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Une année record pour les ours dans les Pyrénées, malgré des défis persistants

Le nouveau rapport annuel du Réseau Ours Brun met en évidence une nouvelle augmentation de la population en 2023, tout en plaidant pour une plus grande diversification génétique.
L'ours Néré pris en photo en Béarn.FIEP
Le Fonds d'Intervention Eco-Pastoral (FIEP) Groupe Ours Pyrénées est une association engagée dans la préservation de l’ours, aide les bergers et sensibilise le grand public sur cette question. Créée à Pau en 1975, elle s’est donnée pour mission de faciliter la coexistence de l’espèce et des bergers des vallées pyrénéennes et de sensibiliser le grand public.

Réseau Ours Brun (ROB), dont fait partie l’association béarnaise, a publié le 2 avril dernier son rapport annuel 2023, dressant un bilan positif de la population d'ours bruns dans les Pyrénées françaises et espagnoles.

Dans ce massif, le suivi à large échelle d’une espèce aussi discrète que l’ours brun repose essentiellement sur des méthodes indirectes non-invasives qui font appel à la collecte des indices de présence de l’espèce (empreintes, poils, crottes, photos, dommages, etc.). Pour cela, les bénévoles réalisent des suivis systématiques, dans des zones de passage, et d’autres plus opportunistes.

Voici ce qu’il faut retenir…

L’aire de répartition géographique de la population et son évolution dans le temps, l’effectif et les principaux paramètres démographiques de la population (structure en âge, sexe, nombre de naissances et de mortalités) et la tendance démographique générale de la population (notamment l’évolution temporelle des effectifs) sont particulièrement étudiés.

L’année dernière a été marquée par un nombre record de naissances et une augmentation continue de l'effectif global. L’effectif minimal détecté (EMD) est de 83 individus (contre 79 en 2022). Cette croissance est principalement due à un nombre élevé de naissances, avec 16 oursons nés au cours de l'année. 2023 devient ainsi l’année où est observé le plus grand nombre de femelles suitées depuis les premières réintroductions de 1996. D’autre part, le ratio mâle/femme de la population est globalement équilibré (40 mâles pour 37 femelles).

Il y a quelques années, la présence de l’ours dans les Pyrénées orientales (le Béarn et les Hautes-Pyrénées) était plus que précaire, avec seulement deux individus mâles détectés, Néré et Cannellito. La réintroduction de deux femelles en 2018 a permis l’augmentation de la population sur ce territoire.

En 2023, 10 individus ont été comptabilisés (Claverina, Néré, Marmotte, Sorita, Rodri, Beroi, Lary). « Pour autant, le nombre de dégâts occasionnés et de prédations n’a pas augmenté (deux dégâts sur les cheptels domestiques en 2023) », assure le Fiep Ours Pyrénées.

L’examen des classes d’âge montre que la population est majoritairement composée de jeunes individus, dont 80% ont moins de 10 ans. La forte proportion de jeunes mâles de moins de 4 ans laisse également présager une augmentation à venir de l’aire de répartition du fait de leur capacité à disperser vers l’âge de 2 à 3 ans.

Ce nouveau rapport met également en évidence une question essentielle pour l'avenir de l'ours dans les Pyrénées : la consanguinité croissante des individus.

La diversité génétique, un enjeu vital

La diversité génétique est un paramètre déterminant dans la conservation de la population. Depuis le deuxième renforcement en 2006, le mâle Pyros a longtemps été le géniteur exclusif dans les Pyrénées. À partir de 2013, 16 autres mâles ont toutefois réussi à se reproduire. En 2023, sur les 11 portées identifiées, un 17e mâle a assuré sa descendance.

Tous les oursons nés en 2023 sont concernés, comme la quasi-totalité des ours présents. Certains sont les produits de parents et de grands parents déjà eux-mêmes consanguins. La diversité génétique se dégrade progressivement, pouvant entrainer des maladies, des malformations et l’infertilité de certains individus.

Les espoirs incarnés par des individus potentiellement améliorateurs, déjà rares, disparaissent les uns après les autres : certains ne se sont jamais reproduits (Palouma, Franska, Sarousse, Cannellito, Claverina), d'autres ont disparu avec leur rare descendance (Balou, Goiat), ou n’ont laissé qu’une maigre lignée (Néré).

« Il faut d'urgence apporter du sang neuf, car plus on laissera se dégrader la situation, plus il sera difficile de la corriger. L'arbre généalogique de la population actuelle repose très largement sur deux femelles, Mellba et Hvala, et du côté des mâles, c'est pire : plus de 85% des individus nés depuis 1996 sont les descendants d'un seul mâle : Pyros », constate Jérôme Ouilhon, animateur du Fiep.

Pour résoudre cette problématique, les différentes associations du Réseau Ours Bruns réclament le remplacement des ours tués par la main les humains ces dernières années, deux côtés français et deux côté espagnol, conformément à l'engagement pris par l'État, ainsi que la création d'un comité scientifique ours indépendant et l'élaboration d'un plan pluriannuel d'action pour la restauration de la population d'ours dans les Pyrénées pour remplacer le plan actuel.

Noémie Besnard

Des hivers de moins en moins rigoureux. Un problème ?

Interrogé sur le changement climatique et la hausse des températures hivernales qui entraînent la réduction du temps d’hibernation des ours, l’animateur du Fiep se veut rassurant. « Les ours sont des hivernants : lorsque la nourriture vient à manquer, en raison de l’enneigement par exemple, ils entrent dans un sommeil léger. Mais ils sont capables de se réveiller en cas de redoux, quand la nourriture redevient accessible. C’est un phénomène que l’on observe depuis plusieurs années. En décembre dernier, Sorita et ses deux oursons ont été pris en photo en Béarn et ils avaient tous l’air en bonne santé et bien en chair ».

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