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GENS D’ICIEn panne de moutarde ? Filez chez la famille Maestrojuan

À Ayguetinte, au domaine viticole Entras, père et fils perpétuent la production de ce condiment, selon une recette ancestrale confiée par un vieux boucher de campagne. Alors que la pénurie actuelle affole les consommateurs, direction le Gers, pour éviter qu’elle ne nous monte au nez.
« C’est de la folie ! » s’amuse Michel Maestrojuan père, quand on lui demande si la pénurie de moutarde se fait ressentir jusque dans les campagnes gersoises.

« Depuis que le Canada a fait une très mauvaise récolte l’an dernier, le succès de la moutarde de Gascogne est en pleine croissance. On est en train de faire des allocations, comme pour le grand vin ! On en avait produit comme d’habitude, environ 4 000 pots pour les clients et 500 pour les restaurateurs, mais elle se vend beaucoup plus vite. Il va falloir prévoir d’en refaire après les vendanges ».

Car en terre gersoise, c’est le moût de raisin Ugni blanc, cépage incontournable en Armagnac, qui vient se mêler aux graines de Brassica nigra pour donner à la Moutarde de Gascogne cette saveur spécifique, entre fraîcheur végétale et piquant adouci, sans aucune pointe d’amertume. Et nulle trace de vinaigre, de colorant ou de conservateur.

Fins connaisseurs, les moines de Flaran inscrivaient déjà sur leur liste de courses en 1788 : “Acheter de la moutarde d’Ayguetinte”. Car dès le 15e siècle, mais surtout depuis le début du 19e siècle et jusque dans les années 50, elle était essentiellement produite à Ayguetinte et Bezolles. Très réputée, elle était vendue sur les marchés du Grand Sud Ouest, et même à l’étranger. Mais au fil du temps, l’activité est tombée en désuétude.

J’ai retrouvé la formidable moutarde de mon enfance

Comme pour toutes les meilleures choses, il a fallu un groupe de passionnés – dont Michel Majestrojuan fait partie - pour lui éviter de disparaître à tout jamais. Après la constitution en février 1996 de l’Association de Sauvegarde des Moutardes Traditionnelles de Gascogne, la première fabrication commerciale sera réalisée au CRITT (centre régional d'innovation et de transfert de technologie) d’Auch en novembre 1998.

La marque “Moutarde de Gascogne” est alors déposée, suscitant la curiosité des consommateurs, et l’engouement des grands chefs cuisiniers, parmi lesquels André Daguin –déclarant lors des premières dégustations confidentielles “J’ai retrouvé la formidable moutarde de mon enfance” - et Bernard Ramounéda.

« Nous sommes les seuls aujourd’hui, avec Michel Delaère, de Bezolles, à travailler ensemble pour l’association, qui en est la fabricante. Mon fils, Michel, rêve de faire pousser directement des graines sur la propriété. Mais il a d’autres préoccupations pour l’instant, puisqu’il a tout passé en bio. Il y a un travail fou, car il faut être techniquement très bon, et disponible sur le terrain sans relâche » explique Michel père, aujourd’hui à la retraite mais toujours très présent sur l’exploitation.

Pourtant, qui sait s’il ne faudra pas prévoir prochainement une parcelle dédiée, non loin des rangs de vigne d’Ugni blanc ? Ce serait une belle occasion de redonner à la Moutarde de Gascogne toute la place historique qu’elle mérite, tant dans le cœur des amateurs… que sur les rayons alimentaires.

Voir le site internet

Les bons plans des Michel père et fils pour la déguster :

En association avec le cochon (rôti, boudin ou pieds).

En omelette (4 œufs et 1 cuillère de moutarde de Gascogne).

Dans un magret de canard fendu en portefeuille et délicatement cuit au four après dégraissage à la poêle.

Sur du mesclun, en l’associant à du vinaigre balsamique.

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