On le sait : dans la vie, il faut parfois casser des œufs pour faire de grandes choses. Félix Gilbert, lui, a cassé la baraque. À 17 ans, ce jeune Béarnais de Coarraze a remporté la 8ᵉ édition du Trophée Œufs de France, un concours national organisé par le CNPO (Comité pour la Promotion de l’Œuf), avec une recette qui revisite la cuisine traditionnelle : une « omelette torsadée béarnaise, comme une poule au pot revisitée ».
Inspirée du plat emblématique d'Henri IV, sa création a su flatter les papilles d’un jury composé de chefs, journalistes et experts culinaires réunis à Ferrandi Paris, la crème de la crème des écoles de gastronomie. Au programme : un croustillant de peau de volaille, des légumes pochés, un siphon à la volaille et une omelette montée avec la rigueur d’un ballet gastronomique. En somme, une partition culinaire qui transforme un simple œuf en œuvre d’art.
Un Béarnais qui n’a pas mis tous ses œufs dans le même panier
Né à Berkeley, en Californie, Félix Gilbert a posé ses valises à Coarraze, dans les Pyrénées-Atlantiques, à l’âge de 7 ans. Là-bas, entre Adour et Gave, il a gardé la flamme des fourneaux, allumée très tôt par son père, lui-même cuisinier.
Inscrit aujourd’hui en terminale STHR au lycée hôtelier de Biarritz, Félix a su transformer son attrait pour la cuisine en véritable projet de vie. Son passage remarqué dans les cuisines du restaurant palois Le Maynats a renforcé ses ambitions. L’année prochaine, il rejoindra en apprentissage le restaurant gastronomique Ekaitza, à Saint-Jean-de-Luz, où il travaillera aux côtés du chef Guillaume Roget.
Son rêve ? "Obtenir une étoile Michelin", déclare-t-il avec modestie mais détermination. Son modèle : Thomas Keller, grand nom de la gastronomie américaine, chef du French Laundry en Californie. Rien que ça.
Le Trophée Œufs de France est un concours professionnel exigeant, réservé aux jeunes de 16 à 24 ans en formation culinaire ou candidats libres. Il met en lumière la polyvalence de l’œuf, aliment universel et humble, capable de se glisser dans toutes les assiettes, de l’entrée au dessert, du snack de rue au repas étoilé.
Chaque édition a son thème. Pour 2025 : « L’omelette, star de nos terroirs ! ». Un clin d’œil à la tradition régionale et à la cuisine de grand-mère, qui invite à revisiter des plats d’hier avec les idées d’aujourd’hui. Félix s’est emparé du sujet avec brio, en livrant une version délicatement modernisée de la poule au pot, ce plat patrimonial ancré dans les gènes culinaires du Sud-Ouest.
Pas d’omelette sans casser des codes
S’il fallait un mot pour qualifier la recette gagnante, ce serait sans doute : audace. En choisissant de détourner un plat connu de tous, Félix a pris un risque… mais un risque bien calculé. Le jury, présidé par le MOF Guy Legay (ancien chef du Ritz), a salué la technicité, la maîtrise des cuissons, l’harmonie des saveurs et le dressage aussi soigné qu’élégant.
Sa recette mêle innovation et mémoire, créativité et respect, un savant mélange à la fois subtil et généreux. Une signature qui devrait faire école.
Au-delà du talent individuel, ce concours est aussi un hommage au produit : l’œuf. Porté par le CNPO, l’événement valorise l’engagement de toute une filière française qui œuvre pour le bien-être animal, la traçabilité et la qualité nutritionnelle. Le logo « Œufs de France », désormais bien repéré en rayon, certifie que les produits proviennent exclusivement de poules élevées en France, avec une alimentation contrôlée.
Le concours rappelle aussi que l’œuf n’a rien à envier aux produits les plus nobles : peu cher, sain, facile à cuisiner, il est l’un des rares aliments à conjuguer simplicité et haute cuisine, accessibilité et excellence.
Un avenir tout tracé…
À 17 ans, Félix Gilbert vient donc de franchir une étape importante. Il n’est pas encore étoilé, mais il a déjà prouvé qu’il pouvait briller parmi les jeunes espoirs de la gastronomie. Sa participation, et sa victoire, au Trophée Œufs de France est un signal fort envoyé à la profession.
Il y a dans sa démarche un respect sincère du terroir, une envie de transmettre des émotions, mais aussi une volonté de rester ancré dans les valeurs du Sud-Ouest, tout en les revisitant avec justesse. Une philosophie du goût, de l’esthétique et du bon sens.
Qu’un garçon de 17 ans venu du Béarn fasse l’unanimité au cœur de la capitale gastronomique, cela ne relève pas de la coïncidence. C’est le fruit d’une passion précoce, d’un apprentissage rigoureux, et d’une créativité bien à lui. Félix n’est pas une coquille vide. Il a du répondant, de l’imagination, et surtout une envie furieuse de bien faire.
Il ne lui reste plus qu’à continuer de battre des œufs… et des records.
Sébastien Soumagnas
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