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L'INFO INCONTOURNABLEUne réforme utile pour les jeunes agriculteurs ?

D'ici l'année prochaine, une réforme viendra changer la Dotation pour les Jeunes Agriculteurs (DJA). Sylvain Bordenave, président des Jeunes Agriculteurs du 64 nous en explique les enjeux...
Un tracteur répand de l'engrais dans un champs.
À 34 ans, Sylvain Bordenave vient d'entamer son second mandat en tant que président du Syndicat des Jeunes Agriculteurs des Pyrénées-Atlantiques. Éleveur de bovins viande et viticulteur, il est aussi élu à la Chambre d'Agriculture.

Pour comprendre cette réforme, il faut d'abord comprendre ce qu'est la Dotation pour les Jeunes Agriculteurs (DJA). Cette aide, octroyée jusqu'à présent par l'État, permet aux jeunes agriculteurs de démarrer une activité et d’attendre les premières rentrées d’argent grâce à l'équivalent d'un demi-smic pendant deux ans. Pour résumer, cette aide financière est modulable en fonction de la nature de l'activité des engagements, par exemple agroécologiques de l'agriculteur, et de sa zone d’installation. 

Ainsi, aujourd'hui, un jeune agriculteur qui s'installerait en plaine recevrait 11.000 euros dans le cadre de la DJA, une installation en terrain accidenté serait accompagnée à hauteur de 14.000 euros, et en montagne le montant serait de 24.000 euros.

Concrètement, qu'est-ce que cette réforme va changer par rapport à la DJA ?

Sylvain Bordenave : La dotation qui était jusqu'à présent nationale, sera demain gérée à une échelle régionale. Ainsi, chaque région pourra décider de répartir l'enveloppe accordée comme bon lui semble en fonction de ses ambitions pour l’agriculture de son territoire. Ce n'est donc pas une baisse du budget global octroyé à l’installation mais une affectation différente.

Dans les Pyrénées-Atlantiques, premier département national sur l'installation en 2021, nous avons enregistré 170 nouvelles installations qui ont fait une demande de dotation, dont 65% se sont installées en montagne. Pourquoi ? Car c'est une zone dynamique, avec généralement des petites exploitations.  

La réforme de la DJA telle qu'elle est aujourd'hui va faire changer les dotations octroyées aux jeunes agriculteurs. Ainsi, quelqu'un qui s'installerait en plaine recevrait 2.000 euros de plus, en terrain accidenté ce serait 1.000 euros de plus, mais en montagne, c'est une perte de 7.000 euros qui est attendue.

Autre point très important, la future dotation ne prévoit d’aider financièrement que les installations en bio alors que jusque-là les exploitations choisissant d’être certifiée HVE (Haute Valeur Environnementale) bénéficiaient du même accompagnement.

Quels impacts cette réforme pourrait avoir sur la filière dans les Pyrénées-Atlantiques ?

S.B. : Pour la DJA, cette perte de 7.000 euros pour les installations en montagne, qui sont majoritaires et qui représentent presque autant de jeunes agriculteurs qu'il n'y a eu d'installation dans le second département en Nouvelle-Aquitaine, pourrait décourager des gens à se lancer dans une exploitation car on ne peut pas occulter le fait qu’une installation dans les montagnes est plus difficile, plus contraignante. Et quand l'on sait que d'ici 10 ans, 60% des agriculteurs actuels seront à la retraite, il y a un risque de crise dans la filière.

Pour le contrer, il faudrait que l'on soit à environ 500 installations par an dans notre département. Aujourd'hui, en comptant les installations qui sollicitent la DJA et celles qui ne demandent pas d’aides, nous sommes à 350 installations. Ce n'est pas assez...

Par ailleurs, on ne sait pas s'il sera plus avantageux de s'implanter en Nouvelle-Aquitaine ou en Occitanie, et l'on pourrait voir des exploitations passer d'un côté ou de l'autre de la frontière régionale. Puis ces aides, octroyées par la Région, ont une tendance politique. Chaque Région pourra décider d’aider telle ou telle production, tel ou tel système.

La réforme devrait être mise en place au printemps 2023, mais tout n'est pas encore acté, puisqu'il y a des négociations.

S.B. : Oui tout à fait. Il reste encore des choses à déterminer, dont l'attribution du budget. Forcément, chaque département a ses problématiques, et tout le monde se tire un peu la couette. Mais il y a un véritable enjeu pour faire perdurer nos exploitations. Ce sont de petites exploitations locales, et leurs particularités, expliquées précédemment, sont un peu uniques en Nouvelle-Aquitaine... Sinon que cela représente beaucoup de monde...

Je reste tout de même persuadé que nous pouvons trouver un terrain d'entente. En réfléchissant et en mettant en peu d'eau dans notre vin, on trouvera un compromis. Et on le voit, on avance petit à petit sur le sujet. Comme je vous l'ai déjà dit, le budget ne baisse pas, donc si on s'écoute tous, on pourra faire perdurer ce qu'on avait auparavant.

Et puis sinon, ce sera à nous de trouver des solutions pour changer notre façon de faire, réfléchir à de nouvelles façons d'installer nos jeunes. J'ai bon espoir…

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