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    Toulouse dans la course à la Lune et à l’exploration humaine

    Avec le projet Spaceship FR, le Cnes et ses partenaires expérimentent les technologies qui appuieront demain nos séjours sur la Lune. Un lieu d’innovation verra le jour d’ici 3 ans...
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    Alors qu’une véritable « course à la Lune » a été enclenchée par les États-Unis, une soixantaine d’instituts de recherche, d’industriels et de startups sont mobilisés aux côtés du Cnes autour de ce programme.

    Bientôt 50 ans après les derniers pas de l’homme sur la Lune (la mission Apollo 17 remonte à décembre 1972), on recommence depuis quelques temps à parler sérieusement de reposer le pied sur notre cher satellite. Cela se fera d’abord sous l’impulsion de la Nasa, dont le programme Artemis (initié sous Donald Trump) prévoit l’envoi d’un premier équipage en 2024, et plus loin l’installation d’une base lunaire sur le pôle Sud de la Lune d’ici 2040. L’Agence spatiale européenne (Esa) est partenaire de ce projet.

    Naturellement, la Chine est elle aussi sur les rangs avec un « contre-projet » de station internationale de recherche lunaire, dont la construction commencera à partir de 2026 et s’étalera sur au moins une décennie, avec une mise en service progressive. Depuis mars dernier, la Russie est associée à cette aventure. La Chine se dit par ailleurs ouverte à l’intégration d’autres nations à ce projet, dont le terme sera une présence humaine continue à partir de 2036. Derrière ce projet alternatif, il s’agit évidemment de ne pas laisser le monopole de l’exploitation des ressources lunaires aux États-Unis, désormais régie par leur fameux « Space Act of 2015 ».

    Un nouveau lieu d’innovation…

    En résumé, l’homme ne se contentera pas de reposer le pied sur la Lune. Il devrait s’y installer durablement dans les décennies qui viennent. Mais pour créer une base autonome et permanente sur le sol lunaire, le groupe international de coordination de l’exploration spatiale (dont la Nasa, l’Esa et le Cnes sont membres) estime qu’il faut travailler sur une cinquantaine d’axes technologiques.

    Pour se préparer à ces futurs séjours, l’Esa coordonne 3 programmes d’expérimentations complémentaires à Cologne (Spaceship EAC, avec en particulier un travail sur la fabrication de briques, vis et engrenages « à partir de simulants du sol lunaire »), Londres (SPaceship ECSAT)… et Toulouse (Spaceship FR, lancé en 2019). Ce dernier programme, piloté par le Cnes, fédère une soixantaine de partenaires, des universités (Toulouse, Côte d’Azur, Clermont-Auvergne…), des écoles (Insa, Supaero…), des instituts de recherche (CNRS, Inserm, Inrae…), des industriels (Airbus, Thales, ArianeGroup…) ou encore des startups, partenaires qui ne sont « pas forcément issus du domaine spatial ». Le but ? « Apporter la créativité et l’expertise d’acteurs français » sur la moitié de ces axes technologiques définis par les agences spatiales.

    Dans le cadre de ce programme toulousain, le Cnes a annoncé qu’un « lieu d’innovation et de démonstration dédié à l’exploration humaine va sortir de terre, à Toulouse » (avec le concours de l’État, de la Région et de la Métropole). Il sera progressivement construit d’ici 2023 ou 2024 et comprendra un espace de coworking, un atelier de fabrication ainsi que des modules dédiés à la santé et à l’utilisation des ressources (emportées ou déjà présentes sur la Lune, comme le régolite composant son sol).

    « Des modules serre, recyclage, eau et énergie sont aussi prévus. D’ici un an, nous devrions être une quinzaine de personnes sur le site avec 3 encadrants et une dizaine d’étudiants, doctorants et post-doctorants », expliquait Alexis Paillet, chef de projet Spaceship FR, en avril dernier. En attendant, 6 stagiaires d’écoles d’ingénieur ou d’université sont déjà associés à ce programme de réflexion et d’expérimentation.

    Belle diversité de partenaires…

    Concrètement, le champ des expériences est extrêmement large, et le programme profite déjà de la diversité des compétences de ses partenaires. On peut citer l’impression 3D d’outils à partir de basalte du Massif central, « bon simulant » du régolite lunaire (avec l’IMT Mines d’Albi et l’ancien astronaute Jean-Jacques Favier), un projet d’aquaponie pour associer culture de plantes et élevage de poissons (avec l’Ifremer) ou encore le travail mené par l’Insa autour d’un bioréacteur permettant de transformer les excréments humains en protéines alimentaires ou en bio-plastique.

    Avec l’entreprise Air Liquide, une réflexion est en outre en cours autour de la pile à hydrogène comme moyen de couvrir les besoins en énergie d’une base lunaire, en complément du photovoltaïque. Il s’agirait d’utiliser la glace d’eau présente au pôle Sud du satellite, pour l’hydrogène mais aussi dans l’optique de fournir de l’oxygène aux astronautes.

    D’autres projets touchent à la sélection de bactéries pour transformer mousses de protection et plastiques d’emballages en engrais, à l’utilisation de fibres optiques pour détecter et doser les radiations (en lien avec l’expérience « Lumina », actuellement menée par Thomas Pesquet sur l’ISS) à la purification de l’eau par rayonnement UV ou encore à la réflexion sur un « habitat en structure gonflable ».

    Rendez-vous avec la Lune…

    Dans le futur laboratoire, des stagiaires plancheront aussi sur de nouvelles méthodes de culture hors sol des plantes (« dont les racines plongeront directement dans l’engrais produit par des bactéries »), incluant des solutions d’éclairage (à LED ou par exploitation du rayonnement solaire).

    Le Cnes précise qu’en dépit d’expériences menées dans le contexte d’autonomie d’une présence sur la Lune, ses futurs modules ne pourront fonctionner dans les mêmes conditions qu’à destination, où la gravité est faible et l’atmosphère absente. Le centre national ajoute que le sujet important et bien connu de la gestion du confinement des individus est traité par le Medes, institut et « clinique spatiale » implantée au CHU de Toulouse.

    « L’espace est un domaine particulier où il faut miniaturiser au maximum. Vivre sur un autre astre impose sobriété et recyclage. Nous espérons que les technologies développées pour des séjours sur la Lune, et demain sur Mars, serviront aussi à réduire notre empreinte environnementale sur la Terre, pour une économie durable et circulaire », résumait il y a deux mois le responsable du projet. Car contrairement aux idées reçues, l’argent injecté dans la conquête spatiale génère assez systématiquement des retombées… sur Terre !

    Plus d’informations sur le site internet, cliquez ici

     

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