue des Béarnais. Fermée en 1939 à cause de la Seconde Guerre mondiale, cette institution basée à Joinville-le-Pont (en région parisienne) décide en 1941 de se délocaliser en zone libre dans différents établissements civils et militaires. Au vu de son histoire militaire et sportive et de son climat doux, leur choix s’est rapidement porté sur Pau. Entre 1941 à 1966, l’École de Pau le Hameau a accueilli 380 athlètes venus de la France entière et y forma des cadres de valeur dont certains occupèrent des postes à responsabilité dans de nombreuses institutions et structures.

    Pourriez-vous nous en dire plus sur le quotidien de ces appelés à part entière.

    J-C. R- 380 jeunes sportifs de haut niveau ont fait leur formation militaire à Pau. En plus des archives, j’ai pu recueillir des témoignages de Joinvillais recrutés au Bataillon de Joinville au Hameau de Pau pour accomplir leur service militaire. Avec l’arrivée en 1963 du Bataillon de Joinville, qui forme militairement les meilleurs athlètes de France pendant leur service militaire.

    Au-delà de l’enseignement militaire de base, ils bénéficiaient d’un régiment particulier par rapport à d’autres appelés, avec un quotidien plus simple. Après la période des classes (trois mois), où ils étaient des appelés comme les autres, on les bichonnait : une double ration de nourriture, pour certains, la liberté de s’entrainer comme ils l’entendaient, et la création d’une section spécifique de cyclisme. Ils avaient quand même une vie plaisante. Pendant un an et demi, le but était d’en faire moins des futurs soldats que des champions. Ils étaient la semaine dans le bataillon et repartaient le week-end pour disputer des compétitions.

    Quel témoignage vous a le plus marqué ?

    J-C.R - C’est sans doute celui d’un Joinvillais qui est arrivé au Hameau en 1963 pour s’occuper de fournir aux athlètes le matériel dont ils avaient besoin en préparation des Jeux olympiques. Son passé est hors du commun : cet Hendayais avait 15 ans sous l'Occupation. Avec son père, ils ont réussi à apporter des documents très confidentiels au gouvernement déplacé à Bordeaux, qui ont ensuite été envoyés au réseau de la Résistance, basé à Londres. C’était un acte très courageux, car il risquait le peloton d’exécution s’il était pris par les Allemands. Il a par la suite participé à toutes les campagnes militaires françaises. Notre rencontre m’a beaucoup marqué.

    Fédération nationale de Joinville à Pau

    Quelles étaient les relations entre le Bataillon de Joinville, la ville et ses habitants ?

    J-C.R - Le colonel de Fornel a dirigé la construction du Stade du Hameau en 1949. Avant d’héberger les matchs des Vert & Blanc et d’acquérir sa notoriété, ce stade de dimension olympique a été mis à disposition des jeunes appelés sportifs pour leurs entrainements. C’est d’ailleurs eux qui l’ont construit à la pelle et à la pioche. Une anecdote : ils faisaient de petits spectacles pour se payer des sacs de ciment. Tous les sportifs rêvaient de faire partie du Bataillon de Joinville. Les fédérations sportives n’étaient pas aussi bien organisées que maintenant. Rejoindre ce bataillon, s’était pourvoir s’entrainer dans de bonnes conditions, avec un cadre rigoureux. C’est un peu comme l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP), l’héritier du Bataillon, aujourd’hui. Son aura était très présente dans l’esprit des jeunes. On voyait souvent les cyclistes du Bataillon s’entrainer sur les routes béarnaises. De plus, beaucoup d’athlètes Joinvillais étaient originaires du Béarn, donc quand ils rentraient dans leurs familles, ils parlaient de leur quotidien. Mais malheureusement, l’histoire s’est un peu perdue avec le temps.

    Pour vous, ce livre est avant tout un devoir de mémoire…

    J-C.R - C’est exact. Mon objectif est avant tout laisser une trace de cette période pour les générations futures. Pas mal de choses ont été écrites sur le bataillon de Joinville, mais il n’y avait pas de récits complets des évènements. C’est pour ça que j’ai voulu retracer chronologiquement l’histoire de l’École de Joinville et les raisons de son installation à Pau. À l’approche des Jeux olympiques de Paris 2024, c’était la parfaite occasion de rappeler que de très grands noms sont venus faire leur service militaire au Bataillon de Pau tous sports confondus : on peut notamment citer les coureurs cyclistes Lucien Aimar, Pierre Trentin et Daniel Morellon, le perchiste Hervé d’Encausse, le rugbyman Jean Gachassin… C’est en résident de 1963 à 1966 sur le site de Pau le Hameau, celui-ci connaîtra également ses heures de célébrité. Le Bataillon de Joinville a obtenu 43 médailles olympiques, 312 titres mondiaux civils et militaires et 952 titres nationaux ou internationaux.

    Toujours aussi passionné et actif, Jean-Claude Raufaste est en train d’écrire un nouveau livre autobiographique sur l’expérience du marathon.

    Propos recueillis par Noémie Besnard

    Commentaires


    Réagissez à cet article

    Vous devez être connecté(e) pour poster un commentaire

    À lire aussi