On a longtemps reconnu la MTC (Médecine Traditionnelle Chinoise) ou la MTT (Médecine Traditionnelle Tibétaine) comme anciennes et donc sérieuses, tandis que l’Ayurvéda ne pouvait se départir d’une réputation un peu trop holistique, exotique, hippie en un mot, du fait de sa proximité avec le yoga. Pourtant, vieille de plus de 5.000 ans, c’est une médecine dont l’approche intéresse de plus en plus en Occident. Venue des Védas, les textes sacrés de l’Inde en sanscrit, elle signifie : ayur, vie ; veda, science, connaissance, donc Science de la Vie.
Petit coup de colère en passant : non aux revues féminines qui titrent « Ayurvéda, découvrez votre dosha ! » car voilà bien une aberration toute sanscrite. Dosha signifie « défaut », « cause du mal ». Ce que vous aide à définir l’Ayurvéda, c’est votre constitution (prakruti) et éventuellement le déséquilibre dans votre corps (vikruti) du au poids des ans, à un style de vie inadéquat, à une diète approximative… Et le déséquilibre conduit à la maladie. Car nous sommes tous uniques ! On y vient.
Les cinq éléments en vous
La médecine ayurvédique se base sur les cinq éléments de la nature (air ou vent, feu, espace, eau, terre) et considère que vous en êtes constitués (ce qui nous ramène au niveau de n’importe quel « chose » composée de la nature : arbre, plante, animal, prends ça dans tes dents l’ego !) simplement dans des proportions différentes.
Il existe trois constitutions principales, et chacune dispose de ses « qualités » intrinsèques, vous allez voir, c’est plus facile qu’il n’y paraît. Vous pouvez être pur Vata, pur Pitta, pur Kapha, facile. Ou Vata-Pitta, Vata-Kapha, Pitta-Vata, Pitta-Kapha, Kapha-Vata (rare), Kapha-Pitta, voire les 3 constitutions Vata-Pitta-Kapha, ce qui est très rare.
Vata : Cette constitution est faite des éléments air (vent) et espace. Là où il y a du vent (songez à un désert), il y a de la sécheresse, et beaucoup de mouvement. Et il y a du froid. Donc les Vata auront des soucis de sècheresse (peau, tissus, cheveux, ongles), ce qui fait qu’on les reconnaîtra à leur minceur extrême (ils sont littéralement secs), et… à une autre conséquence de la sècheresse mais cette fois en interne, dans le colon plus exactement : une propension à la constipation. Le vent dans leur corps va aussi se situer dans leur tête et en faire des personnes facilement oublieuses, volubiles et… inquiètes, nerveuses comme on dit. L’insomnie les caractérise. Vata s’illustre par le mot « douleur » : d’articulations, de grincements du corps (ceux qui bruxent des dents, ne cherchez plus !) La solution ? Huiler en externe et en interne pour lubrifier. Réchauffer. Et une amie : l’huile de sésame qui va à la fois réchauffer (sa nature est chaude) et lubrifier en profondeur.
Pitta : Cette constitution est faite de (beaucoup) de feu, et une part infime d’eau. Le feu ? Ça brûle ! Toutes les inflammations, rougeurs, peaux à eczéma, brûlures d’estomac, crises de foie, et autres joyeusetés colériques sont dues à un excès de feu. Leur esprit est aigu (la qualité du feu) donc très intelligents mais s’ils s’énervent (ce qu’ils font facilement), c’est fichu. Pitta va devoir passer son temps à se rafraîchir, au sens littéral du terme. On lui interdira le soleil, et on l’enverra nager… Son alimentation ira aussi dans ce sens. L’huile rafraîchissante par excellence sera celle de coco. La coriandre, la menthe seront des amis de son alimentation. Ainsi qu’un peu de « douceur », avec un peu de sucré pour « arrondir les angles » (des pâtes, du lait…) Il/elle évitera la tomate, l’ail, la nourriture piquante, et… l’alcool (feu sur feu, ça explose !). Du point de vue psychologique, on les amènera à ne pas chercher à gagner tout le temps, l’une de leurs faiblesses… Et à ne pas se laisser submerger par le désir sexuel notamment… (ou submerger les autres de leurs exigences, ce qui est une autre paire de manches) … Sans oublier la colère, évidemment qui leur occasionne brûlures d’estomac et soucis hépatiques (vésicule et foie).
Kapha : La dernière constitution est faite d’eau et de terre. L’eau est un élément qui va engorger les tissus, et la terre les rendre lourds. Les rondouillards de naissance, les constitutions aux os larges, sont souvent de type Kapha. Attention toutefois à ne pas confondre une constitution Kapha et un déséquilibre Kapha, c’est-à-dire quelqu’un qui est d’une autre constitution (Vata ou Pitta) mais qui subit un déséquilibre l’ayant conduit à prendre beaucoup de poids, par exemple. C’est tout le travail du thérapeute de bien distinguer tout cela. Kapha est d’une nature agréable, placide, très bienveillante. Il/elle se mettra rarement en colère (attention toutefois si cela devait arriver, ne pas réveiller l’ours kapha qui dort). Mais sa tendance à la lenteur et à la léthargie va lui créer des problèmes : fatigue, dépression, prise de poids, etc. Le mot d’ordre pour cette constitution sera donc : remuer ! Bouger ! Physiquement certes, mais aussi côté alimentation, où l’on va préconiser des saveurs piquantes : du gingembre, de l’huile et des graines de moutarde, du poivre, du piment, du thé vert pour éliminer, du citron. Surtout pas de nourriture grasse ou crémeuse. Kapha passe – hélas - sa vie à faire attention alors qu’il n’aime rien moins que grignoter devant la télé, le pauvre…
Ces quelques précisions ne sont que de vagues approximations, car l’Ayurvéda va s’intéresser à tout, absolument tout : la digestion, l’appétit, le sommeil, la sexualité, l’activité physique, ce que vous mangez, ce que vous buvez, à quelle heure, la peau, les yeux, la mémoire, l’état psychologique, la langue, le cœur… Là où un docteur classique pourrait s’offusquer si vous lui volez de son précieux temps pour seulement lui dire que vous êtes constipé(e), le thérapeute ayurvédique va prendre cette donnée très au sérieux. Car elle est, selon lui, le préalable à un déséquilibre plus important du corps. Mais l’avantage, c’est que la médecine ayurvédique n’a absolument pas à se heurter à la médecine classique, au contraire ! Un bon thérapeute vous laissera toujours poursuivre votre traitement classique, et s’attachera plutôt à résoudre le problème originel qui a causé le déséquilibre conduisant à la maladie. Ses préconisations incluront l’alimentation évidemment, les boissons, des épices, des méditations et du yoga, des massages spécifiques pour chaque constitution, thérapies dites « internes » et « externes ». Rejoignant ainsi le célèbre Hippocrate qui affirmait qu’un « médecin qui ne sait pas donner un massage n’est pas digne de ce nom ». Avec un précepte de choix : « tout est bon pour quelqu’un, rien n’est bon pour tout le monde… » À méditer…
Gracianne Hastoy
Pour en savoir davantage sur le sujet :
Sophie Benabi – Le Grand livre de l’Alimentation ayurvédique, Editions Leduc
Gracianne Hastoy - Journal d’une Accro à l’Ayurvéda, Editions Lanore, 2021
Voir le livre
Judith H. Morrison – Le livre de l’Ayurvéda, le guide personnel du bien-être, Editions Le Courrier du Livre
Voir le livre
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