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INÉDITUn internat rural en Chalosse Tursan et Pays Grenadois

Alors que les déserts médicaux s’étendent et fragilisent l’accès aux soins, deux communautés de communes landaises prennent une initiative prometteuse.
Des milliers de kilomètres carrés sont privés de chirurgien, de généraliste ou même de dentiste
Communauté de Communes Pays Grenadois DR
L'objectif est d'attirer les jeunes médecins et garantir une présence médicale pérenne au cœur des bourgades de ces territoires.
Les deux Communautés de Communes ont signé la création d’un internat rural
DR

Aujourd’hui, en France, une pandémie sans virus ravage silencieusement le tissu rural : celle des déserts médicaux. Des milliers de kilomètres carrés sont privés de chirurgien, de généraliste ou même de dentiste. Les populations âgées, les familles ou les jeunes travailleurs se retrouvent face à des délais d’attente pénalisants, des kilomètres de route et une inégalité criante d’accès aux soins. Les urgences surchargées, le manque de garde, les absences de remplaçants : ces territoires soignent mal, et parfois pas du tout. Ce déficit devient aigu surtout lorsque le médecin de référence part à la retraite, sans que personne ne vienne prendre sa suite. Face à ce constat alarmant, deux intercommunalités du Sud-Landes ont décidé d’agir de front, pour panser ce vide avec une stratégie innovante.

Perfusion de soins en zone déshéritée

Il y a trois semaines, à Bayonne, la communauté de communes du Pays Grenadois (CCPG) et celle de Chalosse Tursan (CCCT) signaient un protocole inédit : la création d’un internat rural. Une première en Nouvelle-Aquitaine. Un bail d’entente collaboratif destiné à loger jusqu’à dix étudiants en troisième cycle médical. Sur une villa d’environ 350 m² située à Hagetmau, ce lieu de vie permettra à de jeunes médecins en spécialisation de s’installer pour des stages de six mois successifs. Objectif affiché : les familiariser avec le territoire et les encourager à y établir leur pratique durablement.

L’internat ouvrira ses portes début 2026. L’acquisition de la villa, les travaux d’aménagement, ainsi que l’entretien sont cofinancés par les deux communautés de communes, avec le soutien de l’État, de la Région, du Département des Landes et du programme européen PETR.

En parallèle, la CCPG a pris la compétence santé, en décembre 2023, pour restructurer la Maison de Santé Pluridisciplinaire existante. Cette initiative découle d’un diagnostic alarmant réalisé en 2022, qui mettait en évidence des locaux obsolètes, peu attractifs pour accueillir du personnel neuf. L’étude menée par l’architecte C+M Architectes de Mimizan confirme la faisabilité d’une rénovation lourde, nécessaire pour moderniser les espaces dédiés aux consultations médicales et paramédicales.

Le chantier, structuré en deux phases successives de 2025 à 2026, permettra le maintien de l’activité pendant les travaux. Ainsi, les cabinets de la rue René Vielle resteront en service grâce à une solution transitoire. L’opération, d’un montant total estimé à 1,5 million d'euros, inclut l’achat du foncier, la maîtrise d’œuvre, et l’ensemble des travaux de construction et de remise aux normes.

Un diagnostic précis pour une prescription publique

Les élus ne se sont pas lancés sans réflexion préalable. Un cycle de concertation approfondie avec les professionnels de santé, via le PETR Adour Chalosse Tursan, a permis de clarifier les besoins : confort, accessibilité, modularité des locaux et attractivité. Les médecins actuels sont devenus locataires du projet, signe d’un partenariat public-privé basé sur la confiance. En renforçant leur cadre d’exercice, la communauté de communes entend recruter plus facilement de nouveaux praticiens, internes et médecins jeunes.

L’internat rural compte attirer de nouveaux professionnels
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Plus qu’un plan local, ce projet agit comme une injection de vitalité territoriale. L’internat rural agit comme une première entité relais pour attirer de nouveaux professionnels, tandis que la maison de santé rénovée garantit un accueil pérenne. En combinant ces deux leviers, la logique est claire : prévenir le délabrement médical et recréer un service public au plus près des habitants.

L’internat rural constitue une véritable antidote à la désertification. Il offre une immersion prolongée à des internes, souvent formés en ville, en leur familiarisant avec les réalités de terrain. Ce dispositif, en s’appuyant sur un lien territorial fort, accroît les chances qu’ils y restent. Quant à la maison de santé, en se rénovant, elle devient capable d’accueillir de nouveaux praticiens, et d’améliorer la prise en charge globale, coordonnée et moderne des patients.

La prescription est lancée

Ce projet constitue un modèle pour d’autres territoires ruraux. Il fonctionne comme un consortium de santé locale, rassemblant collectivités et professionnels dans un même acte volontaire. C’est un modèle de gouvernance partagée et d’action structurée qui tranche avec les initiatives dispersées. En plaçant la santé au rang de politique publique de proximité, ce programme opère une cure de vitalité dans des territoires fragilisés.

Reste à transformer cette ordonnance en résultat concret. Le chantier débutera en septembre 2025, avec un achèvement prévu fin 2026. Entre temps, la gouvernance collégiale devra lever quelques résistances techniques, juridiques ou logistiques. Mais l’enthousiasme est réel, la feuille de route fixée, les partenaires financiers engagés.

Sébastien Soumagnas

Les travaux de réaménagements des locaux, rue des Remparts, commenceront en septembre
Communauté de Communes Pays Grenadois DR

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